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Tumulte-doc

17 février 2008

par Jacques Salomé Méthode E.S.P.E.R.E. Amour - Sexualité On me dit qu'il y a des amours impossibles…


 

Thèmes d’application de

la Méthode E.S

.P.E.R.E.

Amour - Sexualité

On me dit qu'il y a des amours impossibles…

par Jacques Salomé

Il n'y a pas d'amours impossibles, du moins je n'en connais point. Il n'y a que des amours contrariés

et violentés par des tiers ou des règlements ou encore interdits par des tabous. Et ils sont plus nombreux

qu'on ne peut l'imaginer. Des amours entravés par des peurs, dévoyés par des leurres, ballottés par des

vents contraires, freinés par des obstacles réels ou fantasmés, barrés par des écueils que l'on imagine pour

soi, pour l'autre… oui il y en a beaucoup.

Il n'y a pas d'amours impossibles, car c'est justement l'une des grandes forces de l'amour, d'être

porteur d'une telle énergie, qu'il est capable de traverser beaucoup de difficultés, de s'opposer à des

dangers sans noms, de vaincre toutes les oppositions ou de dépasser toutes les entraves. C'est vrai qu'il y a

des amours fragilisées par le doute, blessées par des contradictions, dévoyées par des croyances ou encore

assassinées par des certitudes erronées. C'est vrai qu'il y aussi des amours qui dérangent, qui inquiètent un

entourage, menacent des proches (qui vont se jeter dessus pour les disqualifier, les déchiqueter) ou encore

des amours qui vont réveiller d'anciennes blessures mal cicatrisées et faire reculer, empêcher la rencontre

avec un bonheur possible.

Il y a des obstacles, non au sentiment amoureux, mais à sa réalisation, à son épanouissement, et

certains sont plus infranchissables que d'autres. Ceux en particulier qui relèvent d'une croyance religieuse,

d'un parti pris politique, culturel, ou encore de décisions prises à un niveau abstrait, aveugle ou collectif, et

donc inaccessible, sur lesquelles l'individu n'a pas de prise.

Pour une femme aimer un soldat allemand en pleine Occupation est possible. Ce qui sera difficile, c'est

d'aimer dans la sérénité, dans l'abandon et cette relation comportera des risques importants, en particulier

pour la femme. Beaucoup de femmes (pourquoi seulement des femmes ?) ont payé cher le fait d'avoir

transgressé cette impossibilité. Etre professeur de français dans le midi de

la France

et aimer un Touareg

rencontré lors d'un seul voyage au Hoggar, se voir ensuite trois semaines par an durant 15 ans, et depuis

10 ans attendre que l'Algérie cesse de se déchirer pour pouvoir revoir à nouveau son amour, est difficile,

mais cela reste encore possible… Aimer une femme musulmane et vouloir construire sa vie avec elle, quand

le père fait obstacle et demande à l'homme de se convertir, d'entrer dans ses croyances, aimer une juive

quand on est palestinien, une chinoise quand on vit au Yémen… n'est pas facile, mais nombreux sont ceux

qui se sont confrontés à ces difficultés et les ont traversées.

L'âge, c'est-à-dire le décalage des âges entre l'un et l'autre, est parfois avancé, pour hésiter, pour se

donner un alibi à ne pas oser vivre un amour, mais pour ceux qui découvrent la réciprocité d'un sentiment,

l'âge n'est pas un obstacle insurmontable.

Le seul amour impossible, qui ne peut se vivre, est l'amour incestueux, avec l'interdit irréductible

d'avoir une relation sexuelle. Tel cet homme déchiré, qui me disait avoir retrouvé sa soeur, qu'il n'avait

jamais connu, avant trente ans et dont il était devenue profondément amoureux, sans pouvoir se défaire de

ce sentiment.

Il n'y a donc pas d'amours impossibles, mais seulement des relations amoureuses qui paraissent

impossibles Mais face à cela, nous connaissons tous des histoires d'amour qui avaient contre elles toutes

les forces contraires de l'univers, qui auraient dû être impossibles et qui cependant ont pu se vivre et même

durer au delà de tous les interdits, de tous les empêchements. L'amour, outre qu'il est porteur d'une énergie

rare, recèle quelques-uns des mystères de la vie qui lui donne une puissance inouïe dont la force nous

émerveille sans nous surprendre quand nous en sommes les bénéficiaires.

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.P.E.R.E. - Amour-Sexualité 1/14

Toutes les femmes sont des femmes fontaines,

mais toutes ne le savent pas !

par Jacques Salomé.

Une lectrice attentive m’a écrit tout dernièrement et je ne peux m’empêcher d’offrir sa lettre

à la communauté des femmes et des hommes (qui lisent aussi je l’imagine Chatelaine)

« J’ai lu votre article sur les femmes fontaines dans un numéro de Psychologies de mars

2003, intéressant à bien des égards et qui a ce grand mérite de s’attacher à un sujet dont l’aspect

tabou cède de plus en plus de terrain.

Depuis l’Antiquité, circulent beaucoup d’interrogations. Des hommes se sont penchés sur

la question. Des messieurs, certes très respectables, médecins, urologues, sexologues,

psychanalystes et scientifiques discourent sur le sujet. Des savants, sans aucun doute, mais

peut-être pas de véritables connaisseurs, aucun amateurs suffisamment aimables comme nous le

souhaiterions !

Alors même si le tabou de « l’éjaculation féminine » commence à sauter, le terme n’est pas

tombé en désuétude, paraît-il, même s’il est trop connoté « masculin », la vérité n’est pas

encore sortie du trou, si j’ose dire.

Je n’ai aucun titre particulier pour apporter la bonne parole, ajoute ma lectrice, je n’ai que

mon expérience personnelle, celle de mon corps de femme et là, malgré tout, déjà, j’ai quelques

longueurs d’avance. Ce corps qui me raconte et me dit à travers son anatomie et ses sensations

comment les choses se passent en moi.

C’est pourquoi je ne peux pas laisser « passer » certaines affirmations énoncées dans votre

article sans réagir. Il s’agirait « d’un phénomène strictement physiologique et qu’on ne peut ni

freiner ni provoquer. »

Il serait inutile écrivez-vous « de chercher le point F, les femmes fontaines émettent ce

liquide sans qu’une zone particulière soit stimulée. C’est l’expression physiologique de

l’orgasme, vaginal autant que clitoridien… » », affirme avec force mon interlocutrice.

Ai-je vraiment écrit cela dans un moment d’égarement ou de lucidité aiguë ?

Un peu plus loin dans sa lettre, ma lectrice s’écrie (en grosses lettres), toute vibrante de son

expérience : « FAUX, pour l’avoir vécu et le vivre encore, si on ne peut freiner cet émoi, je

sais qu’on peut le provoquer. Mieux encore, chaque femme ainsi stimulée devient à coup sûr

fontaine. Il suffit d’un homme averti, d’un « sourcier » ou d’un « fontainier » si vous

préférez. En effet, la stimulation manuelle par le partenaire masculin d’un point bien précis, à

l’endroit de ces glandes sous-cervicales de la vessie dont vous parlez, (jamais je peux en

témoigner, je n’aurais utilisé des mots aussi barbares) provoque sous réserve d’une légère

participation de la femme, une émission de liquide qui va crescendo avec la stimulation. Pour le

succès de l’affaire, il faut simplement que la dame, un tant soit peu avertie elle aussi, de son

corps et de ses sensations intimes « pousse », et là… c’est l’inondation.

Plus qu’un fontaine coulante, c’est un geyser jaillissant. La sensation qui accompagne ce

jaillissement est quelque peu différente de celle de l’orgasme. C’est autre chose, même si cela

s’y apparente, c’est plutôt une sensation chaude d’abandon, de libération très agréable.

L’écoulement est dans mon cas dissocié de l’orgasme à proprement parler... »

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.P.E.R.E. - Amour-Sexualité 2/14

Je ne saurais mieux le dire et il est préférable que ce soit une femme qui l’affirme et nous le

rappelle pour mieux être entendu par tous ceux qui vont me lire. Mon interlocutrice veut aller

jusqu’au bout de ses découvertes. « Là, il n’est alors plus question de variation de flux,

puisque c’est sans fin. Oui, aussi longtemps que le sourcier sollicite la source, le jaillissement

continue. C’est comme cela que j’ai appris que j’étais une femme fontaine. Je suis même plus

que cela, une femme geyser. En cela ni privilégiée ni handicapée par rapport aux autres

femmes, car tout simplement, nous sommes toutes fontaines, mais nous ne le savons pas. »

C’est aussi ma conviction la plus profonde, toutes les femmes sont des femmes fontaines,

des femmes jaillissantes, généreuses, abondantes dans leurs émois acceptés, partagés. Nous ne

saurions trop le redire, nous, c’est-à-dire les femmes qui l’ont découvert, les hommes qui l’ont

vécu avec ces mêmes femmes.

Et ma lectrice de conclure :

« Bien sûr, il faut trouver un fontainier, un homme qui sait, qui connaît bien le corps de la

femme, encore mieux qu’elle-même ! La seule contrainte, prévenir le voisin du dessous contre

le dégât des eaux qui pourrait survenir si le petit jeu se prolonge. Mais gare aussi au dégât du

plafond en cas de geyser ! »

La fin ne manque pas d’humour tendre, et c’est bien ainsi pour un sujet, qui trop souvent

prête à sourire narquois, et même à des jugements de valeur, qui sont blessants pour l’un ou

l’autre des partenaires, qui osent parler de cette merveille mal connue que sont les femmes

fontaines.

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.P.E.R.E. - Amour-Sexualité 3/14

Les petits problèmes

par Jacques Salomé

Quand un homme téléphone à un sexologue ou à un thérapeute, ce n’est jamais pour un

gros problème, c’est toujours pour un petit. « Je vous appelle, c'est une amie qui m’a donné

votre nom, pour un petit problème que j’ai depuis quelques temps, j’aimerais vous en parler

directement si c’était possible ».

Si le thérapeute demande des précisions ou d’en dire un peu plus, l’interlocuteur élude, se

dérobe « Ce n’est pas grave, mais je préfère en parler directement avec vous, vous

comprendrez mieux… »

Le petit problème en question, neuf fois sur dix concerne la vie sexuelle et en priorité le

fonctionnement de cet outil précieux, qui reste au centre de beaucoup de préoccupations chez les

hommes. « Je ne comprends pas avec ma femme je n’avais aucun problème, cela marchait à

tous les coups, mais avec l'amie que j’ai rencontrée après mon divorce, ça coince. Je n’arrive

pas à avoir des érections. Pourtant elle est gentille et patiente, mais je n’arrive pas à bander

normalement. C'est pas normal j’ai envie de faire l’amour avec elle, surtout quand je ne suis

pas avec elle, j’y pense sans arrêt, mais sitôt en situation, il n'y a plus rien, je suis mort… »

Petits problèmes autour de l’érection, de l’éjaculation, de la répétition, un tel dira « Je ne

me reconnais plus j’étais une véritable mitrailleuse, plusieurs fois chaque nuit, et maintenant

c’est comme si j’avais un fusil à un coup, je me sens minable ! »

Parfois surgissent des interrogations qui n’avaient pas eu de place jusqu’à ce jour. « Ma

nouvelle compagne veut que je lui embrasse le sexe, moi je n’ai jamais fait ça. Je n’aime pas, ça

me dégoûte. Je sens que je lui fais de la peine. Elle, elle n’a aucune difficulté avec mon sexe,

elle me boit sans difficulté. Je ne sais plus où j’en suis… »

Il semble qu’il y ait chez les femmes d’aujourd’hui, non seulement une plus grande liberté,

mais aussi une inventivité, une créativité qui bousculent des habitudes, le train-train sexuel de

certains hommes, et les confrontent à des résistances inattendues.

« Ma nouvelle amie, quand elle fait l'amour avec moi, a besoin de se caresser, de se

masturber quoi, moi ça ne me plait pas, c'est comme si je ne lui suffisait pas. Alors je préfère

ne rien faire…"

Ne rien faire, bouder, rester passif ou encore fuir ?

Les petits problèmes touchent non seulement à quelques-uns des mystères de leur propre

sexe, mais aussi à ceux encore plus mystérieux et secrets de la femme. Ainsi avec la demande

d'aide (minimiser au minimum: petits problèmes !) se clarifient ,non pas uniquement des

connaissances confuses, mais se restaurent quelques situations conflictuelles de l’histoire de

chacun. « La première fois où j’ai senti cette femme couler, j’ai crû qu’elle était incontinente et

vous me dites que c’est normal, que c’est un cadeau, une marque d’abandon et de confiance

envers moi ! »

Ainsi, les petits problèmes, quand ils sont mis à plats, quand ils peuvent faire l’objet d’une

médiation, d’un accompagnement respectueux, peuvent ouvrir à une meilleure compréhension

et à plus d’intimité partagée entre hommes et femmes.

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.P.E.R.E. - Amour-Sexualité 4/14

Sentiments et attachement

par Jacques Salomé

J’entends souvent des femmes,amoureuses d'un homme marié (ou d’un homme déjà

engagé dans une autre relation plus ancienne), se demander (surtout si elles se sentent aimées de

cet homme) : « Mais pourquoi, puisqu’il me dit qu’il m’aime, pourquoi ne quitte-t-il par

l’autre ? Pourquoi ne met-il pas fin à cette relation, alors qu'il m'assure qu'il ne se passe plus

rien entre lui et elle ? Pourquoi ne prend-il pas la décision de venir vivre à plein temps avec moi,

de s’engager et ainsi de se définir plus clairement, définitivement avec moi ? ».

Je connais bien sûr des hommes engagés dans une relation tierce, aimants et se sentant

aimés par une femme mariée qui pensent et voudraient eux aussi exprimer quelque chose de

semblable, mais ils sont plus rares.

Peut-être faut-il se rappeler deux données essentielles qui semblent être oubliées par les

deux protagonistes d'une relation tierce. Ce ne sont pas les mêmes enjeux affectifs qui

caractérisent une relation principale et une relation tierce (j’appelle relation tierce une relation de

rencontre, vécue en parallèle avec une relation principale inscrite dans la durée).

Une relation principale, même quand subsistent des sentiments forts, est surtout nourrie

prioritairement par de l'attachement et un vécu commun, une relation tierce s’alimente

essentiellement avec des sentiments, du plaisir et de l'espérance.

Un tout nouveau sentiment d’amour n’a pas de passé. Il surgit à un moment de l’histoire

d’un être et se survit à lui-même en étant alimenté par le présent, vivifié par ce qui se passe dans

l'instant de la rencontre et quelques fois par des projections sur l’avenir immédiat.

Un attachement a un double passé : celui lié à la personne (dans le cas d’un homme marié, à

sa femme), et celui lié à sa propre histoire autour des personnages significatifs de son enfance.

Ainsi, la plupart des femmes et des hommes qui vivent des relations tierces semblent ignorer

que sentiment et attachement ne pèsent pas le même poids, sur le plateau des décisions à

prendre.

Pour la plupart des hommes mariés, le conflit entre sentiments (vers la personne tierce) et

attachement (vers la personne principale) apparaît comme insoluble, aussi refusent-ils le plus

souvent de s'y confronter. Et ainsi vont-ils rester, parfois durant des années, à l’intérieur de ce

conflit. D'un côté, ils sont capables d'assurer à la relation tierce avec sincérité « Je t’aime »,

« J’ai envie de vivre avec toi », « Tu es importante pour moi »,…) et de l'autre côté, ils sont

susceptibles de témoigner, avec autant de sincérité silencieuse à la relation principale : « Je ne

peux pas te faire souffrir, je ne peux pas te faire ça : te quitter. Je suis attaché à toi, pas

seulement par de la culpabilité, mais par de multiples liens, ramifications, souvenirs,

expériences de vie, épreuves, gratitudes et reconnaissances qui me lient si fortement que je ne

peux envisager de rompre sans souffrir, sans avoir le sentiment que c’est moi que je trahis…».

Peut-être aussi l’un ou l’autre de ces hommes mariés pourrait-il dire avec plus de lucidité :

« Je suis attaché à l’image que j’ai de moi-même ». « Je ne me vois pas quittant la femme avec

qui j’ai partagé vingt années de ma vie, la mère de mes enfants, celle qui m’a soutenue dans

mes études ou mes expériences professionnelles, celle que j’ai fait avorter tout au début de notre

relation, avec qui j’ai perdu un bébé, qui m’a soigné, que j’ai accompagné dans tellement

d’épreuves… ». Cet attachement à l’image de soi-même constitue souvent un lien invisible, si

fort, que l'homme va rester avec sa partenaire principale, sans pouvoir se résoudre à la quitter,

tout en voulant garder la relation tierce.

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.P.E.R.E. - Amour-Sexualité 5/14

Il faut donc, que celle qui vit une relation tierce, entende qu’elle se trouvera confronter à

tout un champ de forces qui ne lui seront pas favorables. La plupart vont rester dans la croyance

que leur amour, le plaisir des rencontres, l’accord sexuel – souvent exceptionnel – qu’elles ont

avec un partenaire engagé ailleurs, sera suffisamment puissant pour modifier les deux relations

en compétition et transformer d'une part le relation tierce en relation principale et la relation

principale en éloignement ou rupture…

Cela arrive parfois, mais quand cela se produit cela se fait, la plupart du temps, dans la

première année d’une relation. Ensuite, c’est beaucoup plus aléatoire et risqué… pour la relation

tierce. Le risque étant, pour la nouvelle venue de rester coincée dans une relation tierce alors

que son désir est d'ouvrir une relation principale, essentielle avec l’homme qu’elle aime.

Peut-être chacun des protagonistes de la relation tierce, pourrait-il tenter d'entendre en lui,

la dimension conflictuelle de ce qui le lie, de ce qui le retient, de ce qu'il attend et espère et

partager tout cela avec l'autre

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.P.E.R.E. - Amour-Sexualité 6/14

Une rencontre n'est pas une relation

par Jacques Salomé

Cette femme m'écrit pour me dire combien il est difficile pour elle de ne pas fondre, de ne

pas craquer, de ne pas croire au miracle de l'amour dès qu'un homme lui manifeste un peu

d'attention, un zeste d'intérêt, un geste de tendresse…

« Ce jour-là, j'attendais mon train, qui avait un retard de plus d'une heure, en gare

d'Avignon. Dans le hall où j'avais décidé de lire, il y avait beaucoup de monde, mais j'ai

remarqué tout de suite un homme qui accompagnait sa grande fille qui devait prendre un train

déjà à quai… Un homme qui a capté mon attention, que j'ai regardé longtemps, car je le

trouvais beau et tendre dans sa relation avec sa fille, pendant qu’il lui disait au revoir. Un

homme qui a dû sentir mon regard, car au bout d'un moment il s'est avancé vers moi et m'a

offert un café.

J'ai « osé » dire oui. J'étais ému, c'est moi qui le trouvais intéressant et c'était lui qui

faisait le premier pas. Quelques heures avant jamais je n'aurais pensé qu'une telle rencontre fut

possible.

J'ai découvert quelqu'un de charmant, cultivé et même passionnant. Plusieurs aspects de

lui m'ont intrigué et j'ai manifesté la possibilité de lui écrire. Depuis quelques jours il me

répond avec plein d'attentions, de douceur, d'ardeur, et d'humour, il s'exprime sur différents

sujets avec justesse et je me sens rejointe sur beaucoup de points.

Je suis « en train » (forcément, vu mes attentes d'être aimée) de tomber amoureuse et lui

est plutôt « en train de me trouver très désirable » (je le sens dans ces derniers écrits) Ce qui,

vous l'avez maintes fois écrit, n'est pas la même chose ! « L'une se meurt d'amour pour un

qui se sent plus vivant de tous ses désirs ! »

Je passe beaucoup de temps à penser à cet homme, à cette relation, beaucoup d'énergie à

trier mes sentiments, mes sensations, mes peurs aussi, à tenter de clarifier toutes les émotions

qui surgissent et en même temps je me défends, (pour l'instant) d'engager une relation sexuelle

parce que le désir trouble mes facultés de discernement, parce que je pressens l'attachement (et

donc la dépendance) que j'aurais à partir de cette intimité physique.

Le soir dans le calme de mon appartement, j'essaie de répondre calmement à mes propres

questions : est-ce que j'ai quelque chose de plus à partager avec cet homme (capricorne, comme

une ma dernière relation) en dehors d'un sentiment de bien être et d'une attirance physique ?

Depuis quelques années, j'ai décidé de mettre la barre plus haut, de ne pas me contenter de

rencontres aléatoires et trop centrées sur la sexualité, qui me laissent chaque fois avec un

sentiment amer, celui d'être « consommée » et de me consumer par la suite dans l'attente

d'autre chose !

J'ai envie d'une rencontre sacrée, d'un partage au-delà du désir physique, d'un ancrage

possible dans la durée d'une relation vivante, bonne pour chacun… Avec cet homme j'ai envie

de me lancer et je doute, je ne suis sûre de rien… »

J'imagine, que cette femme a traversé un certain nombre d'expériences, que sa lucidité est

fondée sur un vécu intime et je trouve ses aspirations légitimes. Le malentendu possible me

semble être ailleurs. Pour moi, il n'y a pas encore eu de relation, seulement une rencontre et des

partages hors réalité au travers d'écrits, de plus en plus enflammés.

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.P.E.R.E. - Amour-Sexualité 7/14

Construire une relation suppose des échanges, des confrontations et parfois même des

affrontements pour vérifier la solidité et la viabilité du lien naissant. Je rappelle souvent que

nous sommes toujours trois dans une relation : l'autre, soi et le lien qui nous relie. Ce qui passe

dans ce lien peut alimenter, vivifier, dynamiser mais aussi meurtrir, blesser ou désespérer l'un

ou l'autre. En particulier devant le fossé qui peut s'ouvrir, face au décalage entre les attentes (de

l'un) et les réponses (de l'autre), fossé qui devient souvent de plus en plus large et parfois

infranchissable. Il arrive alors que les attentes ou les réponses d'un des partenaires réveillent

des zones d'intolérance ou de vulnérabilité, restimulent des blessures anciennes chez l'autre,

débouchent sur la prise de conscience d’un non partage sur l’essentiel des valeurs ou des

croyances et, risquer d’entretenir de frustrations qui vont se répéter dans la durée.

Je ne sais quand ma correspondante prendra la liberté de témoigner face à son nouvel ami,

de ses attentes, de ses apports possibles et de ses zones d'intolérance pour une relation à vivre

au-delà d'une attirance et d'un désir.

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.P.E.R.E. - Amour-Sexualité 8/14

Car nul ne sait à l’avance la durée de vie d’un amour.

par Jacques Salomé

Il n’y a pas, me semble-t-il, de règles, de lois, qui puissent régir, contrôler, ou guider

l’amour.

S’il y en a…, je ne les ai pas encore découvertes. Cependant beaucoup s’acharnent autour

de moi à les découvrir, certains, même, voudraient se les approprier pour tenter d’être plus

heureux, pour pouvoir moins souffrir, se faire mieux aimer ou apprendre à mieux aimer… Le

coeur ayant des raisons et des mouvements, que la raison et la liberté ignorent… Nous sommes

les uns et les autres confrontés, à ce qui peut ressembler pour certains à l’irruption d’un

cataclysme qui bousculera toutes leurs habitudes, pour les autres à un tremblement de terre qui

transformera la totalité de leurs paysages intimes et pour bien d’autres encore cela ressemblera à

un raz-de-marée émotionnel qui emportera toutes leurs certitudes et transformera des croyances,

vécues jusque là comme inébranlables en trahisons injustes.

L’amour est un ensemble de sentiments totalement irrationnels, et donc, incontrôlables, qui

vont surgir en nous sans prévenir, sans précautions particulières, sans préparations…

Ce qui, par contre, peut être plus conscientisé, plus apprivoisé et donc faire l’objet d’un

ajustement, ce sont les conduites relationnelles, les comportements et l’incroyable décalage, qui

va naître à l’intérieur d’une relation amoureuse, créant un fossé, une faille immense entre les

attentes de l’un et les réponses de l’autre.

Ce qui menace le plus l’amour, n’est pas l’amour, ce sont deux phénomènes universels.

L’un, imprévisible, que j’appelle le désamour, c’est-à-dire la mort de l’amour, et l’autre, c’est

la mauvaise qualité de la relation proposée par celui ou celle qui aime, par celui ou celle qui est

aimée.

Pour le premier phénomène, je sais que je vais irriter, car je vais toucher là, à un ensemble

de croyances fortes, auxquelles beaucoup s’accrochent, comme celles-ci “que l’amour est

éternel”, ou encore “quand on aime vraiment c’est pour la vie, c’est pour toujours”, “que cet

amour-là, c’est le bon et qu’il est immortel !”

Nous avons du mal à accepter, de n’avoir aucun pouvoir sur l’amour, sur nos sentiments,

et surtout, sur ceux de l’autre. Nous aimons, nous sommes habités de sentiments forts,

émerveillés par des désirs, remplis de perceptions bonnes, et un jour, c’est le réveil, une sorte

de vide, de manque… Notre amour a disparu, il n’est plus présent. Nous prenons conscience,

que cet amour-là, ne nous habite plus, ne nous dynamise plus, qu’il est mort de sa belle mort.

Car, nul ne sait à l’avance la durée de vie d’un amour.

Pour le deuxième phénomène, si nous avons échappé au premier, il est plus directement

accessible, et peut être un peu plus compréhensible.

Ce qui blessera le plus l’amour, au-delà de la trahison, c’est le non-respect de quelques

règles d’hygiène relationnelle qui sont la sève avec laquelle un amour se vivifie, s’amplifie et se

construit.

Nous découvrons ainsi, que l’amour, tel un navire, est confié trop souvent à des mains

inexpérimentées, maladroites et quelquefois même trop brutales… Quelque fois aussi, qu’ il y a

trop de capitaines pour conduire le navire, pour affronter les risques des tempêtes inévitables

qui le maltraiteront, de mains fermes et tendres pour le guider harmonieusement dans le beau

temps ou l’accalmie, de présence dense pour l’embellira avec des partages dynamiques, des

aveuglements sincères qui le feront dans l’incertitude ou le conduiront à sa perte.

Ainsi, l’amour garde-t-il, cette part de mystère qui nous attire tellement, nous émerveille et

nous comble, ou parfois nous égare et nous perd. C'est par l'amour, que j'ai découvert ce que

j'appelle mon humanitude, cette vulnérabilité douce et bienveillante, ces émotions à fleurs de

coeur, qui parfois m'emportait vers cette part de moi, qui m'agrandissait jusqu'à l'infini.

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.P.E.R.E. - Amour-Sexualité 9/14

De l’intimité personnelle à l’intimité partagée

par Jacques Salomé

Beaucoup pensent que l’intimité doit rester réservée, protégée et enfouie dans un jardin

secret inaccessible aux autres et parfois même aux proches.

Cela est certainement vrai pour l’essentiel de l’intimité, pour cette partie de nous, qui

n’appartient qu’à nous, qui nous confronte à nos zones secrètes d’ombres et de lumière, à des

pensées, des fantasmes, des idées ou des projets qui traversent notre vie comme autant de

météorites parcourent un ciel d’été.

Mais il est bien une intimité, qui doit être partagée dans l’abandon et la confiance, c’est

l’intimité sexuelle. Si nous acceptons d’entendre et de reconnaître que la rencontre sexuelle est

le creuset où vont se mêler tous les langages de la communication avec soi même et avec l’autre.

L’autre ce « si proche », à qui nous allons faire suffisamment de confiance pour aller vers lui,

le laisser s’approcher au plus près de nos émotions, de nos sentiments, de notre ressenti et

surtout, surtout du pays infini de notre corps. L’intimité sexuelle ne se résume pas au fait de

faire l’amour, mais elle contient tous les possibles de la communication, au sens fort du terme

« mettre en commun ».

Mettre en commun une écoute du corps, du nôtre et de celui de l’autre, une attention

sensible à ses attentes, à ses émois, à ses peurs aussi. Car toute rencontre sexuelle s’inscrit

dans une histoire, celle de la découverte de notre sensualité aux premiers temps de notre vie, de

la découverte du plaisir, de la confiance et de l’abandon et celle aussi de nos premiers émois

sexuels avec la découverte de la différence des sexes, de nos premières tentatives pour accéder

au plaisir, de nos premières tentatives d’approche du corps de l’autre. La rencontre sexuelle,

même quand elle est protégée, en quelque sorte, par le mariage ou une vie de couple dans la

durée, est toujours l’équivalent d’un miracle. Je veux dire par là, qu’il y a tant d’obstacles, de

freins possibles, de malentendus pour freiner, empêcher, maltraiter le bon et le joyeux,

l’abandon et la confiance qui sont les fondements de l’abandon et de la confiance pour accéder

au plaisir.

Il ne suffit pas d’aimer, il ne suffit pas d’avoir du désir, aussi intense soit-t-il, pour faire

l’amour. D’ailleurs, je n’aime pas ce mot faire, je crois qu’on devrait dire : «vivre l’amour ». Je

crois, qu’il faut une qualité de la relation, qui permette une liberté d’être, qui donne envie

d’offrir le meilleur de soi vers le meilleur de l’autre.

Vivre l’amour, faire l’amour est une belle aventure, qui mobilise chez chacun outre les

possibles de son corps, tous les possibles de son imaginaire, toutes les ressources de son

présent. C’est en faisant l’amour, qu’on accède, peut-être, au divin qui est en chacun de nous.

À cette part d’intimité inouïe que nous avons envie d’offrir sans réserve à celui ou à celle que

nous sentons suffisamment proche pour l’accueillir dans le plein de nous-mêmes, au plus

proche de notre peau, au plus secret de notre intimité.

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.P.E.R.E. - Amour-Sexualité 10/14

La part sombre de l’amour

par Jacques Salomé.

L’amour en ces débuts scintille d’une lumière éblouissante et quand il se découvre en

réciprocité il transfigure, il magnifie ceux qui l’éprouvent et le partagent.

Mais partout où il y a de la lumière, il y a de l’ombre et l’amour n’échappe pas à cette règle,

non qu’il soit porteur de zones obscures en lui-même mais tout se passe comme si sa propre

vitalité allait révéler, mettre à jour des aspects de notre personnalité qui jusqu’alors se trouvaient

en jachères ou restaient endormies.

Ainsi la jalousie, le désir de possessivité, le besoin de contrôle, et même l’envie

d’appropriation qui vont se réveiller chez l’un des partenaires et commencer à polluer, à

tarauder la relation au point de risquer de la blesser à jamais et de mettre à distance ou de faire

fuir celui ou celle que pourtant on désire proche, tout proche.

« Au début, quand il me demandait qui j’avais rencontré, ce que j’avais fait dans la

journée, j’éprouvais du plaisir à partager avec lui mon vécu, je voyais cela comme une marque

d’intérêt et donc d’amour à mon égard. Et puis rapidement, je me suis rendu compte que son

visage se fermait, qu’il se crispait, qu’il me demandait des précisions qui me paraissaient

inutiles et infantilisantes. J’ai senti que je ne pouvais rien lui dire me concernant sans qu’il

veuille en avoir plus et me faire me sentir en faute. Comme si je n’aurais pas dû accepter telle ou

telle invitation, avoir tel ou tel échange, fait telle ou telle rencontre… La suspicion, puis l’enfer

s’installèrent dans notre amour et commencèrent à dévitaliser notre relation. Même si je ne

disais pas, c’était que j’avais quelque chose à cacher, donc que je ne lui faisais pas

confiance… »

Parfois ce seront des traits de caractère, des conduites totalement imprévisibles qui vont

émerger et s’imposer dans la relation, au point de la maltraiter, et de l’enfermer dans une

succession de conflits et de malentendus qui vont meurtrir et désespérer chacun des

protagonistes.

« Quelques semaines après nos premières relations sexuelles, après un temps

d’apprivoisement, mon ami devint incroyablement grossier. Il ne pouvait s’empêcher de

m’insulter, de crier des mots orduriers, de s’exciter tout seul, de me demander de me soumettre

à des pratiques que j’aurais bien acceptées si dans la façon qu’il avait de les exiger cela ne

m’avait donné l’impression qu’il salissait nos rapports sexuels. Petit à petit, je sentais mon

amour s’engloutir dans le désespoir ».

D’autre fois, il s’agit chez l’un des partenaires de la remontée d’une inquiétude, d’une

angoisse qui va se polariser sur un point de fixation tel que l’argent.

« Mon mari ne peut s’empêcher de me demander des comptes pour les achats que je fais. Il

vérifie les factures, les notes et je sens toujours une espèce de suspicion, non seulement à

l’égard des commerçants qui auraient pu tenter de me tromper, mais aussi à mon égard, sur le

bien fondé, la nécessité d’avoir fait tel ou tel achat. J’étais comme une enfant qui devait rendre

la monnaie en expliquant les détails du prix ! »

« Je le croyais généreux et ses amis auraient pu confirmer cela, car il donnait beaucoup,

mais avec moi, dès la naissance de notre enfant, il commença à se montrer pingre et même

avare. Le choix de ses cadeaux pour mon anniversaire obéissait à toute une stratégie très

complexe et certainement conflictuelle pour lui. J’ai retrouvé un jour différents devis de

bijoutier annotés de façon violente en face de certains prix. Le choix d’un menu au restaurant, la

catégorie des hôtels en vacances, ne correspondaient nullement à nos revenus et ce qui aurait pu

être notre train de vie. Il trouvait le moyen de retarder jusqu’au dernier moment pour ne choisir

que des hôtels minables, qui n’avaient même pas une étoile. Il essayait d’obtenir des rabais sur

tout. Je ne savais où me mettre ! »

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Il arrive aussi parfois, et c’est un des paradoxes de l’amour, qu’il serve de révélateur à des

traits de caractères marqués à la limite d’une pathologie en sommeil. Elle va progressivement se

réveiller et contaminer tout l’espace d’une relation. La proximité physique (et parfois

l’envahissement), la cohabitation et l’occupation déséquilibrée (par l’un) d’un même territoire,

une trop grande collusion entre intimité commune et partagée, et intimité personnelle et

réservée, le besoin de se sentir accepter inconditionnellement, peut faire remonter à la surface

des composantes qui vont se majorer (au cours des années) en présence de l’aimé ou de

l’aimée.

« Au bout de quelques années, il m’a fallu me rendre à l’évidence : je vivais avec un

pervers. Avec une intelligence retorse et une habileté jamais prise en défaut, il retournait toutes

les situations contre moi. Il me laissait croire que j’étais une incapable, le cauchemar de sa vie.

Il tirait un plaisir manifeste à me voir souffrir, me plongeait au fond du désespoir puis faisait

semblant de m’excuser ce qui me plongeait encore plus dans la détresse… »

« C’est lui, qui avait pourtant désiré cet enfant, mais sitôt qu’il est né, mon compagnon

commença à régresser. Il se comportait comme un petit enfant. Il devenait jaloux de l’attention,

des soins que je donnais à notre fils. Il me proposa même de le donner en adoption ! Je me suis

retrouvé avec deux bébés sur le bras et le plus petit des deux, n’était pas celui qu’on pensait ! »

Il y aussi tous les auto-saboteurs que nous sommes capables de produire pour maltraiter

une relation à laquelle nous tenons, pour déclencher ce que nous redoutons.

« Chaque fois, je ne pouvais m’empêcher de mettre en évidence tout ce qui ne s’était pas

passé entre nous, au lieu de reconnaître et de valoriser tout ce qui s’était passé ! »

« Je lui faisais reproches de ce que pourtant je lui avais demandé, l’accusant de m’avoir

séduite, alors que je savais parfaitement que c’était moi qui m’était arrangée, pour me faire

inviter ce jour-là, en sachant qu’il serait là ! »

Nous pouvons penser que l’amour nous confirme, nous consolide, qu’il nous fait grandir

de l’intérieur, et c’est souvent le cas. Mais, il peut aussi, nous vulnérabiliser, nous entraîner à

produire des conduites inadaptées, régressives ou outrancières et ainsi révéler des aspects de

nous totalement anachroniques, déstructurant ou violents.

Le piège, c’est que celui qui aime garde l’espoir, que son amour sera suffisant pour faire

changer l’autre, que toutes ces manifestations ne sont que provisoires, qu’elles vont s’arrêter et

que l’aimé redeviendra tel qu’on l’a connu ou cru le connaître dans les débuts de l’amour.

Quand la part d’ombre de l’amour l’emporte sur sa lumière, il convient parfois de : soit de

renoncer, soit de trouver la bonne distance, pour ne pas se laisser engloutir dans la grisaille ou

les ténèbres.

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.P.E.R.E. - Amour-Sexualité 12/14

Que veut dire l'amour pour un enfant ?

par Jacques Salomé

Au Québec des professionnels en relations humaines ont posé la question suivante à des

enfants de 4 à 8 ans. "Que veut dire l'amour ?"

Les réponses sont stupéfiantes, drôles, profondes, elles sonnent souvent justes et nous

pouvons, nous les adultes les entendre comme parlantes, interpellantes face à nos certitudes ou

à nos propres oublis.

« L'amour est la première chose qui arrive avant que la méchanceté arrive. »

Charles, 5 ans

« Quand ma grand-mère avait de l'arthrite et qu'elle ne pouvait plus mettre du vernis sur

ses ongles d'orteil, mon grand père le faisait pour elle, même après quand il avait lui aussi de

l'arthrite dans les mains, c'est ça l'amour. »

Rebecca, 8 ans

« Quand j'ai perdu ma mamie, j'ai été triste, j'avais envie de lui parler sans arrêt, j'ai

compris que je ne lui avais pas assez dit que je l'aimais. L'amour c'est quand on n'a pas peur

d'aimer trop. »

Jacques, 8 ans

« Quand quelqu'un nous aime, la manière de dire notre nom est différente, plus douce. On

sait que notre nom est en sécurité dans leur bouche. »

Alain, 4 ans

« L'amour c'est quand la fille se met du parfum et le garçon se met de la lotion à barbe et

qu'ils sortent ensemble pour mieux se sentir. »

Martin, 5 ans

« L'amour, c'est quand vous sortez manger, que vous donnez à quelqu'un beaucoup de

vos frites sans demander, que l'autre vous donne les siennes. »

Jean, 6 ans

« L'amour, c'est quand quelqu'un vous fait du mal, et que vous êtes très fâchée, mais

vous ne criez pas pour ne pas le faire pleurer. »

Suzanne, 5 ans

« L'amour c'est ce qui nous fait sourire, même quand on est très fatigué ».

Tim, 4 ans

« L'amour c'est quand maman fait du café pour papa et qu'elle le goûte avant de le donner

à papa, pour s'assurer que ça goûte bon. »

Dan, 7 ans

« L'amour c'est ce qui est à la maison à Noël quand on arrête d'ouvrir les cadeaux et qu'on

écoute tous ensemble le bonheur. »

Bob, 5ans

« Si vous voulez essayer d'aimer, il faut commencer par un ami que vous détestez. »

Mika, 6 ans

« L'amour, c'est quand un vieil homme et une vieille femme sont encore amis, même

quand ils se connaissent bien. »

Tom, 6 ans

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« L'amour, c'est quand mon chien me lèche le visage, même quand je l'ai laissé seul toute

la journée. »

Marie-Anne, 4ans

« On ne doit pas dire je t'aime si ce n'est pas vrai. Mais si c'est vrai, on doit le dire

beaucoup, parce que les gens oublient. »

Jessica, 8 ans

Et une dernière pour tenir la route dans les méandres de l'amour :

« Moi j'ai bien vu que je ne savais pas aimer, quand j'ai été jaloux qu'un garçon parle à

Marion et que je lui en voulais, parce qu'elle l'écoutait gentiment. »

Pierre, 7 ans

Bien sûr, comme adulte, chacun d’entre nous a une, ou beaucoup d’idées, sur ce que

devrait être l’amour, sur ce qu’il n’est pas. Pour la plupart, nous avons eu l’occasion de

confronter nos croyances en la matière avec la réalité de nos relations amoureuses, découvrir les

émerveillements (provisoires ou durables) les déceptions et les ajustements, les remises en

cause que cela suppose.

Et pour certains, envers et contre tout, maintenir vivantes certaines croyances en la toute

puissance de l’amour, pour garder l’espoir. Maintenir une espérance vivante pour pouvoir nous

projeter dans l’avenir même si le présent nous renvoie à la difficulté d’aimer et d’être aimé.

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17 février 2008

QUE DIRE A UN ENFANT QUI REVELE DES ACTES DE MALTRAITANCE OU D'AGRESSION SEXUELLE

QUE DIRE A UN ENFANT QUI VOUS REVELE DES ACTES DE MALTRAITANCE OU D'AGRESSION SEXUELLE

Une marque de confiance qui engage votre responsabilité morale, pénale, et surtout son avenir

 

 

 

------------ Reconnaître sa parole---------------------

 

Tachez de contrôler vos réactions émotionnelles et cette tendance "naturelle" à minimiser ou refuser de croire à l'impensable : rien ne vous permet de douter a priori de la véracité de ses propos.

 

Dans tous les cas, il faut s’attacher à écouter la parole de l’enfant et non pas celle des adultes, surtout dans le cadre des divorces et des conflits de droit de garde. Dans ce contexte miné, la parole de l’enfant est de plus en plus entachée de suspicion : certains affirment sans preuve et sans citer leurs sources, que les fausses allégations atteindraient 70 % des plaintes ! Or, d’une façon générale, la fréquence des agressions sexuelles commises sur les enfants dépasse, et de beaucoup, le chiffre des plaintes, car les violences sexuelles sont mal repérées et l’objet d’un déni paré d’arguments pseudo scientifiques toujours renouvelés : mythomanie, fantasme de séduction, fausses allégations, " faux souvenirs , personnalité multiple, soit-disant recrudescence des fausses révélations.

 

Ce difficile problème n’est pas de votre compétence mais de celles des professionnels.

 

Dites lui : "Je te crois".

 

 

 

------------------ Nommez le crime.--------------------------

 

Après avoir recueilli sa parole, il vous faut lui dire qu’il s’agit d’un crime :

 

Dites lui : " Il - elle n'avait pas le droit de te faire ça".

 

En nommant l’interdit vous rétablissez les choses, car l’agresseur a tout fait pour qu’il se taise en le menaçant, en achetant son silence, en brouillant les messages.

 

Dites lui : "Tu n’y est pour rien", tant les forces en présence sont disproportionnées.

 

L’enfant a pris des risques : si l’agresseur apprend qu’il a parlé, il risque gros.

 

Dites lui : "C'est courageux de parler".

 

 

 

----------------------- Offrez lui votre protection---------------------

 

 L'enfant souffre, protégez le.

 

Dites lui : "On va t'aider pour que ça s'arrête"

 

[u]En tant que citoyen, l’article 434-3 du Code pénal vous fait obligation à dénoncer les faits sous peine de poursuites pénales.[/u]

 

Vous pouvez demander conseil à votre médecin généraliste, au 119, au service social de l'Aide sociale à l'enfance (ASE) ou contactez une association spécialisée en consultant l’annuaire.

 

Il serait inadmissible de ne pas protéger un enfant en danger.

 

------------------------ Faites appel au reseau------------------------------

 

Vous n’êtes pas un professionnel de la protection de l’enfance.

 

Expliquez lui que vous ne pouvez pas l’aider sans faire appel à de multiples compétences, mais rassurez le, dites lui que vous resterez à ses côtés, qu’il n’est plus seul et prouvez le lui.

 

Faites appel aux proches qui sont prêts à le soutenir ; à défaut un avocat et un administrateur ad hoc pourront représenter ses intérêts.

 

Consultez l’annuaire, vous y trouverez les associations contre la maltraitance ou contre les violences scolaires ; la listes avocats qui figurent sur la liste de la protection de l’enfance ; la liste des pôles de référence régionaux d accueil et de prise en charge des victimes de violences sexuelles ; la liste des consultations de soins spécialisés en psychotraumatologie.

 

---------------- Le problème des allégations douteuses-----------------------

 

La recherche montre qu’il est RARE qu’un jeune enfant donne de fausses informations concernant une agression sexuelle, et moins encore s’il vous a personnellement choisi pour faire une première révélation. Cependant, il peut être conditionné à donner de fausses informations qui porteront plus volontiers sur des détails dits périphériques (le lieu, l'heure, le nombre de fois) que sur l’agression sexuelle elle-même.

 

Ultérieurement, les multiples commentaires des uns et des autres - proches, policiers, éducateurs, professionnels de la santé, experts, magistrats - contamineront inévitablement le discours de l’enfant. C’est pourquoi il est recommandé de faire enregistrer ses déclarations le plus vite possible, comme le dispose la loi du 17 juin 1998.[/b][/color]

 

[img]https://ssl.declicsmultimedia.com/~victimo/contenus/portfolio/revtar2.gif[/img]

 

 

http://www.victimo.fr/liste_.php?idarb=83&idarbfils=115&contenu=1

17 février 2008

PARENTS TOXIQUES Susan FORWARD Résumé du livre

 
 

PARENTS TOXIQUES,   COMMENT ECHAPPER A LEUR EMPRISE
 
 
de, Editions Stock
 
  Résumé du livre effectué par Arlette HAESSIG dans le cadre de la formation à   la relation d’aide à Paris en 2002.
 
  Ce livre est écrit par une psychothérapeute célèbre aux Etats-Unis. Il   comporte deux parties :
 
  1) Les parents toxiques
  2) Se libérer de ses parents toxiques et retrouver le contrôle de sa vie
 
  INTRODUCTION
 

  « Bien sûr, mon père avait l’habitude de me frapper, mais il ne le faisait   que pour me remettre dans le droit chemin. Je ne vois pas le rapport avec   l’échec de ma vie conjugale » dit Georges, un éminent chirurgien. L’histoire   de Georges n’est pas exceptionnelle. Beaucoup de gens ont de la peine à voir   que leurs relations avec les parents ont un impact majeur sur leur vie.
 
  Nos parents plantent en nous des graines mentales et émotionnelles qui se   développent en même temps que nous. Dans certaines familles ce sont des   graines d’amour de respect et d’indépendance. Mais, dans d’autres, ces   graines sont la peur, l’assujettissement ou la culpabilité.
 
  Tous les parents ont des déficiences occasionnelles, ce ne sont que des   humains. La plupart des enfants s’en accommodent s’ils reçoivent leur content   d’amour et de compréhension.
 
  Les parents toxiques, eux, infligent à longueur de temps, traumatismes, abus,   critiques à leurs enfants et la plupart du temps ils continuent à se   comporter ainsi même si les enfants sont devenus adultes. Les enfants de   parents toxiques se sentent consciemment ou inconsciemment coupables des abus   de leurs parents. Cela entraîne à   l’âge adulte manque de confiance en soi et mauvaise estime de soi. L’auteur propose un processus pour   réduire progressivement les pouvoirs négatifs de ce genre de parents et ainsi   libérer le « moi » enfoui, la personne unique et chaleureuse qu’elle était   destinée à devenir.
 
  Première partie : LES PARENTS TOXIQUES
 

  I. LES   PARENTS-DIEUX
 

  Les parents toxiques sont comparables aux dieux du Panthéon grec. Ils   surveillent, jugent punissent, ils sont totalement irrationnels, fantaisistes   et imprévisibles.
 
  Très jeunes enfants, nos parents sont pour nous comme des dieux sans lesquels   nous ne pourrions survivre, ils nous donnent amour, protection, abri et   nourriture. N’ayant rien ni personne à qui les comparer nous supposons qu’ils   sont des parents parfaits ainsi nous nous sentons en sécurité. A partir de   2/3 ans nous commençons à nous battre pour nous constituer une identité   propre pour affirmer notre volonté personnelle. Ce processus de séparation a   son point culminant pendant l’adolescence. Les familles normales essaient de   tolérer, d’encourager l’indépendance naissante.
 
  Les parents toxiques considèrent la révolte où les différences   individuelles comme une attaque personnelle. Ils se défendent en renforçant l’incapacité et la dépendance   de l’enfant. Au lieu d’encourager un développement sain, ils le sapent,   souvent persuadés que c’est pour le bien de l’enfant. Il en résulte des vrais   ravages sur l’amour propre de l’enfant :
 
  - il devient ainsi de plus en plus dépendant.
  - Il a un besoin grandissant de croire que ses parents sont là pour lui   donner sécurité et le nécessaire
  - Il accepte d’être responsable de la conduite de ses parents pour donner   un sens à leurs attaques physiques et émotionnelles.
 
  L’enfant pense soit qu’il est mauvais   et que ses parents sont bons, soit qu’il est faible et ses parents sont forts.
 
  Ces croyances restent ancrées :pour reprendre sa vie en main il faut affronter la vérité, ses parents   « divins » l’ont trahi au moment où il était le plus vulnérable.
 
  Pour se protéger de cette terrible vérité l’enfant préfère établir des mécanismes de défense :
 
  - la dénégation, en déguisant pour minimiser et même nier l’impact de   certaines réalités pénibles. Le déni peut aller jusqu’à oublier ce que les   parents ont fait.
  - Le recours à la rationalisation, en utilisant de « bonnes raisons »   pour expliquer et éliminer les faits douloureux. Elles servent à rendre   acceptable l’inacceptable.
  - Le déplacement des ressentiments, pour ne pas renoncer au mythe des parents   parfaits et déifiés, les enfants transfèrent leur colère sur une autre   personne.
 
  La mort n’enlève rien au pouvoir des   parents au contraire, bien souvent la déification est amplifiée. Au lieu   de se libérer d’eux, les survivants restent prisonniers de leurs émotions.
 
  Il est important de remettre sur terre   les parents toxiques pour pouvoir porter sur eux un regard réaliste et ainsi   rééquilibrer les relations.
 

  II. LES   DIFFERENTS TYPES DE PARENTS TOXIQUES
 
  1) les   parents déficients
 

  Les parents ont des devoirs vis à vis de leurs enfants : pourvoir à leurs   besoins matériels, protéger les enfants de tout dommage physique et   émotionnel, répondre aux besoins de leurs enfants en matière d’amour et   d’attention, fournir à l’enfant des directives d’ordre moral.
 
  Les parents déficients sont souvent dans l’incapacité à répondre aux   besoins de leurs enfants et dans   de nombreux cas ils comptent sur leurs enfants pour prendre soin de leurs   besoins à eux et ils l’exigent   même.
 
  Dans ce cas les rôles familiaux deviennent flous, déformés ou inversés.   L’enfant n’a plus de modèle pour apprendre et progresser, il part à la dérive   dans un océan hostile de confusion.
 
  L’enfant est privé de son enfance et cela peut prendre différentes formes :
 
  - l’enfant doit se changer en adulte pour remplir les tâches d’un parent déficient (ex : ménage, s’occuper des frères et soeurs, de la mère   dépressive). Souvent il échoue dans ce   rôle d’enfant-parent, il en retire   des sentiments de culpabilité et de ne pas être à la hauteur. Adulte, il   entre dans un cercle vicieux : accepter des responsabilités pour tout,   échouer irrémédiablement, se sentir coupable et incapable et réagir   en redoublant d’efforts La personne est asservie, elle cherche sa valeur   personnelle dans le travail et ne met   pas de limites.
 
  - L’enfant porte secours à un parent   déficient (obsédé, drogué, brutal ou excessivement dépendant) en devenant   responsable de ce parent. L’enfant   devient codépendant et par la même occasion une victime. Ce comportement   le suivra toute sa vie, il cherchera quelqu’un à sauver. La personne aura   beaucoup de difficultés à définir sa propre identité et à fixer des   limites.
 
  Labsence physique d’un parent   (suite à un divorce par exemple) provoque un sentiment   particulièrement douloureux de vide et de manque chez l’enfant. Ce   dernier rationalise souvent en prenant sur lui la responsabilité de   l’événement. Il se déteste, il n’a pas de sens ni de but dans sa vie, le   sentiment d’invisibilité causera beaucoup de dommages dans sa vie.
 
  Ces parents toxiques, déficients, suscitent souvent de la pitié et leurs enfants ressentent des sentiments   protecteurs à leur égard.
 

  Pour ces personnes il est important de voir qu’on les a forcées à grandir   trop vite et qu’on leur a volé leur enfance.
 
  2) Les   parents dominateurs
 

  L’autorité est bonne si elle est adaptée au stade de l’enfant tant qu’il est   petit, il a besoin d’être gardé et protégé.
 
  L’autorité devient abusive, si elle retient l’enfant et l’empêche de faire   ses propres expériences. L’enfant   devient alors craintif et anxieux, il aura toujours besoin du conseil des   parents qui l’envahissent, le manipulent et le   dominent. Il a un grand sentiment d’impuissance. La crainte de ne plus être nécessaire est   souvent le moteur de ces parents dominateurs et ils se justifient avec   «c’est pour ton bien ». Ces parents ont une profonde insatisfaction et une   peur d’être abandonnés. L’indépendance de l’enfant est une menace pour   eux.
 
  L’autorité peut être manifeste, c’est alors un contrôle direct qui   s’accompagne souvent d’intimidation et d’humiliation. Les sentiments et   les besoins de l’enfant doivent se subordonner à ceux des parents, leur   opinion n’a aucune valeur, leurs besoins et désirs ne sont pas importants.   S’il accède à l’indépendance, les parents sont au désespoir.
 
  Ces derniers utilisent alors des tactiques comme le retrait de l’affection   ou la prédiction de catastrophes pour faire revenir l’enfant. Celui ci se   sent alors coupable, en colère, frustré et avec le sentiment profond d’avoir trahi ses parents.
 
  L’argent est également un moyen utilisé pour tenir les enfants dans un   état de dépendance.
  Certains parents dominateurs contrôlent leurs enfants en les traitant comme   s’ils étaient faibles et incapables, alors que cela ne correspond pas à la   réalité. L’enfant puis l’adulte doit continuellement faire ses preuves et   il n’y a jamais approbation des parents.
 
  Les parents manipulateurs.
 

  Si la manipulation est un instrument de contrôle délibéré, elle devient   destructrice. Les parents cachent leurs motivations, l’enfant est dans   la confusion.
 
  Les parents jouent au « bon samaritain » en provoquant des situations   ou l’enfant a besoin d’eux. L’enfant   n’est plus libre et le sentiment de compétence est étouffé. S’il essaie   d’exprimer sa frustration, il se sent   coupable devant la « bonté » du parent et ce dernier prend des attitudes de   «martyr».
 

  Il y a souvent dépression chez   l’adulte qui avait de tels parents.
 
  La rivalité fraternelle est également utilisée en comparant les enfants,   les uns aux autres. L’enfant est alors poussé à faire ce que les parents   désirent pour regagner leur faveur.
 
  Il y a 2 façons de réagir, mais dans les deux cas on est contrôlé par les   parents:
 
  - La capitulation.
 
  - La révolte. En se révoltant l’enfant essaie de se libérer de la fusion   et du contrôle étouffant. C’est une révolte autodestructrice car en   réaction à un parent et non une manifestation active de libre choix.
 
  La révolte et l’autodestruction peuvent subsister longtemps après la mort   des parents qui exercent une sorte de contrôle outre-tombe. Les croyances   et la culpabilité transmises par les parents morts continuent à diriger les   personnes restantes.
 
  3) Les   parents alcooliques
 

  L’alcoolisme est un secret de famille, on dénie la réalité, on ment, on   excuse, on dissimule. Cela entraîne le chaos émotionnel chez l’enfant, il   ressent beaucoup de honte. Le   secret devient un ciment qui unit pour maintenir la cohésion de la famille.   On joue à la « famille normale »,   l’enfant n’arrive plus alors à développer un sentiment de confiance en lui,   s’il doit constamment mentir sur ce qu’il pense en lui. Il se sent   coupable, il a peur de révéler le secret et pour ne pas trahir la   famille, il devient solitaire. Il développe   une loyauté perverse envers les personnes qui partagent son secret.
 

  Les enfants de parent alcoolique deviennent extrêmement tolérants pour accepter l’inacceptable.
 
  Il arrive souvent qu’ils se marient eux aussi à des alcooliques ou à des   personnes violentes. Pourquoi cette répétition du passé ? Ils ont l’espoir de   pouvoir sauver leur conjoint.
 
  La recherche des mêmes schémas émotionnels familiers est une pulsion commune   à tout le monde, même si les sentiments qu’ils entretiennent sont douloureux   ou destructeurs. Ce qui est familier procure une impression de réconfort et   une structure pour notre vie. Nous connaissons les règles et nous savons à   quoi nous attendre. Plus important, nous   reconstituons les conflits du passé parce que cette fois, nous espérons leur   trouver une bonne solution : « je vais gagner la bataille, cette fois, je   vais y arriver. » Cette reconstitution de vieilles expériences douloureuse   est appelée « répétition   obsessionnelle ».
 
  Dans ces familles d’alcooliques les enfants jouent un rôle qui leur est   attribué:
 
  - L’enfant prend le rôle du parent,   car l’alcoolique « l’enfant terrible » de la famille ne laisse de place à   aucun autre enfant dans la famille. L’enfant est alors ignoré, il n’a pas   le soutien émotionnel dont il aurait besoin. Il se sent invisible,   responsable des sentiments des autres et ne veut causer de chagrin à   quiconque. Il se sent coupable car incapable d’arranger la vie des   parents.
 

  - L’enfant copain :pour ne   pas être battu, il boit avec le parent alcoolique. La boisson devient un   lien, un secret. L’enfant ressent ça comme de la camaraderie, de l’amour,   de l’acceptation. Dans leur avenir, ils deviennent eux mêmes souvent   alcooliques en se conformant aux comportements de leurs parents, en les   imitant et en s’identifiant à eux.
 
  - L’enfant méfiant, l’enfant   culpabilisé : les enfants de parents alcooliques ont peur de   l’intimité, ils ont appris que les gens qu’ils aiment sont imprévisibles   et qu’ils leur feront mal. Ils sont donc méfiants et persuadés que s’ils   laissent quiconque l’approcher de près, on leur fera du mal avant de les   laisser tomber. Les parents alcooliques sont totalement imprévisibles, bien   un jour, mal le lendemain. Les règles changent sans cesse, l’enfant n’est   jamais à la hauteur. Il est systématiquement critiqué, il devient un   bouc émissaire et même responsable de l’éthylisme. L’enfant se sent   coupable, il se livre à des comportements autodestructeurs (délinquance)   ou se punit soi-même en manifestant des symptômes émotionnels et physiques.
 
  - L’enfant en or : certains   doivent être le héros de la famille. Il est poussé par les compliments. Il   s’épuise alors sans pitié pour lui même vers une perfection impossible à   atteindre. Son estime personnelle devient tributaire des félicitations,   des récompenses et de ses performances scolaires, au lieu d’être fondé sur   une confiance intérieure. Ils ont souvent le besoin de diriger tout et   tout le monde, parfois par la manipulation qui éloignent d’eux ceux   qu’ils aiment.
 
  - L’enfant accusé : le conjoint   sobre de l’éthylique est souvent codépendant ou permissif. Il s’établit   dans les familles alcooliques un équilibre précaire. Tout essai soit par   l’alcoolique ou un autre membre de la famille de s’en sortir déséquilibre   l’ensemble. Il arrive que le codépendant n’ait pas envie que cela change,   car il retire souvent de cette situation des bénéfices comme admiration,   pouvoir sur la famille.
 
  Il s’en suit que celui qui a envie de sortir de ce cercle vicieux est   accusé.
 
  Les enfants de parents alcooliques espèrent   souvent que la vie de famille va changer. Il faut abandonner cette idée, leur bien être ne doit pas dépendre de   leurs parents. Eux les enfants peuvent changer, il est profitable pour   eux de se joindre à des organisations telles « Adultes-enfants d’alcooliques   » pour accélérer leur travail sur eux mêmes.
 
  4)Les violences verbales, lorsque les   marques sont intériorisées
 

  L’abus verbal consiste à lancer des attaques répétitives contre l’aspect   physique de l’enfant contre ses capacités intellectuelles, sa compétence ou   sa valeur en tant qu’être humain.
 
  Ces abus peuvent être :
 
  - directs : en accusant l’enfant d’être stupide, bon à rien ou laid.
 
  - moins directs : railleries, sarcasmes, surnoms insultants, remarques   dévalorisantes souvent sous le masque de l’humour.
 
  L’enfant n’est pas capable de faire la différence entre vérité et   plaisanterie, entre menace et taquinerie. Il croit ce que les parents   disent de lui et ça le marque surtout si ces actes abusifs sont fréquents   et cruels. Ces enfants puis adultes, traversent la vie, les nerfs à vifs,   s’attendant à être blessés et humiliés. Ils se protègent par la timidité, la   méfiance.
 
  Leurs parents ne tiennent pas compte des sentiments de l’enfant ni des effets   à long terme de ces paroles sur l’image de soi qui est en train de se   développer chez l’enfant. Ils déclarent souvent que ces violences verbales   sont pour l’éducation de l’enfant donc pour son « bien ». En fait ces parents combattent ainsi leurs   propres sentiments d’incapacité, ils marquent avec ces attaques, leur   supériorité et réussissent ainsi à nier leurs propres sentiments d’incapacité.
 
  Le parent rival entre en compétition avec son enfant souvent au moment   de l’adolescence car il se sent menacé. Une mère voit dans sa fille une   rivale qu’elle dénigre. Un père ressent une menace peser sur sa virilité et   son autorité alors il humilie et ridiculise son fils. Inconsciemment ces   parents veulent faire de sorte que leurs enfants ne puissent pas les   surpasser. Les enfants reçoivent beaucoup de messages inconscients. Ils   ne s’autorisent souvent plus la réussite, il arrive qu’ils sabotent celle ci   et qu’ils se mettent comme limites de ne pas surpasser les parents.
 
  La trace indélébile des insultes : les insultes cruelles, les sermons,   les accusations et les noms avilissants infligent de grands dégâts à l’estime   de soi d’un enfant et y laissent de profondes cicatrices psychologiques. Ces   abus portent préjudice à la confiance en eux mêmes, en leur propre valeur.
 
  Les parents perfectionnistes imposent à leurs enfants des buts, des   ambitions impossibles à atteindre, des règles toujours changeantes. Ils   attendent de leurs enfants de réagir avec un degré de maturité difficile à   atteindre car ils n’ont pas l’expérience nécessaire. Si l’enfant échoue, il   devient un bouc émissaire pour endosser les problèmes familiaux. Ils le tyrannisent avec des exigences de   perfection et se servent des violences verbales dévalorisantes pour se sentir   eux - mêmes forts et pleins d’autorité. Les enfants de tels parents   choisissent en général entre deux voies :
 
  - ils s’épuisent sans relâche à gagner l’affection ou l’approbation des   parents.
 
  - Ils se révoltent et choisissent l’échec pour avoir l’impression de ne   pas capituler devant les exigences des parents.
 
  Les mots meurtriers tels que « je voudrais que tu sois mort »   infligent une souffrance et la confusion chez l’enfant. Il emmagasine ces   messages et il présente souvent des tendances suicidaires à l’âge adulte comme   pour réaliser cette «prophétie ». L’enfant croit ce que disent son père,   sa mère de lui. Il intériorise, c’est à dire intègre dans son inconscient. Il   pense alors vraiment qu’il est mauvais, bon à rien : il doute qu’il soit   capable, estimable, digne d’amour.
 
  5) Les   sévices corporels
 

  Définition des abus corporel : c’est tout comportement qui inflige une   grande douleur physique à un enfant qu’il laisse ou non des traces   apparentes. Si les sévices corporels dépassent une certaine limite c’est un   crime contre l’enfant.
 
  Il y a actuellement prise de conscience publique face à ce problème, le   système juridique est amené à fixer des limites aux châtiments corporels ce   qui n’était pas le cas autrefois.
 
  Ce type de parents abusifs présentent un grand manque de contrôle dans   leurs impulsions. Quand ils éprouvent de forts sentiments négatifs, ils   frappent leurs enfants pour se défouler. C’est une réaction   automatique, impulsion et action (coups)sont une seule chose sous l’effet du   stress. Ces parents violents viennent souvent de famille où ces abus   étaient courants et ils arrivent à l’âge adulte avec sur le plan   émotionnel des déficience et des carences. L’enfant est pour eux un substitut parental qui devrait combler leurs   besoins émotionnels. Ils deviennent enragés quand l’enfant n’arrive pas à   satisfaire leurs attentes et alors ils les frappent.
 
  L’abus d’alcool, de drogue détruit aussi le contrôle des impulsions.
 
  Un climat de terreur s’installe, les enfants ont peur même pendant les   moments calmes car ces abus sont imprévisibles. Ces expériences de violence   génèrent une forte crainte durable,   d’être blessé et trahi, cette crainte les poursuit toute leur vie. Ils ne   font plus confiance, s’attendent au pire de la part des autres, enferment   leurs émotions dans une armure et ne laissent personne devenir proche.
 

  La justification
 
  Certains enfants ne sauront jamais ce qui a déchaîné ces actes.
 
  D’autres parents se justifient, essaient d’expliquer :
 
  - en rejetant la faute sur une tierce personne. La véritable cause de la   violence ne disparaît pas, la colère donc la violence pourra à nouveau se   déclencher.
 
  - En affirmant que « c’est pour le bien de l’enfant » pour son éducation afin   qu’il ne tourne pas mal, qu’il devienne plus endurant, plus brave et plus   fort.
 
  - La Bible est souvent utilisée dans ce contexte pour justifier l’utilisation   de la violence.
 
  Les recherches montrent que les coups n’ont qu’un effet dissuasif   temporaire, mais qu’ils créent chez l’enfant des forts sentiments de rage, de   rêves de vengeance et de haine de soi.
 
  La violence passive
 

  Un parent qui reste là en laissant ses enfants se faire brutaliser sans   intervenir est coupable d’abus passifs. Il n’intervient pas par peur, par   dépendance ou par besoin de maintenir le statu-quo de la famille. Ces parents   passifs deviennent eux mêmes des enfants effrayés, faibles, passifs face à   la violence du conjoint, alors ils abandonnent leur enfant en se protégeant.   Il arrive que leurs enfants battus les   excusent et les protègent parce qu’ils voient en eux également une victime.
 
  L’apprentissage de la culpabilité
 

  Les enfants acceptent d’être tenus pour coupables des crimes perpétrés à   leur égard. Ils croient les deux mensonges que les parents leur font croire :
 

  « Tu es méchant, tu es battu à cause de cela ». Ces mensonges ne sont pas   remis en question par l’enfant même à l’âge adulte parce qu’ils viennent des   parents qui savent tout et disent vrai. L’enfant se prend à se dégoûter de   soi même.
 
  Mauvais traitements et amour
 

  Il y a parfois association de mauvais traitements et moments de tendresse.   Ces messages de natures différentes augmentent la confusion chez l’enfant.
 
  L’enfant gardien du secret familial.
 

  L’enfant ne veut pas trahir le secret   familial, il est effrayé, il a peur des conséquences. La relation   avec les parents devient une comédie, on essaie de donner à l’extérieur   l’image d’une famille normale.
 
  La maltraitance : un carrefour émotionnel
 

  Les enfants maltraités ont en eux un chaudron de rage qui bouillonne.   Quand ils sont adultes, cette colère refoulée peut s’exprimer de plusieurs   manières :comportements violents (jusqu’au crime), somatisation   (mal de tête), dépression.
 
  Ils ne deviennent pas forcement des parents violents, au contraire ils   peuvent avoir beaucoup de difficultés pour appliquer une discipline à leurs   enfants.
 

  6) Violences   et abus sexuels
 

  L’inceste est sans doute l’expérience humaine la plus cruelle, la plus   perverse.
 
  Définition de l’inceste :
 

  - du point de vue légal c’est le rapport sexuel entre parents de même sang.
 
  - Du point de vue psychologique, l’inceste inclut les contacts physiques avec   la bouche, les seins, les parties génitales, l’anus ou autre partie du corps   de l’enfant dans   le but de provoquer l’excitation sexuelle de l’agresseur. Celui ci   n’est pas obligatoirement un parent de sang, il peut être un parent par   alliance ou remariage.
 
  Il y a d’autres types de comportements   incestueux ou il n’y a pas contact avec le corps de l’enfant comme :   l’exhibitionnisme, la masturbation en présence de l’enfant, faire poser   l’enfant pour des photos pornographiques, épier l’enfant quand il est nu,   faire des remarques corruptrices et sexuellement explicites à l’enfant.
 
  Tous ces   comportements exigent le secret.
  Ces actes incestueux avec ou sans contacts sont destructeurs sur le plan   émotionnel pour l’enfant.
 
  Depuis quelques années il y a prise de conscience devant ces abus. Il reste   beaucoup d’idées reçues à évacuer, par exemple que l’inceste serait un   phénomène rare qui arriverait dans des familles pauvres et que les agresseurs   seraient des inadaptés sociaux.
 
  Une « si gentille famille »
 

  La plupart des familles incestueuses donnent une image tout à fait normale   au reste du monde, elles gardent cette apparence pendant de nombreuses   années, parfois pour toujours. Les parents peuvent même exercer des   responsabilités au plus haut niveau sur le plan associatif ou religieux, présenter   les plus hautes garanties morales.
 
  Pourtant à l’intérieur de la famille il n’y a pas de relations franches,   aimantes et pas de communication. Chaque   membre de la famille souffre d’une grande solitude affective, il y a   dissimulation, insatisfaction, stress et manque de respect.
 
  Le parent agresseur cherche à l’intérieur de la famille, dans la personne de   l’enfant la compensation pour le manque dont il souffre, c’est lui le   responsable.
  L’enfant cède soit parce qu’il y a coercition (contrainte) psychologique   ou parce qu’il y a menaces de sévices corporels, d’humiliation ou   d’abandon.
 
  Pourquoi les enfants ne dénoncent pas.
 

  Les agresseurs utilisent souvent la menace pour faire taire la victime   : « je te tuerai...je te battrai... personne ne te croira... j’irai en   prison... ça rendra maman malade... »
 
  D’autres agresseurs ont recours à la violence physique, la majorité   des enfants abusés sont maltraités sur le plan émotionnel et physique.
 
  L’enfant garde le silence non parce qu’il a peur de la violence, mais il craint de   désunir la famille en causant des ennuis à l’un des parents, la loyauté est   très puissante.
 

  L’enfant agressé perçoit l’interdit et la honte dans le comportement de   l’agresseur. Ils savent qu’ils sont violés, ils se sentent salis. Ils   intériorisent la faute et ils sont persuadés que c’est entièrement leur   faute. Cette pensée nourrit de forts sentiments de dégoût de soi et de honte.
  L’enfant refuse de considérer que le   parent est mauvais.
 
   Ils pensent que personne ne va croire leur   horrible secret, ils se sentent seuls à l’intérieur et à l’extérieur de   la famille. Cette solitude les ramène vers l’agresseur le seul à leur   accorder de l’attention.
  Certaines filles victimes de leur père se sentent coupables d’avoir trahi   leur mère et cela augmente encore leur culpabilité.
 
  La jalousie parentale.
 

  L’inceste lie la victime à l’agresseur d’une façon intense et folle. En   particulier dans le cas père/ fille, le père devient souvent obsédé par sa   fille et fou de jalousie vis à vis des garçons avec qui elle sort. Il vit   cela comme une trahison, un rejet, une infidélité et un abandon. Il arrive de   la battre de la menacer verbalement pour lui mettre dans la tête qu’elle   n’appartient qu’à un homme, à papa. Ces messages sont aussi destructeurs   que l’inceste lui même car à l’âge adulte ils l’empêchent de vivre   normalement l’attachement à une autre personne. Ces victimes d’inceste prennent   souvent l’obsession pour de l’amour, elles ont de la peine à se convaincre   qu’elles sont victimes.
 
  Recouvrir le volcan.
 
  Beaucoup de victimes se fabriquent un écran psychologique qui repousse ces   souvenirs au delà du champ de la conscience. Ils peuvent resurgir brutalement   à cause de certains événements (naissance, mariage, mort) ou lors d’une   thérapie. L’inconscient protège ces victimes de ces souvenirs, et il les   laisse resurgir quand la personne est prête à les affronter.
 
  Le partenaire silencieux.
 

  Beaucoup de filles victimes éprouvent   plus de colère envers la mère qu’envers leur père, l’agresseur. Elles se   posent la question « que savait-elle ? ». Il y a :
 
  - celles qui ne savent rien.
 
  - Le partenaire silencieux qui choisit d’ignorer les indices de l’inceste en espérant se protéger et protéger la   famille.
 

  - la mère qui apprend que les enfants sont violés et ne fait rien :   c’est la plus coupable.
 
  Souvent ces partenaires silencieux ont été eux mêmes maltraités au cours de   leur enfance. Ils souffrent d’une faible estime de soi et l’inceste leur fait   revivre les affres de leur enfance.
 
  L’héritage de l’inceste.
 

  Les adultes violentés pendant leur   enfance ont hérité trois sentiments :
 
  Celui d’être   Dégoûtant, Détruit, Différent ( les trois D). Les sentiments de   dégoût de soi entraînent parfois les personnes dans des relations   avilissantes avec exploitation et trahison ; Ils revivent ainsi le scénario   familial.
 
  La plupart ont des difficultés dans les relations amoureuses, soit l’amour   physique les répugne ou alors ils sont hyperactifs sexuellement ce qui augmente   encore leur dégoût d’eux mêmes.
 
  Certains retournent contre eux mêmes la douleur et la rage, ils souffrent   alors de dépression, de migraines ou prennent du poids.
 

  D’autres cherchent la punition, ils se prostituent sabotent leur travail,   deviennent des délinquants.
 
  Paradoxalement les victimes d’inceste   restent souvent attachées à leurs parents, elles ne veulent renoncer au mythe de la   famille heureuse, et rechercheront toujours l’amour et l’approbation des   parents.
 

  III. LE   « SYSTEME » FAMILIAL
 

  La famille est un « système de personnes liées par des rapports actifs ;   chaque membre a une influence profonde sur l’autre parfois inconsciemment.   C’est un réseau complexe d’amour de jalousie, de joie, de culpabilité et   autres émotions.
 
  Le système familial représente toute la réalité de l’enfant et il prend les   décisions en fonction de ce qu’il a appris dans sa famille. Ce système est le   résultat d’accumulation de sentiments de règles et de croyances transmises de   génération en génération par nos ancêtres.
 
  Les croyances familiales sont des attitudes, des perceptions et des   concepts profondément enracinés, à propos des gens, des relations et de la   morale. Elles déterminent le comportement des parents avec les enfants et   la conduite à attendre de la part des enfants. Si les parents sont toxiques ces croyances   sont presque toujours égocentriques, elles font du tort à   l’enfant. Par exemple « les enfants doivent du respect aux parents en toutes   circonstances ».
 
  Les parents toxiques s’opposent à toute réalité extérieure remettant en   question leurs opinions. L’enfant manque de subtilité pour distinguer la   vraie réalité de la réalité déformée. Ces croyances peuvent être sous forme   de conseils : « tu devrais », « il faudrait » ou alors elles sont   inexprimées, mais perceptible d’après le comportement et transmises   inconsciemment.
 
  Les règles sont les manifestations des croyances. Elles entraînent   une contrainte.
 
  Quand les règles sont exprimées clairement « Fais et ne fais pas », elles ont   l’avantage de pouvoir être remises en question. Ce qui n’est pas le cas pour les règles inexprimées « ne m’abandonne   pas », « n’arrête pas d’avoir besoin de moi »,il est plus difficile de les   identifier.
 
  Les enfants suivent ces règles   familiales par loyauté pour ne pas trahir la famille. Ce besoin   inconscient d’obéir éclipse leurs   besoins et désirs conscients. Pour être capable d’exercer le libre   arbitre, il faut faire la lumière dans l’inconscient, démasquer et rejeter   ces règles destructrices.
 
  Les limites
.
 

  Les familles malsaines découragent l’expression individuelle. Il y a   fusion, on gomme les limites personnelles, on soude ensemble les membres   de la famille. Les sentiments, les comportements, les décisions n’appartiennent   plus à la personne, elle est un   appendice de la famille. Dans ces familles l’identité et l’illusion   d’être en sécurité dépendent en grande partie de cette sensation de fusion.   Elle crée une dépendance presque totale d’une approbation extérieure. On a très peur d’être rejeté.
 

  L’équilibre familial.
 
  Chaque famille crée son propre équilibre pour atteindre une certaine   stabilité. Dans une famille toxique garder l’équilibre est un véritable   exploit, le chaos étant leur façon de vivre. Souvent il arrive qu’ils   augmentent le chaos pour ramener la famille à son équilibre connu,   sécurisant, mais malsain. Ils essayent de maintenir cet équilibre par :
 
  - la dénégation, elle minimise,   réduit, ridiculise ou débaptise le comportement destructeur (quelqu’un   qui bat son enfant est un éducateur strict )
 
  - la projection. Pour éviter la   responsabilité de leur propre comportement, les parents ont besoin d’un   bouc émissaire, ils choisissent l’enfant.
 
  - Le sabotage de l’effort du parent perturbé pour s’en sortir afin de le ramener   dans l’équilibre malsain.
 
  - Le secret, c’est un lien qui   rassemble la famille surtout quand l’équilibre est menacé.
 
  Deuxième partie : SE LIBERER DE SES PARENTS   TOXIQUES ET RETROUVER LE CONTROLE DE SA VIE
 
 
L’auteur propose une stratégie en plusieurs étapes pour reprendre sa   vie en main, celle ci a aidé innombrables de ses patients. Certains peuvent   faire ce travail seuls, d’autres ont besoin de l’aide d’un professionnel.
 
  1) Le   « pardon » en question
 
  Le pardon n’est pas la première étape   vers la guérison. En fait il n’est pas nécessaire de pardonner à ses   parents pour se sentir mieux dans sa peau et changer de vie. D’ailleurs,   beaucoup de patients qui avaient pardonnés à leurs parents toxiques   n’allaient pas mieux.
 
  Il y a deux aspects dans le pardon :
 
  - le fait de renoncer à son besoin de   vengeance
 
  - le fait d’absoudre de toute   responsabilité le coupable
 
  La vengeance est une motivation   normale, mais négative car elle s’attaque à notre bien être émotionnel et   mobilise beaucoup d’énergie. Laisser tomber la vengeance est difficile, mais   une étape saine.
 

  Absoudre   quelqu’un inconditionnellement des actes dont il s’est rendu coupable est   injuste. Cet aspect du pardon empêche beaucoup de gens à s’en   sortir car il diminue la capacité à laisser aller les émotions refoulées   comme la colère, la tristesse. Les   personnes ont besoin de se mettre en colère à propos de ce qui leur est   arrivé. Elles ont besoin de pleurer sur le fait qu’elles n’ont jamais reçu   l’amour qu’elles cherchaient auprès de leurs parents.
 
  L’auteur pense que le pardon n’est justifié que quand les parents font   quelque chose pour le mériter. Les parents toxiques doivent   reconnaître ce qui est arrivé, en prendre la responsabilité et montrer leur   désir et leur volonté de changer. Pardonner unilatéralement à des parents   qui ne reconnaissent pas leurs torts risque de compromettre gravement le   travail émotionnel qui doit être accompli. La paix de l’esprit et des   émotions arrive quand on se soustrait au contrôle de ses parents toxiques,   sans nécessairement avoir à leur pardonner.
 
  2) Devenir adulte : la fusion parents   toxiques- enfants victimes
 
  Les enfants de parents toxiques ont un tel besoin d’approbation que cela   les empêche de vivre comme ils le veulent, la fusion dépasse les justes limites. Il y a deux sortes de fusion :
 
  - la première consiste à céder continuellement aux parents pour les calmer
 
  - la seconde consiste à faire juste le contraire. C’est aussi une emprise   car les parents gardent un énorme contrôle sur le bien être émotionnel et le   comportement de leur enfant.
 
  Les convictions familiales fusionnelles.
 
  Avant d’entreprendre un cheminement vers un changement de vie, il est   essentiel de prendre conscience des connexions qui peuvent exister entre des   croyances erronées, des sentiments négatifs et des comportements   autodestructeurs.
 
  Il faut identifier ces convictions qui influencent les sentiments et les   comportements par exemple : « c’est à moi de rendre mes parents heureux   ou fiers ... je suis tout pour mes parents » «quoi qu’ils aient pu me faire,   je dois toujours les honorer ». Ces opinions sont autodestructrices elles   empêchent une personne d’être quelqu’un de distinct d’indépendant. Elles aggravent   la dépendance et dépossèdent la personne de sa maturité d’adulte. Ces   croyances rendent la personne totalement responsable de l’humeur et du   bien-être de ses parents. Elle fonde la majorité des décisions de sa vie   sur l’effet qu’elles auront sur ses parents, elle renonce à son libre   arbitre car ils se sentent responsables de leurs sentiments.
 
  Fausses convictions et sentiments douloureux
 

  Les convictions autodestructrices mènent toujours à des sentiments   douloureux. En analysant ces sentiments on commence à comprendre à la fois   les croyances qui les font naître et les comportements qui en ont résulté.   Nous éprouvons tous de fortes réactions émotionnelles à l’égard de nos   parents. Certaines personnes connaissent ces sentiments. D’autres se   protègent de l’intensité de leurs émotions en les enfouissant en eux, il   faut parfois l’aide d’un professionnel pour les récupérer. Ces sentiments qui causent des problèmes   concernent la culpabilité, la peur, la tristesse et la colère. En   essayant de trouver le lien entre les croyances familiales et les sentiments   on constate que beaucoup de sentiments ont leurs racines dans ces   convictions. Par exemple : « je me sens coupable quand j’ai fait quelque   chose qui les contrarie parce que je ne dois ni dire, ni faire quoi que ce   soit susceptible de faire de la peine à mes parents ».
 
  Comportements de réaction
 

  Les croyances donnent les règles, ce que vous ressentez vous fait obéir à ces   règles, et c’est ce qui entraîne vos manières d’agir et de réagir. Si l’on   veut changer de comportement il faut faire le travail de changer les   convictions ainsi que les sentiments afin de pouvoir changer de règle de   conduite. Il y a deux types de comportements :
 
  - les comportements de soumission   : je cède à mes parents quels que soient mes sentiments, il m’arrive   souvent de ne pas leur dire ce que je pense, ce que je ressens, j’essaie de   toutes mes forces de les changer, je continue à être le dépositaire des   secrets de la famille.
 
  - Les comportements agressifs : je   me dispute continuellement avec mes parents pour leur prouver que j’ai   raison, souvent je crie, je hurle, j’injurie mes parents pour leur prouver   qu’ils ne peuvent pas me contrôler.
 

  Avant de pouvoir retrouver son véritable moi, il faut commencer à remettre en   question les croyances réductrices et les comportements autodestructeurs,   pour ensuite les rejeter et laisser émerger ses propres désirs.
 
  3) Les   débuts de l’autonomie
 

  L’indépendance émotionnelle n’implique pas qu’on se sépare de ses parents.   C’est quand on se sent libre d’avoir ses propres convictions, sentiments   et comportements, séparés de ceux de ses parents (ou des autres ), qu’on   est un être qui se définit lui-même, donc « autonome ». L’autonomie doit   avoir une certaine souplesse, nous devons trouver un équilibre entre notre intérêt et le respect des sentiments   d’autrui. L’essentiel est d’être   vrai avec soi-même, de faire ses propres choix et de se sentir libre   d’être d’accord ou non avec ses parents.
 
  Du bon usage de l’égoïsme.
 

  Certaines personnes ne savent pas se défendre parce qu’elles confondent   autonomie et égoïsme. Elles croient que c’est leur devoir d’ignorer   leurs propres besoins en faveur de ceux de leurs parents. Ces personnes   réagissent alors de façon automatique par une attitude conciliante et   consentante. Ce comportement donne un pouvoir considérable aux parents. Pour   détruire ce schéma de comportement elles doivent commencer à réfléchir sur   ce qu’elles veulent, elles, face aux exigences des parents.
 
  Répondre et non réagir
 

  Pour reprendre en partie le contrôle de sa vie il faut apprendre à ne plus réagir automatiquement. Il est important d’apprendre   à répondre par des réponses non défensives qui évitent l’escalade dans le   conflit.
 
  Le comportement non défensif
 

  C’est une technique qu’il faut apprendre et pratiquer, si l’on reste calme en refusant d’être mis en déroute, alors on garde   tout son pouvoir. Il faut s’entraîner à donner des réponses non   défensives qui aident à briser le cycle : attaque, retraite, défense et   escalade. (Exemple : « je suis désolé, mais je ne suis pas d’accord », «   reparlons de cela quand vous ne serez pas aussi contrarié » « vous avez le   droit d’être de cet avis » etc. )
 
  Quand on essaie de discuter, de   s’excuser, de les faire changer d’avis on abandonne beaucoup de son pouvoir. Si l’on utilise des réponses non défensives, on ne demande   rien, donc on ne peut pas être repoussé.
 

  Les déclarations   de principe peuvent aussi aider à moins réagir, elles définissent ce   qu’on pense et croit, ce qu’on veut faire et non, ce qui est négociable ou   pas. Avant d’émettre une déclaration de principe, il faut se   préparer et déterminer sa position.
  Toute décision fondée sur le choix, nous éloigne de l’impulsivité.
 
  Le face à face
 
  Il est important de mettre en pratique les réponses non défensives dés que   l’on a saisi le principe. On peut commencer par des déclarations de principe   sur des sujets anodins.
  Lorsqu’on se détermine mieux soi-même, sur un mode plus réfléchi qu’impulsif,   lorsqu’on fera des déclarations claires à propos de ce qu’on pense et   croit et qu’on fixera des limites de ce que l’on est prêt à faire ou non,   la relation avec les parents ne pourra que changer.
 
  4) Les   parts de responsabilité
 

  Il est nécessaire d’effectuer un   changement majeur d’opinion à propos du responsable des malheurs de son   enfance, sinon on supporte soi-même la responsabilité. A partir de ce   chapitre l’auteur propose un travail à un niveau beaucoup plus émotionnel. Il   est parfois utile d’avoir de l’aide à ce stade ( groupe de soutien,   thérapeute, ami...)
 
  La responsabilité des parents.
 

  Il est important de rejeter la responsabilité des événements douloureux de   son enfance et la remettre à sa véritable place. L’auteur   conseille de se trouver un moment où on est seul avec soi-même et de parler à   haute voix à l’enfant qui est en soi. On peut aussi utiliser une photographie   pour se remémorer combien on était petit et sans défense. En premier lieu, on   rejette la responsabilité de ce qu’on se reproche : « Tu n’étais pas   responsable ...de leur manque d’attention, des injures qu’ils t’adressaient,   du fait qu’ils n’étaient pas heureux, de leurs problèmes, de ce qu’ils faisaient   en état d’ivresse, etc...».
 
  Deuxièmement, toujours à haute voix, il faut remettre la responsabilité à sa   vraie place : « Mes parents étaient responsables de... ». De nouveau on   ajoute les déficiences des parents qui   s’appliquent à son expérience.
 
  Il faut du temps pour que les   sentiments rattrapent cette nouvelle conscience des responsabilités et souvent   on cherche des excuses pour ses parents surtout s’ils étaient pas à la   hauteur, malades ou pleins de bonnes intentions. L’important n’est pas de   savoir quelle a été leur part de responsabilité, mais de se rendre compte   qu’on n’était soi-même pas responsable. Les parents eux sont responsables autant de ce qu’ils ont   fait que de ce qu’ils n’ont pas fait.
 

  Les adultes qui ont été gravement maltraités pendant leur enfance ont   beaucoup de difficultés à remettre les responsabilités à leur place car ils essayent   de préserver le mythe de la bonne famille en croyant que c’est eux et non   leurs parents qui se conduisaient mal. Ils ont souvent besoin d’aide et de   jeux de rôle avec un thérapeute pour admettre la responsabilité des parents.
 
  Quand on commence à remettre la responsabilité à leur place, on ressent une colère intense à l’égard   des choses qu’on a subies et des gens qui les ont faites.
 
  La peur de sa propre colère.
 

  On peut être terrifié par toute la colère qui est en soi, elle est   chargée d’émotions dérangeantes. Pour se libérer de l’emprise des parents il   est important de passer par cette colère tout en la canalisant pour qu’elle   ne soit pas destructrice. Elle permettra de mieux se connaître et définir ses   limites. Comment la canaliser :
 
  - En se donnant le droit d’être en colère, elle signifie que quelque chose   doit changer
 
  - En extériorisant la colère, frapper un oreiller, hurler, en parler à   quelqu’un
 
  - En évacuant la colère par le biais d’activités physiques
 
  - En refusant de l’utiliser pour alimenter une mauvaise image de soi
 
  - En l’utilisant comme une voie pour   mieux déterminer ce qu’on est prêt à accepter et ce qu’on veut refuser, c’est   à dire pour fixer ses limites et ses frontières.
 
  La souffrance et le deuil.
 
  Le deuil est une réaction normale et nécessaire après une perte. Dans le   cas des enfants de parents toxiques il y a perte des sentiments de sécurité,   de confiance, de joie, de bons sentiments à l’égard de soi-même, etc. Il   est important d’identifier ces pertes et faire resurgir le chagrin refoulé   pour travailler sur ces sentiments et ainsi échapper à leur emprise. La   colère et le chagrin sont étroitement liés.
 
  Contourner son chagrin peut atténuer le sentiment de tristesse temporaire,   mais il sera toujours en soi, et il atténue le sentiment de bien-être. Là   aussi, il faut parfois l’aide d’un thérapeute, des jeux de rôle pour   déverrouiller la porte des sentiments et pour arriver à pleurer ses pertes.
 
  Pour être délivré de sa culpabilité d’enfant en soi, il faut ressentir et   exprimer sa colère et son chagrin, c’est un temps difficile plus ou moins   long, mais nécessaire pour un changement. Il est souhaitable de prendre   particulièrement soin de soi pendant ce temps, d’accepter de l’aide.
 
  Ses propres responsabilités d’adulte.
 
  Tout en remettant les responsabilités à leur place, l’adulte est responsable   de devenir un individu distinct de ses parents, il doit affronter la vérité   en ce qui concerne son enfance, trouver le courage de reconnaître le lien   entre les événements de son enfance et de sa vie d’adulte, changer de   comportements s’il est blessant et agressif.
 
  Il ne faut pas se décourager, c’est un processus, certaines étapes sont plus   faciles que d’autres.
 
  5) La   confrontation : un chemin vers l’indépendance
 

  Le travail sur soi des chapitres précédents a préparé la personne à la   confrontation. Ce face à face avec les parents peut paraître effrayant. Le but de la confrontation n’est pas   de se venger, ou de déverser la colère pour obtenir quelque chose de positif de   leur part, mais elle sert à vaincre une fois pour toute la peur de les   affronter, pour leur dire la vérité et pour déterminer le type de relations que vous pouvez avoir avec eux   désormais. Il ne faut pas considérer la réponse des parents comme   indicateur si la confrontation a été un succès, mais c’est un succès pour la   seule raison qu’on ait eu le courage de l’entreprendre.
 
  Pourquoi la confrontation ?
 

  Elle a opéré des changements positifs dans la vie de beaucoup de personnes.   Le fait d’y aller et d’affronte r certaines de ses peurs les plus profondes   sert à modifier l’équilibre entre les parents et les enfants. Si on   évite d’entreprendre cette démarche on renforce ses sentiments de faiblesse   et d’incapacité, on sape son respect de soi même. De plus, si on n’arrive pas au bout de sa peur, de   sa culpabilité et de sa colère envers ses parents on la transmet à son   partenaire et à ses enfants.
 
  Quand ?
 

  Il faut être prêt pour la confrontation et bien choisir son moment. Il ne   faut pas non plus la repousser indéfiniment. Les patients passent en général   par trois stades : ils pensent qu’ils ne pourront jamais faire cela, puis ils   le feront peut être un jour, mais pas maintenant ; enfin, ils demandent quand   ils peuvent le faire. Il est utile de bénéficier de soutien soit d’un groupe   ou d’un thérapeute pendant ce temps. Il faut aussi se préparer et s’exercer à apprendre les réponses non défensives et   les déclarations de principe. Il faut se sentir assez fort pour supporter que les   parents soient repoussants, qu’ils nient, se mettent en colère, et il ne faut   plus se sentir responsable des souffrances vécues pendant sa jeunesse.
 
  Comment faire ?
 
  La confrontation peut être faite en face à face ou par lettre ( un bon moyen)
 
  La lettre doit contenir quatre points qui expriment la vérité sur vos   sentiments et expériences :
 
  - voici ce que tu m’as fait
  - voici ce que j’ai éprouvé à cette époque
  - voici quel effet cela a produit sur ma vie
  - voici ce que j’attends de toi à présent.
 
  Pour le face à face, il faut bien   choisir le lieu de rencontre, soit chez le thérapeute qui orchestrera alors   la rencontre ou alors chez soi pour éviter d’être parasité par les   sentiments de son enfance. Il est préférable de les aborder ensemble,   mais on peut le faire individuellement. Si la peur de la confrontation est   trop grande, on peut écrire une lettre et la lire. L’important est de   bien se préparer de répéter ce qu’on veut leur dire et savoir ou on veut en   venir avec eux et de fixer des règles pour se faire entendre.
 
  Il y a des confrontations calmes et d’autres explosives. Certains parents   toxiques contre- attaqueront car ces paroles seront pour eux des agressions   personnelles et perfides. L’important n’est pas leur réaction mais celle de   l’enfant. S’il est capable de rester ferme face à leur fureur, il vivra un   grand moment porteur de changements positifs pour lui.
 
  Et ensuite   ?
 

  Rien ne sera plus jamais comme avant. La façon dont s’est déroulée la   confrontation ne permet pas de préjuger de la suite. Tous les participants   ont besoin de temps pour assimiler l’expérience et en tirer leurs propres   conclusion. La personne se sentira progressivement gagnée par une agréable   sensation de bien-être et de confiance en soi. Elle devra tenir bon en ce qui concerne sa vision des choses et ne pas   retomber dans les anciens schémas réactionnels défensifs, quelle que soit la conduite des parents.
 
  La relation entre les parents peut aussi devenir chancelante, surtout si un   secret de famille a été dévoilé tel que l’inceste.
 
  L’impact sur la fratrie et sur l’entourage.
 
  Tout le système familial est affecté   par cette démarche. Certains frères et soeurs vont confirmer, d’autres   réduire à peu de chose les abus, d’autres peuvent n’avoir aucune idée des   méfaits. Certains ressentiront cette confrontation comme une menace, ils   peuvent en vouloir à celui qui a perturbé l’équilibre précaire de la   famille et ils essaieront de faire pression. Il est essentiel de tenir bon quant à son droit de dire la vérité. Avec   d’autres ce sera peut être l’occasion d’enrichir la relation et de se   soutenir.
 
  C’est un temps difficile qui a été provoqué par la confrontation, la personne   aura besoin de soutien, elle ne doit pas hésiter à la demander de la part de   son partenaire ou ses enfants.
 
  Les parents toxiques tenteront peut être de se faire des alliés au niveau   de la famille, des amis, du pasteur et les rapports avec ces personnes   seront aussi affectées. Il faut être   préparé émotionnellement et psychologiquement à toute sortes de réactions :   être sermonné, être évité, exclu de la famille et où même déshérité.
 
  De nouveaux modes de relations.
 
  Il faudra peut être négocier avec les parents pour avoir de meilleures   relations, ou même faire marche arrière vers une relation plus superficielle.   Si la confrontation a été négative elle peut même aboutir à devoir rompre   toute relation avec eux. L’important   est de détruire les anciens schémas rituels avec ses parents, cela   permettra pour soi même des relations plus vraies et ouvertes avec soi- même   et les autres.
 
  La confrontation avec des parents âgés ou   malades.
 
  L’âge et la maladie ne rendent pas les parents toxiques plus aptes à accepter   la vérité. On peut demander l’avis du médecin traitant quant aux risques d’un   stress émotionnel. S’il n’y a pas de risque, rien ne s’oppose à la   confrontation. Si ce n’est pas possible on peut écrire une lettre et la lire   devant une de leurs photographies, ou le dire à un membre de sa famille ou   encore effectuer la confrontation en jeu de rôle avec le thérapeute.
 
  la confrontation avec un parent décédé.
 
  Lire une lettre de confrontation devant la tombe se révèle très efficace. On   peut également en parler à un membre de la famille de la même génération que   les parents.
 
  Quoi qu’il puisse y arriver pendant ou après la confrontation, c’est la   personne qui l’a entreprise qui en ressort gagnante car elle a eu le courage   de l’entreprendre.
 
  6) Guérir   de la blessure de l’inceste
 

  Il y a de l’espoir de guérison pour les victimes d’inceste. La   psychothérapie est nécessaire, car il y a beaucoup de croyances, de   comportements et de sentiments négatifs ancrés en eux.
 
  La meilleure façon de travailler à surmonter l’expérience incestueuse est   de se joindre à un groupe constitué de victimes et dirigé par un   thérapeute expérimenté dans ce domaine. Les techniques basées sur   l’action, comme les jeux de rôles sont indiquées. Ces techniques coupent   court aux manoeuvres aux rationalisations et à la négation de la réalité.   Elles offrent une atmosphère de sécurité où on peut exprimer ses sentiments   et tester ses nouveaux comportements. Ces groupes sont ouverts, les   personnes sont à différents stades de leur cheminement. Il sont   constitués d’hommes et de femmes, car les traumatismes sont semblables. Le   sentiment d’isolement total ressenti par les victimes diminue ainsi, les   membres du groupe se soutiennent mutuellement. Lors de l’initiation au groupe   d’un nouveau venu, chaque participant raconte en détail son expérience.   C’est très difficile pour le nouveau, il y a beaucoup de gène, de larmes,   mais à force de raconter son traumatisme, il y a un processus de   désensibilisation qui se met en route.
 
  La thérapie individuelle est une solution pour les victimes trop fragiles   émotionnellement.
 
 
 

 

 

   
 

Les étapes du   traitement   : Les victimes de l’inceste passent par trois étapes fondamentales :
 
  1/ L’indignation : c’est la colère   profonde qui naît des sentiments d’avoir été violé et trahi dans son moi le   plus intime. C’est une étape importante, afin de remettre les responsabilité   à leur place, il faut laisser l’indignation s’extérioriser dans le cadre   sécurisé de la thérapie.
 
  2/ La souffrance : la victime va   pleurer ses nombreuses pertes ( bonne famille, innocence, amour...)
 
  3/ La libération : à la colère et   la douleur succède le retour des forces et de sentiments de dignité et de   valeur. On ne se sentira plus comme victime, on ne se comportera plus ainsi.
 
  Les techniques du traitement :
 
  L’écriture de lettres et les jeux de rôles sont indiqués tant en   thérapie de groupe ou individuelle. Chaque patient doit écrire une série de   lettres (une par semaine) à différentes personnes et les lire au groupe. Il   doit refaire l’exercice autant que nécessaire. Ces lettres seront des   instruments de guérison, des baromètres indiquant le progrès accompli. On   ne demande pas aux personnes de les envoyer, elles pourront le faire quand   elles se sentiront assez fortes. Les différentes lettres à rédiger sont à   destiner à :
 
  1/ lettre à l’agresseur : elle   devra exprimer toute l’indignation ressentie pour faciliter la prise de   conscience des responsabilités de l’agresseur. Les lettres font resurgir plus de sentiments que des heures   d’entretien. En exprimant ainsi l’indignation, on abandonne une grande   part de dégoût et de haine de soi. On s’engage sur la voie de la guérison.
 
  2/ lettre à l’autre parent : elle   devra exprimer toute l’indignation pour son manque de protection, de son   incrédulité et d’avoir sacrifié son   enfant pour satisfaire ses besoins propres.
 

  3 / lettre à l’enfant blessé qui se trouve   dans l’adulte : elle met en route le processus destiné à redonner   un substitut parental. Elle console, rassure et protège cette partie de soi   restée vulnérable et pleine de frayeur.
 
  4/ un « conte » à propos de sa vie   : on réécrira son histoire en utilisant « il » ou « elle ». cela aidera à   regarder son monde intérieur dans une perspective nouvelle, plus objective,   en plaçant une distance entre soi- même et ses traumatismes d’enfant. Malgré   un début triste, le conte devra obligatoirement avoir une fin plein d’espoir,   cela permettra à la personne d’avoir des rêves plus positifs dans sa tête.
 
  5/ lettre au conjoint ou à celui qui les aime   : elle devra expliquer comment ce traumatisme d’enfance affecte la relation. Pour se libérer de la honte, il faudra   parler ouvertement.
 

  6/lettre à chacun de leurs enfants   : elle servira à affirmer la capacité d’aimer et de trouver la force   intérieure pour être un meilleur parent.
 
  7/ Réécrire sa vie en disant « non »   En visualisant yeux fermés la scène du premier abus, on peut se représenter   qu’on repousse l’agresseur, qu’on lui dit « non » qu’il quitte la pièce.   Ainsi renaît sa propre force, on réapprendra à dire « non ».
 
  La confrontation avec les parents :
 
  La victime devra avoir un système de soutien fort et elle devra être bien   préparée, car les parents agresseront   probablement la personne qui aura l’audace de dire la vérité et ils se   serrent souvent les coudes pour défendre leur mariage.
 
  Il faut être prêt à tout : l’agresseur   peut nier, minimiser et reconnaître les faits et le parent silencieux peut   prendre sa défense. Il faut se méfier de ses excuses, il doit prendre sur   lui l’entière responsabilité des faits et il doit aussi manifester la volonté   de changer.
 
  La victime devra aussi définir des   règles pour une future relation avec eux : celle ci devra être basée sur   le refus de vivre dans le mensonge. Souvent la victime devra affronter la   terrible vérité que ses parents sont incapables de l’aimer. Il arrive que   la relation doive être coupée.
 
  Les victimes d’inceste passent en général   un an à un an et demi dans ces groupes pour accomplir le cycle complet du   traitement. C’est le temps nécessaire pour intégrer dans leur personnalité   les changements intervenus dans leurs convictions, leurs sentiments et leurs   comportements.
 
  7) Briser   le cycle des répétitions
 
  Le cycle des comportements toxiques peuvent se perpétuer de génération en   génération.
  Pour un adulte   enfant de parents toxiques, il est important de briser ce cycle pour protéger   ses propres enfants des schémas toxiques transmis dans la famille.
 
  Briser le cycle signifie arrêter   d’agir comme une victime ou arrêter d’agir comme son propre parent déficient   ou abusif. Pour atteindre ce but, il faut :
 
  - avoir le courage d’entreprendre un   travail sur soi même. En se libérant de l’héritage de culpabilité, de   haine et de colère envers soi-même, on libère ses propres enfants.
 
  - s’engager à être plus disponible   pour ses enfants
 
  - regarder la   vérité en face : pour pouvoir briser le cycle il faut le reconnaître et non le nier
 
  - prendre des mesures avant que les   enfants ne tombent dans le même piège(ex :alcool)
 
  - protéger les autres enfants de la   famille de l’agresseur, c’est à dire : rompre le silence surtout en cas   d’inceste
 
  - s’excuser chez son propre enfant si   on a agit comme un parent toxique envers lui. Lui montrer qu’on a fait des   erreurs et qu’on est prêt à en assumer la responsabilité.
 
  En interrompant les schémas familiaux et en brisant ces cycles, la personne   remodèle le futur, le sien et celui de ses enfants.
 
  Synthèse et commentaires personnels
 

  L’auteur aborde la vie problématique des adultes qui, dans leur enfance et   leur adolescence, ont eu des parents qui ont causé des dommages considérables   au développement de leur personnalité. L’auteur a puisé largement dans ses   expériences vécues avec ses patients ; cela aide le lecteur à mieux   comprendre sa démarche. Dans un premier temps elle décrit les parents «   toxiques » qui ont été soit alcooliques, coupables de sévices physiques ou   d’abus sexuels, ou alors ils ont été démissionnaires, dominateurs, critiques,   méprisants, manipulateurs.
 
  Susan Forward montre comment la façon d’agir répétitive et insidieuse de ces   parents provoque des dommages émotionnels qui se répandent dans l’être de   l’enfant. La souffrance que ces blessures ont entraînée, grandit avec   l’enfant s’insinuant dans la structuration de toute sa personnalité. Ces   enfants devenus adultes restent en grande souffrance dans leur vie   professionnelle, sociale, affective, sexuelle. Paradoxalement, ils restent   liés étroitement à leurs parents et leur famille.
 
  Dans la deuxième partie du livre l’auteur propose une démarche qui a aidé   innombrables de ses patients à se libérer de l’emprise de leurs parents. Les   points importants sont :
 
  - prises de conscience ( quel type de parents ai- je eu ? quelles ont   été les croyances transmises ? y-a-t-il fusion ? ai-je des comportements   autodestructeurs)
 
  - mettre les responsabilités à la bonne place ( je n’étais pas   responsable des mauvais traitements de mes parents, je suis responsable de   prendre ma vie en main)
 
  - Traverser les sentiments qui vont faire jour : colère et tristesse   avec l’aide d’un thérapeute si nécessaire.
 
  - Apprendre à se définir soi même, apprendre à fonctionner sur un mode   plus réfléchi qu’impulsif, apprendre à faire des déclarations claires sur ce   que l’on pense et croit, apprendre à fixer des limites, apprendre à percevoir   la réalité avec ses propres références.
 
  - Oser la confrontation pour vaincre une fois pour toute la peur   d’affronter les parents.
 
  - Définir un nouveau mode de relation avec les parents
 
  - Briser le cycle des répétitions pour protéger ses propres enfants
 
  Pour les victimes d’inceste, il y a également un espoir réel de guérison,   mais la thérapie est impérative. Susan Forward conseille à ceux ci de se   joindre à un groupe constitué de victimes d’abus et dirigé par un thérapeute   expérimenté. La méthode de traitement paraît originale, mais elle a fait   preuve d’efficacité dans sa pratique.
 
  J’ai trouvé ce livre très intéressant, car il a clarifié pour moi les différents   types de parents toxiques, l’impact qu’ils avaient sur la vie de leurs   enfants, et les ravages qui en résultaient.
 
  J’ai apprécié qu’avant de parler des solutions au mal être de la personne,   l’auteur ait bien montré l’origine des souffrances.
 
  Je pense qu’il est important d’avoir une vision juste de ses parents,   pour comprendre ce qu’on est devenu et aussi pour aller de l’avant. Cela ne   veut pas dire les juger et les condamner, mais les reconnaître à leur juste   valeur.
 
  Le livre reste optimiste, malgré les exemples parfois terribles. Tout au long   de l’ouvrage, l’auteur encourage, elle donne de l’espoir aux lecteurs de   pouvoir apprendre à prendre distance de ses parents et ainsi être libérés   de leur emprise.
 
  Il est vrai que pour arriver au but du livre, l’auteur n’a parlé pratiquement   que d’exemples qui se sont terminés positivement. Mais, elle précise qu’il   serait irréaliste et irresponsable de penser qu’en suivant le chemin tracé   par ce livre tous les problèmes allaient disparaître.
 
  Pour juger du traitement proposé par l’auteur, il faudrait l’avis d’un   spécialiste, mais les étapes sont claires, compréhensibles et d’après   l’auteur elles ont fait leur preuve.
 
  L’auteur a abordé la question du pardon. Le parent toxique est responsable de   ses mauvais actes, mais il est bénéfique pour la victime de renoncer à la   vengeance.
 
  Le chapitre « difficile » a été la confrontation. J’ai des doutes qu’elle ne   dégénère pas en règlement de compte. Je veux bien croire l’auteur que si la   personne est bien préparée, bien entourée, que cette démarche soit   libératrice, mais si ce n’est pas le cas, n’est ce pas la source de plus de   souffrance encore?
 
 
  En conclusion : l’auteur a « osé » dénoncer les agissements   irresponsables de certains parents, elle a donné de l’espoir aux adultes   blessés, enfants de parents toxiques, de pouvoir se libérer d’eux, vivre «   leur » vie et de connaître un mieux être.

 
 

 
17 février 2008

Beaucoup des enfants dont parle Paul Arcand ont

Beaucoup des enfants dont parle Paul Arcand ont un dénominateur commun : ils n'ont pas pu s'attacher. Le vol de l'enfance, c'est le vol de l'attachement. Qu'en est-il ? Depuis les travaux de John Bowlby et ceux des neurosciences, nous savons que le cerveau du bébé ne se développe pas seul. Il lui faut un être humain d'accompagnement : stable, chaleureux, stimulant, continu. Cela s'appelle une mère, cela s'appelle des parents.
L'attachement se construit pendant une période déterminée qui fonctionne comme une fenêtre temporelle. Celle-ci s'ouvre vers six mois et se referme vers l'âge de deux ans et demi ou trois ans. Winnicott disait : «Un bébé, ça n'existe pas», sous-entendu : sans ses parents. L'attachement se construit dans la sécurité et produit notre sécurité psychique. Il est la base de notre colonne vertébrale mentale.
Plus encore, l'attachement construit notre attention, notre concentration, notre jugement critique, notre capacité d'inhiber volontairement nos comportements, notre intelligence, notre aptitude à planifier. Tous les enfants porteurs d'un trouble d'attachement ont à des degrés divers des altérations de ces capacités. Nous ne guérissons pas ces troubles, nous ne pouvons qu'empêcher qu'ils adviennent. Et nous avons très peu de temps.

Des interventions diverses
Ici interviennent les centres jeunesse. Ils doivent pouvoir exercer leur devoir d'ingérence humanitaire.
Ici interviennent les parents. Nous n'avons pas encore collectivement compris que certains ne peuvent pas l'être. Et, le plus souvent, c'est parce qu'eux-mêmes sont porteurs de troubles d'attachement et des victimes transgénérationnelles. C'est la notion italienne, reprise par le Dr Maurice Berger, d'intraitabilité parentale. Ici intervient la pédopsychiatrie. Elle commence à peine à expliquer publiquement ces mécanismes. Et même pour les parents qui se sont pris en main, qui ont traité leurs problèmes de maltraitance par alcoolisme ou toxicomanie, qui ont mûri et qui demandent désormais à reprendre leur enfant, il est trop tard. La fenêtre temporelle s'est refermée; le cerveau humain, en cette période d'attachement, n'attend pas.

Le bébé, retiré à temps du délire d'une mère qui le griffe à l'intérieur des joues pour que les services sociaux ne s'en aperçoivent pas, est confié à une famille d'accueil, il s'y attache. Si, vers trois ou quatre ans, la mère, guérie, veut se le voir confier à nouveau et qu'on lui dit oui, c'est cet enfant qu'on assassine.
Ici intervient la justice. Elle ne fait que commencer à entrevoir les conséquences de la nature très peu réversible de l'attachement. De surcroît, et à juste titre dans la majorité des cas, elle a tendance à rendre leurs enfants aux parents.




• La dépendance affective
http://www.servicevie.com/02Sante/Sex/Sex26032001/sex26032001.html http://www.redpsy.com/infopsy/dependance2.html
http://www.psychologuemontreal.com/dossier/dependanceaffective.shtml

• apprendre à m'aimer
http://www.redpsy.com/infopsy/dependance3.html

• extrait d'un ouvrage
1) Nature de la dépendance affective
Par dépendance affective, les psychologues entendent habituellement les relations affectives

ou amoureuses excessives, qui font qu'une personne en arrive à n'exister que par l'autre. La personne qui aime l'autre sacrifie tout pour son amour : ses biens matériels, son corps, c'est-à-dire ses énergies physiques et sa santé, et son âme même, c'est-à-dire sa pensée personnelle, sa liberté intérieure, sa culture, ses convictions les plus profondes, notamment ses convictions morales, et jusqu'à ses croyances religieuses.
L'amour ou plutôt l'attachement à l'autre est tel qu'il lui arrache sa propre vie, qu'il la désapproprie d'elle-même. Pour tant de dépenses physiques et morales, la personne dépendante affectivement attend un retour d'amour qu'elle ne reçoit jamais, ou du moins jamais comme elle le voudrait : ses attentes sont toujours déçues. Elle a un immense besoin d'être aimée. ce besoin d'être aimée est si impératif en elle qu'il lui commande d'acheter l'amour de l'autre, quel qu'en soit le prix. Mais l'amour vrai ne s'achète pas. Le genre d'amour qu'on traite sans le vouloir en bien de consommation, à l'encontre du véritable amour, est destructeur de la personnalité. Conséquence : une personne dépendante affectivement tend à détruire la vie personnelle de son partenaire et à se détruire elle-même. Si deux personnes co-dépendantes unissent leur destinée, leur relation à l'intérieur du mariage est vite étouffante. Pour échapper à l'étouffement, on cherche fréquemment un exutoire dans une vie sociale ouverte à toutes sortes d'autres dépendances.

2) Les espèces de dépendance affective
La dépendance affective qui comporte certes différents degrés, ne se vérifie pas seulement dans les relations de couple entre un homme et une femme cherchant à combler leurs besoins affectifs mutuels. La dépendance affective peut exister du côté des parents vis-à-vis de leurs enfants, comme des enfants vis-à-vis de leurs parents. Elle peut aussi exister dans les relations de personnes de même sexe, qu'elles soient adolescentes ou d'âge mur.

a) La dépendance parentale
Des parents dépendent de leurs enfants, en ce sens qu'ils paient l'amour de leurs enfants par une démission de leur responsabilité de parents. Pour être aimés de leurs enfants, ils sacrifient leur autorité, surtout dans le domaine de l'éducation. Par exemple, sous prétexte de s'adapter à la faiblesse de l'enfant, ces parents cesseront d'être eux-mêmes, en se laissant dominer par l'enfant. Pour des parents ayant eux-mêmes une carence affective, et dont la conduite est plutôt dirigée par les émotions que par la raison, la tentation de se complaire dans la tendresse qui leur est témoignée par leurs enfants est presque irrésistible. Ils éprouvent une peine très vive de voir leurs petits, lorsqu'ils doivent les punir, s'éloigner d'eux et même de les bouder. Leur coeur s'affole à l'idée de perdre, à tout jamais, leur affection. C'est pourquoi ils se jurent de n'user à leur égard que "d'indulgence", baptisant de ce nom leur lâcheté et leur faiblesse. Pour obtenir la soumission de leurs enfants, ils les supplieront ou encore leur promettront mer et monde, les traitant ainsi sans s'en rendre compte comme leurs supérieurs ou dans la meilleure hypothèse comme leurs égaux. Les capitulations des parents devant les caprices, les exigences déraisonnables, les manipulations, les crises des enfants se font toujours au nom de l'affection, de l'amour, de la tendresse. En réalité, ces capitulations manifestent une certaine immaturité affective chez les parents ; elles sont le signe extérieur d'un désordre affectif, qui peut prendre de graves proportions.

b) La dépendance infantile
S'il y a des parents dépendants affectivement de leurs enfants, la dépendance affective se vérifie beaucoup plus chez les enfants vis-à-vis de leurs parents. Dans un certain sens, tous les enfants sont des dépendants affectifs, et cela est normal. Sans l'affection de leurs parents, et une affection qui leur apporte la sécurité, l'équilibre et la joie de vivre, les enfants ne peuvent

se développer d'une façon harmonieuse. Les enfants ont un besoin naturel, essentiel à leur

croissance, d'être aimés et de se sentir aimés. Ils ont besoin d'être protégés, consolés lorsqu'ils souffrent, et sécurisés dans leurs peurs.
Il arrive assez souvent que des parents ne savent pas aimer leurs enfants, soit en usant envers eux d'une sévérité excessive, qui tue en eux la confiance et l'amour, soit en ne manifestant pas à tous la même affection, comblant les uns de tous leurs égards et en privant les autres. La nécessité même qui oblige de donner plus de soins à un enfant malade peut devenir l'occasion de négliger son frère ou sa soeur, qui enregistre le manque d'attention dont il est l'objet plus ou moins comme un rejet. Il est naturel que des enfants qui reçoivent constamment blâmes et reproches et jamais d'encouragement pensent qu'ils ne sont pas aimés de leurs parents, et que peut-être ils ne sont pas dignes d'être aimés par personne. Quelle qu'en soit la cause, la carence affective dont souffrent les enfants dès leurs plus tendres années en fait des candidats à la dépendance affective, qui leur fera rechercher plus tard de toutes sortes de manières, l'affection dont ils auront manqué. Cela peut se produire dans toutes les familles. Mais il est évident que les familles "dysfonctionnelles" offrent le milieu le plus favorable à la dépendance affective des enfants, qui subissent inévitablement dans leur activité le contrecoup de tout comportement excessif de leurs parents. On dit que l'insécurité de la maman affecte déjà l'enfant qu'elle porte. Si l'enfant naît dans un milieu familial perturbé, la peur et l'anxiété grandiront avec lui.
Les enfants qui ne se sentent pas vraiment aimés, bien que parfois ils puissent être comblés de gâteries, développent pour être aimés divers modes de survie, tant il est vrai que sans amour on ne peut avoir le goût de vivre. Au fond d'eux-mêmes, ils cherchent désespérément la forme d'affection à la fois tendre et virile, apte à les sécuriser, à les pacifier et à les valoriser. Privés de l'affection paisible, ferme, sûre, dont ils ont besoin, sans pouvoir l'exprimer, ils s'estiment sans valeur, indignes de toute considération et ce sentiment peut engendrer en eux la honte d'exister. Rien n'est plus douloureux pour un enfant que de se sentir indigne, coupable d'exister, que d'avoir honte de lui-même. Ce sentiment est une sorte de mort intérieure, beaucoup plus triste et pénible que la mort physique.
Pour échapper aux étreintes de cette mort de l'âme, pour vivre, pour récupérer, en termes d'affection, la valeur dont ils s'estiment privés, certains enfants se donneront tout entiers à ce qu'ils entreprendront et deviendront perfectionnistes. De tout ce qu'ils font, jamais rien n'est assez bien, assez parfait à leurs yeux. Certes, l'effort surhumain qu'ils déploient pour être appréciés et véritablement aimés, obtient des résultats, mais pas ceux escomptés. car, pour peu que leurs excès sont encouragés, ils ne sont jamais satisfaits d'eux-mêmes, à la poursuite d'une perfection extérieure toujours plus élevée, pratiquement inatteignable. D'où épuisement des forces, découragement, dépression et souvent régression, c'est-à-dire incapacité de faire aisément les choses faciles. Leur carence affective devenue une dépendance affective, les a engagés dans une voie de démesure, où tout devient compliqué, exténuant.
D'autres enfants, ne se sentant pas aimés, subissant peut-être mépris et rejet, développeront en eux des sentiments de colère. Ils en veulent à leurs parents, non sans raison, s'ils ont été, par exemple, victimes d'abus, de violence, ou traités injustement par rapport à leurs frères et soeurs. Alors, être rebelles, faire des mauvais coups, c'est leur manière d'attirer l'attention, et de compenser leur souffrance intérieure née de leur carence affective. Ce sont de petits être blessés, qui blessent à leur tour leurs parents et se révoltent contre toute autorité, perçue comme source d'injustice et de souffrance. Plus tard, après que les manifestations infantiles de leur rébellion seront calmées, ces enfants seront des dépendants affectifs. Leur besoin d'affection qui n'aura jamais été satisfait explosera dans une recherche aveugle d'amour de la part de personnes qui, dépendantes elles-mêmes, ne sauront pas les aimer vraiment.
D'autres enfants, mal aimés, s'isolent dans leur monde intérieur où ils entendent se mettre à l'abri des heurts et des blessures dont ils auront déjà trop souffert. La peur de souffrir davantage du manque d'affection les pousse à fuir le monde extérieur. Ils s'enferment en eux-

mêmes, se refusent à s'ouvrir aux autres ; ils disent ne pas avoir confiance en personne. Dans cette voie apparemment sans issue, bien que cela paraisse paradoxal, ils cherchent l'affection, une affection vraie. C'est la peur de ne pas être aimés qui inspire leur isolement et s'apprête à en faire des mésadaptés.
Pour d'autres, leur carence affective les amènera à attirer sur eux l'attention et des soins particuliers, par le biais de malaises, apparaissant comme des maladies, surtout d'ordre digestif. Il n'y a pas de doute que l'insécurité affective à laquelle sont soumis des enfants extrêmement sensibles puisse les rendre physiquement malades. Pour les guérir, il faudra découvrir la cause cachée de leurs maladies.
Par ailleurs, des enfants plus costauds, souffrant de carence affective, attireront sur eux l'attention par un comportement tout à fait opposé à celui de la faiblesse et de la maladie : ce sera par une exubérance affectée, par la bouffonnerie. Ils joueront le personnage du bouffon pour être écoutés, considérés, estimés. C'est un personnage qui voile à la fois leur souffrance et leur soif d'affection, et qui est comme une distorsion de leur vraie personnalité.
Je me suis attardé à décrire différentes manifestations de la dépendance affective chez les enfants, parce qu'elles sont à l'origine des troubles affectifs plus graves des adolescents et des adultes. Si on n'y prête aucune attention au stade de l'enfance, la dépendance affective ne peut que s'aggraver de plus en plus et devenir une maladie de l'âme qui rend la vie insuppportable. Pour découvrir les causes lointaines de la dépendance affective des adultes, on ne pourra jamais se dispenser de remonter à l'enfance.

c) La dépendance affective entre personnes de même sexe
La dépendance affective peut aussi vicier les relations de personnes de même sexe. Certaines amitiés, ne comportant pourtant aucune déviation sexuelle, sont quand même très malsaines, lorsqu'elles subordonnent entièrement une personne à l'autre, lorsqu'elles aliènent la liberté de l'une ou de l'autre personne, ou des deux. L'ami veut alors tellement conserver l'amitié de son ami, qu'il lui sacrifie, avec sa liberté, son identité personnelle. L'un ne peut plus se passer de l'autre : l'autre devient sa raison de vivre. Certaines personnes s'attachent ainsi tellement l'une à l'autre que la seule perspective de la séparation les jette dans un profond désarroi intérieur, dans l'angoisse.
L'aliénation de la liberté et de l'identité personnelle caractérise davantage, si l'on peut dire, les relations homosexuelles, qui, contredisant la nature humaine qui veut la complémentarité des sexes, comporte un très grave désordre moral. Il est certain que les personnes homosexuelles actives sont très sérieusement atteintes de la maladie de la dépendance affective.

La personnalité dépendante
La dépendance affective, enracinée dans la carence affective, n'est pas seulement qu'un désordre affectif, elle est un désordre de la personnalité, dont l'affectivité, au plan de la psychologie, n'est qu'un aspect, l'autre aspect étant celui du caractère, très lié avec l'hérédité biologique et les facultés rationnelles. Le caractère dont on peut, avec une bonne formation morale, corriger les défauts, ou sans souci de cette formation les détériorer, représente l'élément plus stable de la personnalité. La dépendance affective, en engendrant des habitudes de comportement destructrices de la liberté intérieure, a pour effet de rendre la personnalité dépendante. C'est pourquoi le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (le DSM-IV), utilisé par les psychologues et les psychiatres du monde entier, ne traite pas explicitement de la dépendance affective, mais plutôt de la dépendance de la personnalité. La personnalité dépendante y est définie comme un besoin général et excessif d'être pris en charge ; besoin qui conduit à un comportement soumis et "collant", et à une peur de la séparation. Le désordre de la personnalité dépendante apparaît au début de l'âge adulte et se manifeste dans des contextes divers.
Les symptômes de la personnalité dépendante
1. D'abord, l'identité personnelle de la personne dépendante est perturbée de diverses manières :
La personne a du mal à prendre des décisions personnelles. Son insécurité la fait hésiter, tergiverser, revenir souvent sur ses décisions. Les décisions à prendre l'angoissent.
La personne a du mal à assumer ses responsabilités. En raison de ses peurs, elle voudrait que d'autres interviennent à sa place. Elle tend ainsi à faire peser ses responsabilités sur les autres.
La personne n'a pas le courage de ses opinions et de ses convictions. Pour ne pas perdre l'affection ou l'approbation d'autrui, elle pense comme lui. Finalement, elle n'a plus d'opinions propres, ni de certitudes personnelles.
La personne ne se préoccupe que du regard des autres : la réaction des autres - réelle ou imaginée - devant ce qu'elle est et devant ce qu'elle fait détermine sa conduite. C'est ainsi qu'elle tendra à projeter une belle image d'elle-même, qui la rehaussera aux yeux des autres.
La personne manque de confiance en elle-même : elle souffre d'un complexe d'infériorité. Ce manque de confiance influence sa pensée, son jugement et la paralyse dans ses activités.
La personne a peur d'être abandonnée, laissée seule, c'est-à-dire à elle-même. Elle craint la solitude, la privant du soutien et de l'appui d'autrui.
2. Au plan émotif, la personne dépendante est instable.
Elle est dominée par ses émotions, qui la font souvent passer d'un extrême à l'autre, sans raison apparente. Elle a par suite beaucoup de peine à avoir un comportement et des réactions modérées; elle est donc excessive, tantôt en joie, tantôt en tristesse, tantôt en douceur, tantôt en colère.
La personne souffre particulièrement d'instabilité affective. La joie affective qu'elle peut parfois ressentir est toujours menacée. Son .bonheur est fragile, car il dépend essentiellement d'autrui.
Lorsqu'elle est en manque d'affection, elle ressent une profonde angoisse au point d'en être paniquée.
Se sentant souvent mal aimée, et même rejetée, par rapport à d'autres personnes qui lui semblent choyées et heureuses, elle éprouve alors des sentiments de jalousie et de colère, comme si l'amour des autres lui était dû en justice, et que les autres étaient responsables de sa souffrance; que leur bonheur était une injure à son état de privation, jugé comme un malheur intolérable.
La personne éprouve, très fréquemment, un douloureux sentiment de vide et d'ennui. Cette profonde tristesse peut l'engager à fuir, à se fuir elle-même, dans toutes sortes d'activités extérieures.
3. Au plan des relations interpersonnelles
La personne dépendante se laisse manipuler et abuser, et elle aussi manipule les autres. Parce qu'elle veut obtenir à tout prix ce qu'elle désire, elle ne discerne pas la vérité du mensonge dans les histoires qu'on lui raconte : elle se fait donc tromper. Et de son côté, parce qu'elle se débat dans un mensonge intérieur concernant l'actualisation de son désir de bonheur, elle manipule les autres.
La personne dépendante est portée à des colères intenses et inappropriées ayant diverses causes. Ce peut être pour se protéger elle-même d'agressions réelles, mais le plus souvent d'agressions qu'elle vit ou revit intérieurement. Ce peut être parce qu'elle est fâchée contre autrui, qui l'empêche d'être elle-même**********

La personnalité dépendante se caractérise surtout par :
- le fait d’autoriser ou d’encourager autrui à prendre la plupart des décisions
importantes à sa place,
- la subordination de ses propres besoins à ceux des personnes dont on dépend,
- la réticence à formuler des demandes – mêmes justifiées – aux personnes
dont on dépend,
- un sentiment de malaise ou d’impuissance quand le sujet est seul de peur de
ne pouvoir se prendre en charge,
- la préoccupation par la peur d’être abandonné,
- une capacité réduite à prendre des décisions sans être rassuré ou conseillé de
manière excessive par autrui.





PERSONNALITÉ DÉPENDANTE
Mode général de besoin d'être pris en
charge et qui aboutit à un comportement
de soumission, craint les séparations, d'être
abandonné
-n'arrive pas à prendre des décisions sans
demander un avis, un soutien
-demande à l'autre de prendre et d'assumer
la responsabilité
-n'arrive pas à entrer en conflit par crainte
d'être rejeté
-n'arrive pas à initier seul des projets
-manque de confiance en soi
-après une séparation, recherche rapidement
une solution de remplacement
(-Inhibition de l'agressivité)

17 février 2008

"Gardez-vous d'aimer un pervers" Véronique Moraldi

Véronique Moraldi, qui avait déjà publié "Gardez-vous d'aimer un pervers" aux mêmes éditions de L'Homme

  
http://www.amazon.fr/gp/search/171-8779877-9585048?search-alias=stripbooks&field-author=Moraldi%2C%20V%E9ronique

Table des matières
Zéro de conduite ou l'introuvable bonne mère
Un si merveilleux amour
Le rendez-vous d'amour manqué
Ces filles de mères impossibles, comment sont-elles ? Comment s'en sortent-elles ?
Réparations

Présentation de l'éditeur
La relation mère fille est une histoire d'amour si intense et si passionnelle qu'elle peut devenir le lieu de bien des abus et des souffrances. Avec originalité et une dose d'humour, ce livre analyse ce merveilleux amour et ses dérives. Il met en garde contre les pièges de la fusion identitaire et de la confusion des places en plus de décrire cette rivalité parfois poussée à l'extrême. Il dépeint la violence de la différenciation qui survient un jour ou l'autre quand mère et fille doivent se distinguer. L'auteur explique les conséquences que peut avoir le fait d'avoir eu une mère difficile sur le développement et le psychisme des filles. Surtout, elle donne des pistes et des conseils très concrets, de sorte que chacune pourra y trouver un ou plusieurs outils qui devraient lui permettre d'améliorer sa relation à sa mère ou à sa fille.

Biographie de l'auteur
VŽronique Moraldi est née ˆ Nice en 1963.

Après des études de philosophie, de lettres classiques et de droit, elle s'est tournée vers la psychologie. Depuis, elle pratique la méthode ESPéRE de Jacques Salomé, travaille sur l'origine des maux et des maladies et participe à des stages de Psychogénéalogie, de thérapies corporelles et d'hygiène vitale tout en poursuivant des études universitaires en psychologie sociale et en psychologie. Aux Editions de l'Homme, elle a publié "Gardez-vous d'aimer un pervers."

Wink

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17 février 2008

Centre d’Addictologie

GISME, Centre d’Addictologie

Informations, Soins, Recherche sur les conduites addictives

*

Consommations à problèmes et conduites à risques :

citations de presse et résumé des faits marquants - Année 2004 -

 

* tabac * alcool * cannabis * médicaments * dopage * autres "drogues"

 

* tabac

* quelques faits chiffrés * risques et nocivité * complicités * ripostes

* pratiques des compagnies tabagières

 

* quelques faits chiffrés

Selon des chercheurs, le tabagisme a été à l’origine de 5 millions de décès à travers le monde, en 2000. D’après l’Université de Harvard et l’Université de Queensland, la moitié de ces décès concernait des fumeurs âgés entre 30 et 69 ans. Medical News 

http://my.webmd.com/content/article/97/104239.htm?z=1728_00000_1000_nd_04

 

D'après un rapport de

la FAO

(organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture) la consommation de tabac devrait augmenter, au niveau mondial, jusqu'en 2010, mais à un rythme moins soutenu que par le passé. La part des pays industriels devrait représenter 29% de la consommation mondiale contre 71% pour les pays en voie de développement. La plus grande partie de l'augmentation de la consommation aura lieu en Extrême Orient, notamment en Chine. http://www.drogues.gouv.fr/fr/ind ex.html

 

« 5 700 milliards de cigarettes sont consommées chaque année, dont 60% environ par des fumeurs vivant dans des pays en développement. La progression du tabagisme est continue, dans ces pays ». Tabac Actualités n°49, mai 2004

 

En 2003, les fumeurs français ont inhalé quelque « 560 tonnes de goudron », « de quoi goudronner entièrement l'avenue des Champs-Elysées ». Paris Match 5/2/2004

 

Selon une enquête de l'Institut de prévention et d'éducation à la santé (INPES), le nombre de fumeurs a baissé en France de 1,8 million entre 1999 et 2003 (en 1999

la France

comptait 15,3 millions de fumeurs, contre 13,5 millions en fin 2003). La proportion de fumeurs chez les 15-75 ans est passée de 34,5% en 1999 à 30,4% en 2003. AFP 2/2/2004

 

Si les ventes de cigarettes décroissent en France, celles des "mini-cigares" ont augmenté de 13% depuis janvier 2004. Le cigare bénéficie d'une image "moins industrielle" que la cigarette. Pour attirer les femmes, les multinationales ont modifié le goût et l'odeur des cigarillos, qui sont devenus plus doux et plus parfumés. Il s’agit de les faire passer pour "une gâterie" plutôt que pour un objet de dépendance. Le Journal du Dimanche 2/10/2004

 

L'usage du tabac augmente très fortement avec l'âge, jusqu'à 18 ans (il décroît régulièrement, après 35 ans).

Garçons et filles commencent à fumer sensiblement au même âge (un peu plus de treize ans et demi), et les femmes sont plus nombreuses que les hommes à cesser de fumer jeunes. 25% des femmes enceintes fument. Chez les fumeurs réguliers, la quantité de cigarettes est maximale autour de 40-50 ans. AFP 11/2/2004/expertise collective Inserm

« Plus le début du tabagisme a été précoce, plus le nombre de cigarettes fumées chaque jour à l’adolescence, mais aussi à l’âge adulte, sera élevé, et plus grand sera le risque de développer ultérieurement des maladies liées au tabac. L’âge de la première cigarette a un effet majeur sur la capacité de cesser de fumer une fois adulte. Les fumeurs ayant démarré leur consommation avant l’âge de 16 ans ont deux fois plus de risque de l’être toujours à 60 ans. Parallèlement, le nombre d’années d’abstinence augmente progressivement avec l’âge de début du tabagisme. Ne commencer à fumer qu’après 20 ans favorise la capacité de rester abstinent plus longtemps que ceux dont l’initiation a été plus précoce ». Le Monde 18/2/2004 /expertise collective Inserm

 

« Un étudiant français sur cinq est "accro" à la cigarette », et une enquête de

la Mutuelle

des étudiants, commandée par

la Direction Générale

de

la Santé

, montre que « la moitié de ces jeunes devient véritablement dépendante une fois arrivée dans l'enseignement supérieur ». Ceux qui fument le plus sont les étudiants en lettres, en langues et sciences humaines. Ceux qui fument le moins sont les élèves des grandes écoles et ceux inscrits dans des formations courtes (IUT, BTS). Parmi ceux qui fument le moins, figurent aussi les étudiants boursiers, et « les catégories sociales les plus aisées bénéficiant d'un haut niveau d'éducation ».

Les étudiants fument essentiellement pendant les soirées festives (où 83% disent accroître leur consommation) et en période d'examens (69%). En revanche, ceux qui vivent chez leurs parents fument moins (17% de fumeurs), et 18% disent fumer moins en vacances. Ceux qui vivent en couple fument plus que la moyenne générale (26% de fumeurs). Le Figaro 24/11/2004 et AFP 25/11/2004

L'enquête menée par

la Mutuelle

des étudiants montre aussi que si la consommation de tabac est en baisse de 10% depuis trois ans chez les étudiants, la consommation de cannabis, elle, a augmenté de 10% dans le même temps. Le Monde 25/11/2004

 

« Les chômeurs sont près de 30% de plus à fumer que les actifs ». Tabac Actualités n°50, juin 2004

 

Une étude américaine montre que les femmes victimes de violences physiques ou d'abus sexuels dans leur enfance ont 40% de plus de risques de devenir fumeuses que les autres. AFP 15/4/2004

 

Selon une expertise collective de l'Inserm, la dépendance au tabac est plus complexe qu'on ne l'imaginait. La nicotine n'est plus seule incriminée ; les plus de 4 000 composants chimiques présents dans une cigarette sont suspectés d'avoir aussi leurs propres actions. Les Echos 16/2/2004

 

Le nombre de récepteurs nicotinique serait augmenté de 50% chez les fumeurs par rapport aux non-fumeurs. La nicotine parvient au cerveau « dans un délai très rapide de 9 à 19 secondes, plus bref qu'avec une injection intraveineuse ». Le Monde 18/2/2004

 

D’après une enquête réalisée par l’institut TNS SOFRES auprès d’un échantillon (de 1008 individus) représentatif de la population des 15 ans et plus, 74% des Français sont favorables à une interdiction totale de fumer dans les entreprises, 72% dans les restaurants, 64% dans les cafés et 59,5% dans les discothèques. AFP et Libération 15/10/2004

 

En France, « 71% des fumeurs réguliers disent vouloir arrêter ». Le Monde 29/5/2004

 

80% des fumeurs rechutent malgré patchs et médicaments, ce qui, selon les experts, ne peut pas être expliqué par « un manque de volonté ». Le Parisien 11/2/2004

 

Une étude (randomisée et en double aveugle) comparant les effets du timbre à la nicotine à ceux d’un timbre placebo, a été menée sur cent jeunes âgés de 13 à 19 ans et fumant au moins 10 cigarettes par jour depuis au moins 6 mois. « A la fin de la période de traitement, 22% des adolescents étaient abstinents dans le groupe nicotine, et 26% dans le groupe placebo ».

« La fréquence des effets indésirables était similaire dans les deux groupes, à l’exception des maux de tête qui se sont avérés significativement plus fréquents chez ceux qui recevaient le placebo ». Inserm Expertise collective Tabac Comprendre la dépendance 2004, p299-300

 

« Deux ans de commercialisation en France, 500 000 patients traités, quelque 1 300 déclarations d'effets secondaires et une quinzaine de décès éventuels » : les dernières données de pharmacovigilance du Zyban « confirment que ce médicament vedette du sevrage tabagique est loin d'être anodin ». 1047 observations d'effets secondaires dont 262 graves et 12 décès ont été observées, la première année de sa mise sur le marché. « Molécule proche des amphétamines, d’abord développé comme antidépresseur, le Zyban a été commercialisé dès 1997 aux Etats-Unis ». Sa mise sur le marché français « a finalement été accordée, avec un suivi de pharmacovigilance renforcé », en 2002. Libération 10/1/2004

Le bupropion (Zyban) « peut induire des effets secondaires, le plus marquant étant le déclenchement de crises convulsives. Les contre-indications absolues sont l’hypersensibilité au produit, la maladie épileptique (risque de 0,1%), les troubles du comportement alimentaire (boulimie ou anorexie mentale), la cirrhose sévère, les troubles dépressifs bipolaires, l’utilisation concomitante d’IMAO, une tumeur du système nerveux central, un sevrage récent en alcool ou en benzodiazépine ». Par ailleurs « le bupropion n’est recommandé ni chez la femme enceinte ni chez les adolescents »… Tabac Actualités n°48, avril 2004

 

* risques et nocivité

« Les personnes n’ayant jamais fumé mais qui sont exposées au tabagisme passif à leur domicile, ont une surmortalité toutes causes évaluée à 15% par rapport aux personnes vivant dans un foyer exempt de fumée de tabac ». Tabac Actualités n°50, juin 2004

 

Des personnes cardiaques exposées ne serait-ce que 30 minutes par jour à un environnement enfumé « encourent un risque très significativement accru de récidive d’accident cardiovasculaire ». Tabac Actualités n°50, juin 2004

 

« Tabac + pollution = risque d'infarctus décuplé ». Une communication publiée par le Congrès de l'American Heart Association indique en effet qu'à partir d'une pollution de niveau 7 (sur une échelle de 1 à 10), le nombre d'infarctus dans la population générale augmente de 163%, mais que si on observe les seuls fumeurs, ce taux est augmenté de 250%. Avantages juill-août 2004

 

« La nicotine, comme de nombreux composants de la fumée de tabac, traverse la barrière placentaire, et il existe de nombreux arguments permettant de penser que l’exposition in utero - mais peut-être aussi au cours de la petite enfance - à la fumée de cigarettes, pourrait favoriser le risque de dépendance ultérieure ». Tabac Actualités n°48, avril 2004

 

Près de 30% des fumeuses terminent leur grossesse sans avoir pu arrêter de fumer. Or une femme enceinte qui fume plus de 10 cigarettes par jour voit le risque de décès du fœtus in utero augmenter de 60%, alors que le risque de fausse couche ou d'accouchement prématuré est multiplié par deux. Généralement le poids du nourrisson dont la mère a fumé pendant la grossesse est plus faible (jusqu'à « 750 grammes de moins qu'un enfant normalement oxygéné »). AFP 11/10/2004

 

Une étude néo zélandaise publiée dans le British Medical Journal conclut à « un surcroît de mortalité de 15% » chez des non fumeurs exposés à leur domicile au tabagisme de leur entourage.

D'après une étude publiée par le British Medical Journal et portant sur 34 449 médecins britanniques suivis pendant cinquante ans (c’est l’une des premières études épidémiologiques prospectives de grande ampleur), les fumeurs meurent en moyenne dix ans plus tôt que les non fumeurs, mais cesser de fumer à cinquante ans réduit de moitié le risque. En arrêtant de fumer à trente ans, le risque de mortalité prématurée est pratiquement totalement évité. Arrêter de fumer à 60, 50 ou 40 ans permet de gagner respectivement 3, 6 et 9 années.

Au moins la moitié des fumeurs de longue durée de l'échantillon seraient morts à cause du tabac et, parmi les médecins nés entre 1900 et 1909, fumer a doublé le risque de mourir entre 35 et 69 ans (42% au lieu de 24% pour les non fumeurs). AFP 23/6/2004

 

En France, un rapport de l'Institut National de Veille Sanitaire prévoit que 12 000 femmes décèderont chaque année d'un cancer du poumon à partir de 2015, soit six fois plus que ce qui prévalait en 1980. Cette progression est liée à celle du nombre de françaises qui se sont mises à fumer pendant cette période.
h ttp://www.reuters.com/newsArticle.jhtml?type=healthNews&storyID=3666265 

 

Une étude de

la CNAM

(Caisse nationale d'assurance maladie) souligne une progression rapide du cancer du poumon chez les femmes, qui laisse présager « une poursuite de la hausse pendant les deux prochaines décennies ». Le Monde 3/9/2004

« Ce cancer est particulièrement grave puisqu'on enregistre 85% de décès dans les cinq années qui suivent le diagnostic ». Le Parisien 3/9/2004

Avec près de 22 700 décès en 2000, le cancer du poumon est au premier rang des causes de décès par cancer pour l’homme, et au troisième pour la femme. (étude de

la CNAM

sur www.ameli.fr )

 

Les milieux de la recherche britannique sur le cancer demandent une interdiction générale de fumer au travail et dans tous les lieux publics fermés. Selon eux, une telle loi, bien appliquée, sauverait plus de vies, dans un court laps de temps, que le développement d'un nouveau traitement contre le cancer. www.cancerresearchuk.org 20/9/2004

 

D’après une étude menée par un groupe de chercheurs britanniques, le risque de troubles séniles de la vue est 3 à 4 fois plus élevé chez les fumeurs que chez les non-fumeurs. BMJ 2004; 328: p537 à 538

La richesse en vaisseaux sanguins de la choroïde, l’une des trois membranes de l’œil, assure la nutrition des photorécepteurs de la rétine. Or des mesures du flux sanguin à ce niveau montrent que la réactivité vasculaire de cette membrane est altérée chez les fumeurs. Sciences et Avenir sept. 2004

 

Un rapport émanant de scientifiques suédois montre qu’à la suite d’une intervention chirurgicale de la sphère orale, les fumeurs présentent des réactions inflammatoires beaucoup plus longues, par rapport aux non fumeurs.
http://w ww.eurekalert.org/pub_releases/2003-11/aaop-smw111103.php

 

Selon une étude publiée en Grande Bretagne, « les mâles britanniques produisent un tiers de moins de spermatozoïdes qu'en 1989 ». Les auteurs attribuent cette déficience à l'abus de boissons alcoolisées, à l'usage de drogue, au tabagisme, à l'obésité et aux pesticides. AFP 7/1/2004

 

Les fumeurs encourent un risque cinq fois plus grand de subir une hémorragie cérébrale que les personnes n'ayant jamais fumé. Stroke 2004; 35: p633 ; http://stroke.ahajournals.org

 

Une étude italienne montre que la ménopause est plus précoce chez les femmes fumeuses que chez les non-fumeuses. Par ailleurs les fumeuses de moins de 46 ans souffrent plus fréquemment de troubles utérins. Reproductive BioMedicine Online 2004; 8: 246-24. www.rbmonline.com

 

D’après un rapport du Surgeon General (autorité médicale américaine), la liste des maladies causées par le tabagisme s’allonge. En font partie, notamment, la leucémie, la cataracte, la pneumonie et les cancers du col de l'utérus, du pancréas, du rein et de l'estomac. La cigarette augmente également la fragilité osseuse, le risque de complications liées au diabète, les infections suivant une opération chirurgicale et les risques d'infertilité. En fait, « les toxines de la fumée vont partout où coule le sang ». AFP 28/5/2004

 

Les cigarettes sans tabac vendues en pharmacie sont aussi dangereuses que les autres : elles contiennent du goudron, produisent du monoxyde de carbone, et « on trouve dans ces cigarettes 3000 produits de la fumée du tabac ». AFP 25/8/2004 et Le Parisien 24/8/2004

 

* complicités

La production de tabac « continue à être subventionnée dans le cadre de la politique agricole commune ». Le Monde 21/1/2004

 

Selon un sondage, plus d'une personne sur trois n'ose toujours pas réagir quand quelqu'un fume dans un espace non fumeur.

La Croix

20/10/2004

 

* ripostes

En Suisse, on dénombre 160 restaurants, bars et cafés "sans fumée", sur les 25 000 établissements existant dans l'ensemble du pays. www.cnct.org

 

« Val Thorens organise une opération anti mégots », afin de « sensibiliser les skieurs à la préservation de la montagne ». Dans cette station, on trouve jusqu'à 30 000 mégots par an sous un seul télésiège. France Soir 14/2/2004

 

Dans les îles de Porquerolles et Port Cros les cigarettes sont, dorénavant, « interdites de séjour, afin de préserver ces sites naturels ». L'Humanité 5/7/2004

 

Sud Ouest a été condamné pour infraction à la loi Evin à la suite de la publication d'une photo des vainqueurs du grand prix de Hongrie de Formule 1 sur laquelle on voyait la marque d'un cigarettier. AFP 13/2/2004

 

Un communiqué de l'OMS signale que « les associations des professionnels de la santé ont décidé de promouvoir un code de conduite demandant aux médecins et aux infirmières de réduire leur tabagisme, parfois plus élevé que celui de la population générale ». AFP 2/2/2004

 

Un trafic de cigarettes vendues par internet a été démantelé. Le site e-tabac.com vendait, depuis juillet 2003, des cigarettes à moitié prix à ses clients, uniquement français.

Le bénéfice pour les délinquants est estimé à 350 000 euros, avec 24 000 cartouches écoulées via un système complexe de sites écrans. Les commandes étaient passées par mail à un site hébergé en Floride, mais les paiements étaient dirigés, à l'insu des clients, sur un site géré à l'Ile Maurice. Les commandes aboutissaient au Bénin et au Togo où étaient installés les fournisseurs, lesquels achetaient leurs cigarettes en Suisse, en Angleterre et en France à des prix défiant toute concurrence grâce aux détaxes. AFP 9/2/2004

 

A Los Angeles et dans trois autres villes de Californie, la municipalité a décidé d'interdire de fumer sur les plages. Au total, ce sont plus de

20 km

de côtes sur le Pacifique qui seront sans tabac. Depuis dix ans, déjà, tous les bars et restaurants californiens sont sans tabac. AFP 26/4/2004

 

Depuis la mi-décembre, tous les TGV sont "non-fumeurs", en France. C’est le cas aussi de tous les trains italiens. Le Parisien 10/12/2004 et AFP 10/12/2004

 

A partir du 1er juin 2004,

la Norvège

sera le 2ème pays, après l'Irlande, à appliquer une interdiction totale de fumer dans les lieux publics y compris les bars et restaurants. 54% des Norvégiens ont un avis positif sur cette nouvelle loi, 17% se disent "neutres", et 29% s'y déclarent opposés. Le paquet de cigarette norvégien est, avec le paquet britannique (près de 8 euros), le plus cher d'Europe. AFP 26/5/2004

 

Selon un sondage, 63% des New Yorkais approuvent la loi qui interdit le tabac dans presque tous les bars et restaurants de la ville. AFP 26/4/2004

New York a été la première ville à interdire de fumer dans tous les lieux publics fermés. Contrairement à ce qui avait été craint, les chiffres d’affaires des restaurants et des bars n’ont pas été atteints par cette décision et auraient même progressé. Même constatation en Irlande, qui a également prohibé le tabac dans les lieux publics fermés. Depuis, ces exemples sont de plus en plus imités (notamment à Tokyo, en Norvège, en Suède et dans deux provinces canadiennes). http://www.jim.fr 6/10/2004

 

La cigarette sera progressivement interdite dans tous les bars et hôtels d'Australie, à partir de janvier 2006. Libération 20/10/2004

 

Pour protéger le public du tabagisme passif, Hong Kong a voté une interdiction de fumer au travail, ainsi que dans les bars et restaurants. AFP 21/10/2004

 

Le Comité national contre le tabagisme (CNCT) réclame l’interdiction de la cigarette dans tous les lieux publics, notamment les cafés, les restaurants et les entreprises. Il s'agit de protéger non seulement les personnes accueillies mais aussi les personnes qui y travaillent. L’exposition à la fumée du tabac augmente de 30% le risque de cancer du poumon (fumer augmente de 2000% ce risque).

La nouvelle loi de santé publique a doté les inspecteurs du travail de missions de contrôle de la loi Evin dans les lieux publics et les entreprises. Le Figaro 16/9/2004

 

De manière incognito des enquêteurs de 60 millions de consommateurs ont prélevé l'air dans trente restaurants et dix discothèques. Résultat : « la pollution par la fumée du tabac est parfois pire que celle des villes par l'automobile ». « Treize ans après avoir été promulguée, la loi Evin n'est toujours pas respectée ». Pourtant 73% des Français, fumeurs compris, disent être gênés par la fumée des autres, le moment le plus sensible étant celui des repas ». 60 millions de consommateurs n°386, sept. 2004

 

La Mairie

de Paris a lancé un label "Etablissements sans tabac", proposé aux 1 200 cafés, brasseries, hôtels et restaurants de la capitale. Le Parisien 1/10/2004

Les établissements qui acceptent la charte ont un logo d'identification comme établissement non fumeur et sont référencés dans des guides. AFP 4/10/2004

 

Depuis le 17 décembre 2004, le royaume himalayen du Bouthan (pays situé entre l’Inde et

la Chine

), qui compte 734 000 habitants, est devenu le premier pays du monde où la vente de tabac sera totalement interdite. AFP 16/11/2004

 

En 2000

la Commission Européenne

, appuyée par 10 pays, avait lancé une offensive contre Philip Morris, R.J. Reynolds et Japan Tobacco, soupçonnés d'écouler clandestinement une partie de leur production pour ne pas payer les taxes sur le tabac. Pour Luk Joossens, « les industriels du tabac étaient beaucoup plus inquiets de la plainte de

la Commission

, qui démontrait leur association avec le crime organisé, que d'autres plaintes, par exemple pour avoir causé des maladies, ou pour publicité illégale ». Libération 6/4/2004

La Commission

européenne a abandonné ses poursuites pour contrebande contre Philip Morris, en contrepartie du paiement d'une somme de 1,25 milliards de dollars sur douze ans. Ces sommes seront consacrées « à la lutte contre la contrebande et la contrefaçon ». Cet accord met fin à un contentieux vieux de quatre ans dans lequel Bruxelles avait attaqué Philip Morris, RJ Reynolds et Japan Tobacco devant un tribunal new yorkais, leur reprochant d'organiser en Europe une contrebande de cigarettes faisant perdre des centaines de millions d'euros de recette aux budgets communautaire et nationaux. AFP 12/7/2004

« Le fait que Philip Morris se résolve à un tel accord tient donc du coup d'éponge sur une bien mauvaise publicité quant à ses liens avec le crime organisé ». « L'accord prépare le terrain pour des ententes du même type avec d'autres multinationales » comme par exemple RJ Reynolds, attaqué pour blanchiment d'argent et accusé d'avoir « vendu sciemment ses produits au crime organisé ». Libération 10/7/2004

 

Un dirigeant de Philip Morris a été condamné par un tribunal français pour publicité illicite lors de la foire de Caen qui s’est tenue en 2003. Lors de l’achat de paquets de cigarettes, Philip Morris distribuait en effet des T-shirts, cendriers, porte-clés, casquettes et stylos, sur son stand. Deux autres dirigeants de Philip Morris ont été condamnés par le tribunal de Paris pour des opérations de promotions illicites qui se sont déroulées lors des internationaux de tennis de Roland Garros en 2000 et 2001. AFP 4/11/2004

 

En France « le mouvement consumériste peine à s'ériger en contre-pouvoir ». Ainsi, dans la plupart des procédures judiciaires françaises concernant le tabac, les plaignants sont déboutés. Dans les 12 procès intentés à Altadis depuis 1996, par exemple, aucun plaignant n'a obtenu gain de cause.

Aux Etats-Unis, le système juridique est différent. Les avocats sont payés au résultat ; ils incitent les victimes du tabac à porter plainte. Par ailleurs le jury est un jury populaire, et la notion de "dommage punitif" lui permet d'ajouter à la base légale des sommes très élevées, au titre des dommages et intérêts.

En France, la mention "nuit gravement à la santé" portée sur les paquets depuis 1976 oblige en outre le plaignant à remonter plus de 25 ans en arrière pour plaider l'ignorance du danger. Le Figaro économie 22/6/2004

 

Un groupe de scientifiques et de médecins accuse BAT (British American Tobaco) de continuer à dissimuler les informations qu'elle détient sur la nocivité de ses produits. Selon eux, 36 000 pages des 8 millions de pages archivées par BAT auraient disparu, depuis que le gouvernement britannique a ordonné leur publication. 20 Minutes 9/6/2004 & The Lancet

 

Le Sénat américain a voté une loi permettant à

la FDA

(Food and Drug Administration) de réguler la vente, le marketing et la fabrication des cigarettes. Il a également prévu un budget de 12 milliards de dollars pour aider les fermiers qui cultivent le tabac à se reconvertir.

La FDA

pourra notamment obliger les producteurs à enlever de leurs cigarettes certains de leurs ingrédients les plus toxiques. Medimedianet

 

Le gouvernement américain a entamé un procès historique contre les cigarettiers. Les accusations portent sur la manipulation des dosages de nicotine pour augmenter la dépendance des fumeurs, le ciblage des adolescents à coup de campagnes publicitaires, la vente de cigarettes dites "light", les mensonges sur les risques du tabac, la manipulation de résultats d'études scientifiques prouvant l'existence de ces risques. AFP 20/9/2004

Le département de la justice demande à l'industrie américaine du tabac de rembourser les 280 milliards de dollars de profits réalisés depuis 1953, pour avoir « sciemment trompé le public sur les risques représentés par la cigarette ». « Selon les documents déposés auprès du tribunal fédéral, les dirigeants des groupes de tabac se sont en effet réunis à New York, il y a cinquante et un ans, pour établir une stratégie de communication visant à créer le doute sur la réalité des dangers de leurs produits ».

« Les poursuites ont été engagées en vertu de la loi RICO (pour Racketeer-Influenced and Corrupt Organizations Act), conçue dans les années 1970 pour lutter contre le crime organisé ». « Ce texte considère qu'une activité économique devient criminelle si elle est liée à une conspiration illégale ». Or, selon les procureurs, « les groupes Philip Morris, R.J Reynolds, British American Tobacco (BAT), Brown & Williamson et Lorillard & Liggett ont préparé et exécuté - et continuent à préparer et exécuter - un vaste complot depuis un demi-siècle pour tromper le public ». Selon les experts judiciaires, « le gouvernement n'aura pas la tâche facile » puisque « la loi stipule que l'accusation doit prouver que la conspiration existe toujours et n'appartient pas seulement au passé ». « Le procès s'annonce long et complexe ». Le Monde 21/9/2004

En habitués de la justice, les industriels n'ont pas lésiné sur les moyens : 145 avocats inscrits pour ce procès qui doit durer jusqu'en mars prochain, face aux quatre avocats du ministère de

la Justice. Les

Echos 21/9/2004

« L'heure n'est pas à l'alarmisme à Wall Street », puisque, selon des analystes, « ce procès ne devrait pas constituer un risque signifiant pour les fabricants ». En effet, assurent-ils, « même si la justice réussissait à prouver leur culpabilité, la sanction ne sera pas nécessairement une amende démesurée ».

La Tribune

22/9/2004

 

* pratiques des compagnies tabagières

La compagnie British American Tobacco (BAT) a testé sur des rats l'influence d'additifs mis dans les cigarettes. 482 substances ont ainsi été analysées : chocolat, vin, sherry, cacao, sirop de grain, jus de cerises, sirop d'érable, vanille etc. Ces additifs sont principalement destinés à atténuer le goût âpre du tabac.

Plus la fumée du tabac est douce, plus elle est inhalée aisément et profondément, et plus rapide est la pénétration de la nicotine dans le cerveau. www.at-suisse.ch

 

« Un tournant important dans les efforts de prévention du tabagisme est survenu dans les années 1990, lorsque des documents internes de l'industrie de tabac ont été publiés pour la première fois. Au début révélés par des collaborateurs de cette industrie, des millions de pages de documents ont été ensuite publiées après les procès américains historiques. Ce que ces collections contenaient a étonné même les spécialistes les plus endurcis. Les documents ont indiqué des décades de duperie, y compris la connaissance qu'avait l'industrie du tabac sur la dépendance à la nicotine, et la manipulation de ses produits pour augmenter cette dépendance, le marketing visant les jeunes et les femmes, la participation à la contrebande et les efforts souvent secrets pour miner les efforts de prévention du tabagisme à travers le globe ». Addiction 2004 Vol. 99 n°4 p394-397

 

Dans les pays en développement, les grands cigarettiers ont fortement incité les familles à cultiver du tabac. Suite à l’effondrement du prix de vente des feuilles de tabac, les producteurs endettés ont cherché à abaisser le prix de la main-d’œuvre en faisant travailler des enfants. Ceux-ci attrapent les maladies dues à l’exposition aux feuilles du tabac et aux pesticides (largement utilisés dans la culture du tabac). Tabac Actualités n°49, mai 2004

 

Un article paru dans la revue Preventive Medicine dévoile que Philip Morris a confié à une grande entreprise de relations publiques la mission de faire naître le doute sur la crédibilité des travaux de l’Agence américaine de protection de l’environnement, concernant les risques du tabagisme passif. La manipulation des journalistes a été plutôt réussie, puisque un document interne de Philip Morris se félicite des résultats obtenus. Pour consolider ces résultats, le géant du tabac est allé jusqu’à subventionner une école nationale de journalisme, s’assurant ainsi de la teneur des articles à paraître. Tabac actualités Déc. 2004

 

« Entre 1972 et 1994, soit pendant pas moins de 22 ans, la filiale australienne de Philip Morris a sciemment commercialisé des paquets de cigarettes dont les contenus étaient contaminés par des pesticides, y compris des dérivés organochlorés présents à des taux qualifiés par les laboratoires de Philip Morris comme "extrêmement hauts" ». Tabac Actualités janv.2004, n°45

 

Le cigarettier Altadis a confirmé son plan de restructuration qui prévoit 701 suppressions d'emplois en France et la fermeture de quatre sites (Lille, Dijon, Morlaix et Tonneins). L'intersyndicale (CFDT-CGT-FO-Unsa) signale par ailleurs que « le bénéfice net d'Altadis est sans cesse en augmentation, avec 435 millions d'euros en 2002 et 449 millions en 2003 ». AFP 10/3/2004

 

D'après le groupe Altadis, les ventes de cigarettes en France ont chuté en volume de 22,4% pour les blondes et de 29,3% pour les brunes au premier trimestre 2004, par rapport au premier trimestre 2003. AFP 12/5/2004

Selon le Pr Gérard Dubois, président du Comité national de lutte contre le tabagisme, « ce que le géant ne dit pas, c'est que sa production sur le marché mondial ne cesse d'augmenter ». France Soir 13/5/2004

De fait, l'intégration de

la Régie

marocaine des tabacs, la hausse des marques comme Gauloises Blondes à l'international, l’augmentation des ventes de cigares, assurent à Altadis une croissance de son chiffre d'affaire. Les Echos 13/5/2004

 

La Seita

(devenue Altadis) a gagné, devant le tribunal de grande instance de Béthune, un procès intenté par un fumeur atteint d'un cancer du poumon. Le tribunal a en effet débouté le fumeur « de toutes ses demandes fondées sur la mise en cause de

la Seita

pour défaut d'information contractuelle ».

Avec ce nouveau jugement, Altadis estime désormais bénéficier d'une « jurisprudence constante ». Le tribunal a en effet considéré que

la Seita

, établissement public sous tutelle de l'Etat jusqu'en 1995, « ne pouvait procéder à une information sanitaire qui ne relevait que de la seule initiative des autorités publiques ». AFP 29/9/2004

 

 

* alcool

* déboires, * marketing * aspects économiques et politiques * divers

 

* déboires

De l’enquête Escapad réalisée par l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies, auprès de 15 000 jeunes de 17 à 18 ans (lors de la journée d'appel et de préparation à la défense), il ressort que la consommation régulière d'alcool est en nette hausse chez les jeunes de 17 à 18 ans, tout comme l'usage de médicaments psychotropes. AFP 5/10/2004

En somme, « l'alcool reste la première drogue utilisée par les jeunes ». On peut s’étonner qu'en France avec cinq millions de consommateurs excessifs et 2 millions d'alcooliques, « aucune mesure autoritaire ne semble envisagée comme ce fut le cas récemment pour le tabac ». L’Humanité 5/10/2004

« Nous devons réfléchir au problème de la disponibilité de l'alcool dans les stations service. Et nous nous étonnons du prix étonnamment bon marché de certaines boissons alcoolisées dans les bars, alors que les sodas et jus de fruits sont plus chers », estime le Pr Parquet. France Soir 5/10/2004

Pour Didier Jayle, président de

la MILDT

, « la tâche est ardue dans un pays où le poids du lobby des producteurs et la tradition culturelle sont si forts ». « Il faut que nous réfléchissions à des mesures qui baisseraient l'accessibilité à l'alcool pour les jeunes, en renforçant par exemple la lutte contre le sponsoring dans les soirées étudiantes ».

Pour le Pr Claude Got « on a dévalorisé le tabac ; on commence à dévaloriser le cannabis - en disant par exemple qu'il y a trois fois plus de goudrons dans un joint que dans une cigarette - mais en France l'alcool reste socialement valorisé ». Le Parisien 5/10/2004

 

« La moto, la jeunesse et la nuit viennent s'ajouter à l'alcool et à la vitesse comme principaux facteurs de mortalité ». « L'alcool est présent dans 9,4% des accidents corporels et dans 31,1% des accidents mortels ». « C'est le week-end que le nombre de tués est le plus élevé. Et c'est dans les nuits de vendredi à samedi et de samedi à dimanche, entre 4h et 6h du matin, que les accidents sont les plus graves ». AFP 19/5/2004

 

La France

caracole en tête des pays européens pour la mortalité masculine prématurée liée à une consommation excessive d'alcool, avec, au total, 45 000 décès par an. AFP 30/4/2004

 

En France, 45 000 décès par an sont attribués à l'alcool, dont 16 000 par cancer, 7600 par maladies cardio-vasculaires et plus de 8000 par maladies digestives. L'alcool est à l'origine de 7000 accidents mortels ; il est impliqué dans 50% des rixes, 50 à 60% des actes de criminalité, 20% des délits et 10 à 20% des accidents du travail.

La Croix

13/12/2004

 

Dans les entreprises, 5 à 10% des salariés sont en proie à un problème d'alcoolisme, avec un absentéisme trois fois plus élevé que la moyenne. Les Echos 15/7/2004

 

Une enquête, menée par

la Direction

générale de la santé et l'administration pénitentiaire dans 23 établissements pénitentiaires représentatifs de la population carcérale, montre que 38% des détenus incarcérés depuis moins de six mois présentent une dépendance aux substances illicites et 30% une dépendance à l'alcool.

Elle montre également que huit hommes détenus sur dix et plus de sept femmes sur dix présentent au moins un trouble psychiatrique et que la grande majorité en cumule plusieurs. AFP 8/12/2004

 

En Grande-Bretagne, le "binge drinking" consiste à « boire méthodiquement avec pour but principal, sinon unique, de terminer la soirée ivre mort ». AFP 20/8/2004

 

« Aujourd'hui on sait que l'alcool, même à faible dose, est toxique pour l'enfant à naître et surtout pour son cerveau ». L'alcool, en effet, franchit le placenta et passe dans le sang du fœtus qui n'a pas encore un foie capable de l’éliminer.

En France, chaque année, 7 000 enfants (soit un nouveau né sur 100) naissent atteints de Syndrome d'alcoolisation fœtale (bébé plus petit que la moyenne, retard de croissance, malformations). Santé Magazine 14/5/2004

 

En cas d’alcoolisation d’une femme enceinte, le taux d'alcoolémie devient plus important chez le fœtus que chez la mère. L'alcool gêne et tue des cellules. Ce qui peut avoir des conséquences sur le cœur, la colonne vertébrale, l'œil, le cerveau. Or ces lésions sont 100% irréversibles et aussi 100% évitables. L'Humanité 20/9/2004

 

* marketing

Selon un responsable de

la Fédération

française des spiritueux, les ventes de Prémix (mélange alcool/soda) « ont augmenté de façon importante », ces dernières années. Les autorités ont décidé d'affronter ce problème en taxant ces boissons. Les producteurs contournent l'actuelle législation (qui taxe les Prémix depuis 1996), en mélangeant alcool et boisson « à base de bière » - et non plus soda - (ce qui permet de ne plus tomber sous l'appellation "Prémix"). Le directeur de la communication d'Interbrew déplore une taxation qui « pénalise les boissons innovantes » ; « les vins par exemple ne sont pas concernés, parce que l'on sait que le lobby vinicole pèse très lourd dans notre pays ». AFP 16/4/2004

 

Pour les viticulteurs, les jeunes raffolent un peu trop de cocktails alcoolisés ou de bières en soirée, alors qu'eux-mêmes « cherchent en vain à séduire cette clientèle ». Leur « lobbying sans relâche auprès de la classe politique pour favoriser la consommation du vin au détriment des autres alcools » ne leur garantit pas que les jeunes délaisseront les Prémix au profit d'un verre de vin.

La Tribune

19/4/2004

 

Les marques de bière veulent séduire les jeunes et, pour cela, « multiplient les stratégies d'infiltration dans les lieux de consommation ». « Les brasseurs testent de nouveaux concepts destinés aux jeunes et censés leur ouvrir les portes de lieux plus tendance », l'idée étant de « créer l'événement puis de favoriser la notoriété de la marque par le bouche à oreille », selon le « principe du marketing viral ». Pour séduire, ces boissons soignent leur look. Ainsi, une nouvelle bière à la cerise, lancée en partenariat avec une marque de lingerie, « s'habille en rouge sexy » et vise « la nouvelle cible des brasseurs : les femmes ». Le Monde 20-21/6/2004

 

Avec les boissons de l'été 2004 à la cerise, à la vanille ou à la caféïne, « la modération s'impose ». L'énergy coca, de Pepsi, par exemple, contient deux fois plus de caféine ; la firme le présente comme un "concentré d'Xtase", pour séduire les 15-25 ans. Parmi les nouvelles bières, on trouve Boomerang, "boisson hybride, brassée et alcoolisée comme une pression faite avec du malt", mais "plus sucrée et bourrée d'arômes de citron". Le directeur du marketing précise « trop longtemps on s'est laissé doubler dans les bars et les boîtes, par le whisky, la vodka ou le gin ». La bière à la cerise, recouverte selon le brasseur, d'une matière « sensuelle » rouge vinyle « rappelle les produits de maquillage », le pastis « passe au prêt à boire », le panaché « se fait vanillé », et la vodka « se caramélise ». Le Parisien 19/6/2004

 

« Le vin fait les yeux doux aux femmes » : producteurs et cavistes « multiplient les initiatives plus parlantes pour un public féminin, cherchant des goûts, des noms, des clefs d'entrée mieux adaptées ». Pour le directeur de l'Afivin (agence d'information sur le vin), les femmes « représentent un gisement que chacun espère capter […] d'autant que leur comportement a évolué et qu'elles commencent à entrer dans une relation plus décomplexée par rapport au vin ». Elles sont à l'origine des trois quarts des achats réalisés dans les rayons des super marchés. Les Echos 22/9/2004

 

Depuis plus d'un an « le cognac fait un tabac chez les jeunes Noirs américains », qui « ingurgitent à eux seuls 85% » des 44,5 millions de bouteilles vendues aux Etats-Unis. Pour arriver à ce résultat, LVMH, Courvoisier, Rémy Martin et Pernod Ricard « ont carrément transformé en VRP les groupes de rap américains ». Le Canard Enchaîné 22/9/2004

 

Une société spécialisée dans les cadeaux d'affaire propose une "boisson à base de vin désalcoolisé" (0,3°). Les raisins sont d'abord vinifiés selon les méthodes traditionnelles, puis le vin est refroidi à -30° pour être désalcoolisé. Le producteur alsacien assure que grâce à cette technique le vin « conserve ses principes physiologiques ». L’Express 6/9/2004

 

* aspects économiques et politiques

Les vignes françaises occupent 3,2% des surfaces agricoles. La viticulture compte 239 500 actifs dont 51 600 salariés permanents.

La Croix

 21/7/2004

 

La fiscalité du vin est 32 fois moins élevée que celle des alcools forts. 600 000 personnes vivent de la vigne […] soit 600 000 électeurs »… L'Express 29/10/2004

 

Selon le rapport de

la Cour

des Comptes, la lutte contre l'alcoolisme n'a connu « aucune avancée majeure, bien au contraire » au cours de la dernière décennie.

« Les dispositions de la loi Evin, notamment celles concernant la publicité des boissons alcoolisées, ont été atténuées, voire vidées de leur sens, par des amendement ultérieurs ».

La Cour

rappelle que l'alcoolisme est responsable en France « de plus de 10% des décès annuels », avec un « coût social estimé à 15 milliards d'euros, soit 1% du PIB ». AFP 5/2/2004

 

Gros plan sur « des parlementaires de la vigne très influents », élus de Bourgogne, de la région de Bordeaux, des Côtes du Rhône, du Pays de Loire ou de Champagne. L'ANEV (Association nationale des élus de la vigne et du vin) regroupe plus de 100 députés et sénateurs et 400 élus locaux de régions viticoles. Elle « joue un rôle très actif au Parlement » dans l'élaboration des textes concernant la viticulture et la lutte contre l'alcoolisme, ainsi que dans « la défense d'une spécificité de la culture française envisagée sous l'aspect du terroir viticole et du savoir faire qui y est attaché ». Ces élus ont "fait évoluer la loi Evin" et ont notamment réussi à rétablir l'autorisation de parrainage de manifestations pour les fabricants d'alcool. Leur influence au Parlement a permis également la non adoption d'un amendement visant à interdire la vente d'alcool dans les stations service, le refus de baisser le taux d'alcoolémie à 0,1%, et le rejet d'un texte visant à étiqueter les bouteilles pour avertir des dangers de l'alcool. Le Figaro 14/2/2004

 

En faisant voter un amendement qui dénature la loi Evin, le lobby de la viticulture a remporté une nouvelle victoire parlementaire, après celle de 1994 qui avait vu le rétablissement de l’autorisation de faire de la publicité par affichage. « Les 102 députés qui ont voté ce texte devront assumer la responsabilité de ce vote, ainsi que le gouvernement, qui en s’opposant à ce texte par une simple déclaration de son ministre de la santé, a, de fait, laissé l’initiative parlementaire aller jusqu’à son terme ». http://www.anpaa.asso.fr/html-fr/frameset_agenda-comprendre.html

« La philosophie de la loi Evin consiste à ne pas considérer l'alcool comme un produit de consommation comme les autres » et limite donc sa publicité. Or l'amendement en question « vise à contourner cette réglementation » en permettant comme pour n'importe quel autre produit des « représentations positives : fête, sport, jeunesse, féminité, virilité ».

« L'objectif inavoué des producteurs de vin est de gagner du terrain » pour un jour « pouvoir accéder au graal : la publicité télévisée ». Libération 14/10/2004

D'après Bernard Topuz, médecin et coauteur de Des lobbies contre la santé (Ed. Syros 1997) « cet amendement est tout à fait symptomatique du travail des lobbies » qui « œuvrent habilement dans l'ombre ». Il affirme que si la loi Evin a plutôt bien marché pour le tabac et pas pour l'alcool c'est parce que « l'influence du lobby des cigarettiers a bien moins pesé que celui des alcooliers », qui est « extrêmement puissant au sein du Parlement ».

De nombreux professionnels de santé regrettent que les députés aient « privilégié les intérêts économiques de la filière vitivinicole au détriment des impératifs sanitaires ». Le Monde 15/10/2004

 

Un groupement de viticulteurs de Bordeaux a décidé d'attaquer en justice la campagne publicitaire « terrorisante » lancée par le ministère de la santé contre l'alcoolisme. Ce regroupement d’une centaine de viticulteurs, dénonce « une photographie qui associe un verre de vin rouge, un sablier contenant un liquide couleur sang, et un message : "jour après jour votre corps enregistre chaque verre que vous buvez" ». Plus de 500 viticulteurs ont signé une pétition contre cette campagne qui « tend à vouloir détruire un secteur économique qui depuis l'époque romaine a été fondateur de la civilisation occidentale ». AFP 23/11/2004

 

L'Académie du vin de France, qui « rassemble les grands noms de la viticulture française », s'insurge contre les campagnes anti-alcooliques et « les coups de boutoirs de l'Etat français » qui « diabolisent le vin de France en oubliant sa dimension culturelle ». Après les viticulteurs de Bordeaux qui ont décidé d'attaquer en justice la campagne anti alcool du ministère de la santé, l'Académie dénonce à son tour cette campagne. AFP 25/11/2004

 

Des milliers de viticulteurs sont descendus dans la rue « pour exprimer leur exaspération face aux campagnes médiatiques contre le vin et réclamer un plan gouvernemental contre la crise du secteur due notamment à la surproduction mondiale et à la baisse de la consommation en France ». Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture, a annoncé la mise en place d'un "Conseil de la modération", dont l'objectif sera de trouver le moyen de faire la promotion du vin.

Les viticulteurs, qui souffrent de la concurrence des vins du nouveau monde et de la baisse de la consommation, sont excédés par la campagne de prévention du ministère de la santé « suggérant que le vin pouvait entraîner le cancer » ; ils exigent que le Premier ministre n'entrave pas l'assouplissement de la loi Evin sur la publicité. AFP 9/12/2004

 

Alain Rigaud, président de l'Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie, estime pour sa part que le lobby « fait de la désinformation car la loi actuelle autorise la publicité pour le vin ». L'ANPAA juge « inutile », un assouplissement de la loi « pour communiquer sur la qualité des produits » et rappelle que la publicité faisant référence aux terroirs est parfaitement licite. AFP 13/12/2004

 

« Le retour de la publicité sur le vin est une réponse décalée et dérisoire au malaise du milieu viti-vinicole français » car « elle ne pourrait avoir au mieux un effet que sur les consommateurs nationaux alors que le problème des viticulteurs est lié à l'exportation ». Au niveau mondial le vin n'est pas un secteur en crise. Face à la concurrence mondiale dont il est l’objet, « la réponse française se traduit par une guerre interne entre filières, entre segments de la viticulture », mais « il n'y a pas de réponse collective, à l'exception des pressions pour le retour de la publicité sur le vin en France, qui ne règlera rien ». Le Monde 14/12/2004

 

* divers

L'éthylotest antidémarreur, baptisé Alcolock empêche le démarrage du véhicule si son conducteur présente un taux d'alcoolémie supérieur à une limite fixée. Le Parisien 19/1/2004

 

L'Irlande détient le record d'Europe en matière de consommation d’alcool. Les plus touchés sont les hommes jeunes. Les moins de 30 ans reconnaissent consacrer près de 10% de leur revenu pour acheter de l'alcool (contre moins de 2% pour les Suédois). AFP 26/4/2004

 

Face à l'augmentation de la consommation d'alcool dans les pays nordiques, les chefs des gouvernements suédois, danois, finlandais, norvégiens et islandais ont annoncé qu'ils allaient faire pression ensemble, pour que l'UE adopte une politique efficace de lutte contre la consommation d'alcool, en augmentant les taxes sur l'alcool et en baissant les quotas d'alcool autorisés à l'importation.

La Croix

3/11/2004

Un nombre croissant des ressortissants de ces pays vont, en effet, s'approvisionner dans d'autres pays de l'UE où l'alcool est moins cher. AFP 2/11/2004

 

 

* cannabis

Les "doubles-fumeurs" (tabac et cannabis) « ont, à quantités égales, un risque plus élevé de cancer bronchique que les simples fumeurs de tabac. Ceci est notamment dû aux fortes teneurs en goudron d’un "joint", 50mg (contre 20 mg pour une cigarette de tabac pur) qui s’ajoute au fait que la fumée de cannabis est très irritative pour la muqueuse bronchique ». Tabac Actualités juill. 2004

 

La foire internationale du chanvre, aux Pays-bas, a regroupé « 15 000 visiteurs venus de toute l'Europe ». 15 juges y ont départagés les 164 herbes et haschisch néerlandais en compétition. Les 40 000 cultivateurs locaux représenteraient une production d'un demi milliard d'euros : un marché en explosion si l'on considère toute la "filière cannabis" (engrais, coffee shop, marchands de machines…) qui pèserait environ cinq à dix milliards d'euros par an, soit 1 à 2% du PIB hollandais. La foire internationale du chanvre se déroule dans « une ambiance à mi-chemin entre salon du bricolage et salon du racolage, au milieu d'une futuriste ruée vers l'or vert ». Libération 24/2/2004

 

D’après le Baromètre santé 2000 des 12-25 ans, publié par l'Institut national de prévention et d'éducation à la santé (INPES), si environ 40% des jeunes disent avoir déjà consommé du cannabis, 70% ne sont "pas du tout" ou "plutôt pas d'accord" avec une éventuelle mise en vente libre des "drogues douces". AFP 28/6/2004

 

Selon l'enquête ESPAD, « à 18 ans, 21% des garçons et 7% des filles fument plus de dix joints par mois. A ce même âge, deux garçons sur trois (66%), et plus d'une fille sur deux (52%) y ont déjà goûté ». France Soir 14/4/2004

« En dix ans le nombre d'adolescents ayant goûté au cannabis a doublé, et le taux de consommation régulière est au même niveau que celui de l'alcool ». Selon l'enquête, la consommation, très faible à 12-13 ans, augmente nettement à partir de 14 ans. Les substances illicites autres que le cannabis sont peu consommées (moins de 5% pour les amphétamines, le LSD, la cocaïne et l'ecstasy).

D'après l'enquête, 10% des garçons de 16 ans consomment régulièrement de l'alcool et 9% du cannabis, contre respectivement 4% et 5% des filles. Le Monde 15/4/2004

 

Selon le rapport annuel de l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies, environ trois millions d'Européens fument chaque jour du cannabis, et les demandes de traitement ne cessent d'augmenter dans l'Union européenne. Le rapport souligne que « la culture en intérieur se pratique désormais dans la plupart, voire la totalité des pays européens », avec des techniques permettant d'obtenir des concentrations « deux à trois fois supérieures » à celles que l'on trouve sur le marché. AFP 26/11/2004

 

La société GW Pharmaceuticals a franchi la première étape pour l'approbation, au Canada, du premier médicament anti-douleur à base de cannabis, le "Sativex". "L'avis de conformité" qu’elle a obtenu de la part de l'agence de santé canadienne constitue, en effet, la première étape d'autorisation de mise sur le marché. L'autorisation définitive pourrait intervenir dans les prochains mois. AFP 22/12/2004

L'indication retenue par l'agence sanitaire canadienne est la douleur des patients atteints de sclérose en plaque. Si les agences sanitaires françaises et britanniques tirent les même conclusions des études cliniques, le premier spray à base de haschisch pourrait arriver sur les tables de chevet des patients français dans le courant de l'année. Le directeur médical de GW Pharmaceuticals déclare : « Maintenant les patients européens ne pourront pas admettre qu'un médicament soit jugé bon pour les Canadiens et non pour les Européens ».

Le marché de la douleur neurologique est porteur : en Europe 200 000 personnes souffrent de sclérose en plaque. Le Parisien 22/12/2004

 

 

* médicaments

« Les remboursements de médicaments pèsent pour quelque 15 milliards d'euros dans les comptes de l'assurance-maladie. La pression de l'industrie sur les médecins ne relève pas du fantasme, tout comme la tendance à "médicaliser" les problèmes sociaux (stress au travail, personnes âgées dans certaines maisons de retraite...) ». Le Monde Diplomatique juill. 2004

 

« L’abus de médicaments nuit à la santé… et à

la Sécu

: chaque année, 130 000 personnes, le plus souvent âgées, passent 1,2 million de journées à l’hôpital parce qu’elles sont victimes d’"effets indésirables" ou ont avalé des pilules incompatibles avec leur état de santé ». Marianne 7/6/2004

 

« 17 à 20% des cadres se doperaient, et un étudiant sur cinq aurait recours à des petites pilules avant les examens ». « 30% des filles de 17 ans (12% des garçons) auraient déjà consommé des médicaments psychotropes ». L'Express 1/3/2004

 

La prise de médicaments multiplie les risques d'accident de deux à cinq fois. 10% des blessés ou des tués seraient sous l'influence d'un psychotrope. Libération 14/2/2004

« Près de 7% des accidents de la route graves ou mortels, pourraient être dus à la prise de médicaments » : sur les 7 000 médicaments commercialisés en France, près de 1 500 sont susceptibles d'altérer les capacités de conduite. Femme actuelle 5/4/2004

 

« Chaque année, les accidents d’origine médicamenteuse, dits "iatrogènes", envoient 130 000 personnes à l’hôpital (8,4% des hospitalisations). En 2002, ils ont coûté à

la Sécu

la bagatelle de 335 millions d’euros.

La prise de médicaments à tort et à travers peut fausser l’interprétation de certains résultats biologiques, entraîner des intolérances et des allergies parfois graves, voire aggraver la maladie que l’on croit soigner ». Viva, mai 2004, p29

 

« En janvier 2003,

la Caisse Nationale

d’Assurance Maladie (CNAM) a publié une étude sur la délivrance de onze associations médicamenteuses pourtant formellement contre-indiquées. En passant au crible toutes les ordonnances délivrées par les médecins en 2000 (300 millions au total),

la CNAM

en a détecté 58 823 qui comportaient au moins une de ces associations dangereuses ». Viva, mai 2004, p30

 

Jusqu'en 2003, le dictionnaire Vidal (élaboré à partir d'informations officielles sur les médicaments) était livré avec un fascicule consacré aux interactions à risques entre médicaments. La mise à jour de ce fascicule était assurée par un groupe de travail spécifique de l'Agence française du médicament (Afssaps). L'éditeur du dictionnaire Vidal a annoncé que son édition 2004 ne comporterait pas de fascicule "interactions". Celui-ci aurait été supprimé sous la pression des firmes pharmaceutiques. Prescrire n°248, mars 2004, p161

 

Selon

la Food

and Drug Administration (FDA), l'utilisation de l'anti-inflammatoire Vioxx, retiré du marché mondial par son fabricant Merck, en septembre 2004, pourrait avoir provoqué, aux Etats-Unis, 27 785 infarctus du myocarde ou décès par crise cardiaque, entre 1999 et 2003. Le Figaro 4/11/2004

Le Vioxx (prescrit, notamment, aux personnes souffrant de douleurs inflammatoires et/ou rhumatismales) a été une véritable poule aux œufs d'or pour le groupe Merck. En France, cet anti-inflammatoire figurait dans la liste des dix médicaments les plus prescrits, pour l'année 2003.

Le mensuel indépendant Prescrire n'a eu de cesse de mettre en garde contre l'engouement savamment orchestré pour ces nouveaux médicaments complaisamment présentés comme des anti-inflammatoires révolutionnaires. « Il suffisait d'examiner objectivement les données disponibles pour prédire le fiasco et pour éviter d'exposer les malades à des effets indésirables sans bénéfice réel », écrit Prescrire de novembre.

 

« Les Français détiennent le record européen de la consommation de psychotropes : médicaments contre l’insomnie (hypnotiques), contre l’anxiété (anxiolytiques), contre la dépression (antidépresseurs), etc. ». « Une personne sur quatre prend un psychotrope au moins une fois pas an, et une sur dix en consomme régulièrement ».

« La consommation de psychotropes concerne 55% des femmes et 33% des hommes après 70 ans ! Un phénomène préoccupant, car ces médicaments sont responsables de nombreuses chutes accidentelles (20 à 30% des chutes des personnes âgées). Ils présentent également d’autres risques : la dépendance, qui rend difficile l’arrêt du traitement, la baisse de la vigilance (sur la route, au travail), les troubles de la mémoire… ; et les psychotropes peuvent être contre-indiqués en association avec d’autres traitements. Les interactions médicamenteuses sont la cause de nombreuses hospitalisations chaque année ». Assurance maladie La lettre aux assurés janv.-fév. 2004

 

La prescription de "pilules du bonheur" n'a jamais été aussi importante en France, et « la tendance ne semble pas près de s'inverser ». Claude Le Pen, économiste de la santé, explique que

la France

se distinguait auparavant par sa surconsommation d'alcool, et que « la courbe de la consommation de psychotropes croît à mesure que décroît la courbe de la consommation d'alcool ». D’ailleurs, « on consomme moins de psychotropes dans l'ouest de

la France

, une région où l'alcoolisme est justement plus développé ». Le Monde 2 10/12/2004

 

« Les gens fatigués, déprimés, anxieux, ont longtemps accepté leur état ou le mettaient sur le compte d’une "condition humaine" souffrante par nature. Puis la médecine a prétendu leur apporter une réponse et les gens se sont tournés vers elle pour trouver une aide. Dans le même temps, à la fin des années 1950, la recherche scientifique a inventé la chimiothérapie du cerveau, avec les premiers neuroleptiques. Dans les années 1970, sont arrivés les anxiolytiques et, enfin, dans les années 1980, les antidépresseurs. Au fil du temps, ces traitements se sont banalisés ». Le Monde 2 11/12/2004

« On assiste en ce moment à un changement qualitatif de l’industrie pharmaceutique. Il y a eu, dans les années 1990, toute une série d’avancées dans tous les domaines de la recherche, mais aujourd’hui, on trouve moins de nouveaux médicaments. De plus, les laboratoires vivent la pression que subit l’ensemble de l’activité industrielle : la financiarisation de la vie industrielle l’a rendue spéculative. La valeur de l’entreprise et la rémunération de ses dirigeants dépendent plus de sa capitalisation boursière que des qualités du produit. Pour soutenir les cours, le PDG soit sans cesse produire des effets d’annonce plus ou moins justifiés ». Le Monde 2 11/12/2004

 

« Vous allez chez votre médecin en disant que cela ne va pas. Il vous donne un antidépresseur. Deux semaines plus tard, vous retournez le voir, cela va mieux. Il en conclura que vous étiez déprimé. C’est la référence aux critères du traitement qui devient le critère de la maladie ». Le Monde 2 11/12/2004

 

Selon l'agence américaine du médicament, les antidépresseurs « favoriseraient des tendances suicidaires en début de traitement, surtout chez les jeunes ». Sous la pression de parents confrontés au suicide de leur enfant,

la FDA

a exhorté les fabricants de certains antidépresseurs (dont Prozac, Zoloft et Deroxat) à indiquer la nécessité d’une surveillance en début du traitement.

L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé indique, pour sa part, que « l'on connaît depuis quinze ans, dès la mise sur le marché du Prozac, la possibilité de suicide violent ou de réaction agressive au début du traitement » et qu'en France de telles recommandations figurent déjà sur les notices. Le Figaro 24/3/2004

 

« Faut-il interdire la quasi-totalité des antidépresseurs chez les enfants et les adolescents de moins de 18 ans ? C’est la question que l’on peut se poser à la lecture d’une vaste analyse parue le 24 avril 2004 dans la revue médicale britannique The Lancet, évaluant l’efficacité et les effets secondaires des antidépresseurs chez l’enfant. Cet article révèle que des essais non publiés par l'industrie pharmaceutique mettaient en évidence des risques supérieurs aux bénéfices, alors que les essais rendus publics étaient plutôt favorables aux médicaments ». Le Figaro 4/5/2004

 

Selon une étude rétrospective de

la CNAM

, 90% des patients ont reçu un traitement de Subutex conforme aux recommandations des experts, mais 10% ont dépassé les doses maximales recommandées (soit 16mg par jour). « La moitié des patients dépassant les doses maximales consultaient plus de trois médecins ». Face à ce constat,

la CNAM

« veut développer le contrôle des consommateurs suspects d'abus ou d'usage détourné ». AFP 9/4/2004

 

Une étude de

la CNAM

, rapporte qu'en France la consommation de psychotropes occupe la deuxième position derrière celle des antalgiques, avec, d'années en années, des prescriptions qui progressent (+ 8,2% pour le Deroxat entre 2002 et 2003, et + 6,9% pour le Temesta). Les anxiolytiques sont les médicaments les plus prescrits, suivis par les antidépresseurs qui devancent désormais les hypnotiques. Les consommateurs réguliers représentent 11,2% des assurés sociaux (régime général) ; les femmes consomment bien davantage que les hommes (31,3% contre 17,3%) et les personnes âgées. « Une partie importante de ces prescriptions apparaît abusive et médicalement injustifiée ». Ainsi, selon l'Assurance maladie, « le taux de consommateurs d'antidépresseurs (9,7%) est bien supérieur au taux de prévalence de la dépression (4,7%) », la durée de prescription est, pour la moitié des utilisateurs, « non-conforme à l'AMM » (autorisation de mise sur le marché) et le niveau de consommation des personnes âgées est « préoccupant », en raison de possibles effets secondaires comme les chutes ou les troubles confusionnels. « Pendant ce temps, l'industrie pharmaceutique tente d'élargir le marché », avec, selon Philippe Pignarre, auteur de Comment la dépression est devenue une épidémie, une « dernière niche à conquérir : celle des enfants et des adolescents ». Le Monde 7/8/2004

 

Edouard Zarifian, Pr de psychiatrie et de psychologie médicale, explique le niveau élevé de la consommation de psychotropes en France par :

- une industrie pharmaceutique qui veut « vendre sans cesse davantage »,

- un prescripteur qui « n'a rien d'autre à proposer à des patients qui viennent lui exposer un malaise social »,

- un usager qui « a besoin d'une reconnaissance immédiate de sa souffrance, qui est soulagée par la légitimité du diagnostic médical »,

- le tout dans « un contexte où il n'y a pas de discours officiel sur le médicament ».

Pour le Pr Zarifian, « le psychotrope a cessé d'être un médicament pour devenir un produit à traiter les malheurs de la société ». Le Monde 7/8/2004

 

Guy Hugnet, ancien cadre de l'industrie pharmaceutique et auteur de Antidépresseurs, la grande intoxication, « remet en cause l'efficacité des antidépresseurs les plus courants et dénonce la désinformation des médecins et du grand public à propos de ces psychotropes ». Selon lui, aujourd'hui, « 90% des diagnostics de dépression sont effectués par des médecins généralistes », et la seule information dont ils disposent en ce qui concerne ces médicaments « provient des firmes pharmaceutiques qui leur envoient des visiteurs médicaux, organisent des congrès et financent la quasi-totalité des revues médicales ». Il assure que dans ces congrès et dans ces revues, « d'éminents scientifiques (dont les recherches sont payées par les fabricants d'IRS - Inhibiteurs de

la Recapture

de Sérotonine - répandent l'idée que la dépression est sous-traitée ». « Face à ces discours qu'ils n'ont aucun moyen de contredire, les médecins généralistes prescrivent donc de plus en plus d'antidépresseurs ». Le Figaro 5/11/2004

 

Une vaste étude incluant 125 203 sujets âgés montrent que les benzodiazépines (BZD), largement prescrites chez les personnes âgées, entraînent un risque accru de fracture de la hanche. Arch Int Med 2004; 164: 1479-1484 & http://www.jim.fr

 

C’est d’abord un souci écologique qui a poussé à la mise en place d’un système de recyclage des médicaments non utilisés. Le décret du 1er janvier 1993, qui donna naissance à "Cyclamed", obligeait en effet les industriels « à pourvoir ou à contribuer à l’élimination des déchets d’emballages ménagers des produits qu’ils mettent sur le marché ». Les déchets liés aux médicaments représentent 0,3% des déchets ménagers et 1% des déchets d’emballages ménagers, soit 70 000 tonnes. Mais bientôt, au-delà de ces considérations écologiques, Cyclamed devint le cœur d’une opération humanitaire. « Rapporter ses médicaments non utilisés à son pharmacien […] c’est permettre aux organisations humanitaires d’intensifier leurs collectes pour les plus démunis en France, pour le Quart Monde, ou à l’étranger », rappelle le site internet de Cyclamed.

Certains pharmaciens, toutefois, n’ont pas hésité à revendre les produits rapportés à leurs officines. http://www.jim.fr 10/9/2004

 

 

* dopage

L'ancien coureur cycliste espagnol Jesus Manzano a fait des révélations sur les pratiques du dopage qu'il dit avoir connues. Il affirme notamment qu’il y a « open bar » pour les hormones de croissance et qu’« on t'injecte de l'EPO presque tous les jours ». Il évoque aussi la possibilité de contourner les tests sanguins inopinés pratiqués le matin des courses par les contrôleurs de l'UCI : « tu as toujours un temps mort d'une demie heure entre l'arrivée des commissaires et le contrôle. Les coureurs qui savent qu'ils ont des valeurs basses se font contrôler en premier. C'est une pratique courante pour gagner du temps […] ceux qui ont des valeurs hautes s'injectent de l'albumine humaine au sérum glucosé et peuvent se faire ensuite contrôler ». AFP 26/4/2004

 

Le tétrahydrogestrinone s’obtient en modifiant la formule chimique de la gestrinone, un médicament. « On y ajoute quatre atomes d’hydrogène pour le rendre indécelable », explique Jean-Pierre de Mondenard, auteur du Dictionnaire du dopage. « Le THG devait permettre à l’athlète de ne pas plonger dans une phase dépressive après l’arrêt, en vue de la compétition, d’une cure d’anabolisants interdits ». Ses effets secondaires spécifiques restent mal connus, mais à l’instar des autres stéroïdes, il entraîne probablement des dysfonctionnements du foie et du cœur, ainsi qu’un dérèglement hormonal important. http://www.jim.fr

 

« Les stéroïdes anabolisants androgéniques sont des dérivés synthétiques de la testostérone dont l’usage, tant légal qu’illégal, est en constante augmentation non seulement parce qu’ils améliorent le profil musculaire mais aussi parce que libido et effets du vieillissement semblent en profiter ». 24/3/2004 http://www.jim.fr

 

« L'arsenal dopant ne cesse de se développer » : aux amphétamines et aux stéroïdes anabolisants s'ajoutent l'EPO et les hormones de croissance. On attend de nouvelles EPO encore plus difficilement décelables, voire des molécules de synthèse pour simuler son efficacité. De nouvelles molécules stimulant la production naturelle des hormones de croissance sont également à l'étude. L'Express 27/4/2004

 

Le "dopage génétique" à l'érythropoïétine (EPO), une hormone protéique stimulant la prolifération des globules rouges, est désormais détectable chez les singes. « Depuis des années, on prédisait que les injections de la protéine EPO seraient remplacées par le transfert du gène de l'EPO dans les cellules de l'athlète ». Mais la protéine dont la production est commandée par le gène (introduit dans l'organisme) est différente de l'hormone naturelle.

La Croix

12/8/2004

« La découverte des différences de structure entre l'EPO naturellement produite par l'organisme et celle produite au terme de l'injection du gène correspondant ouvre la voie à une détection possible d'un usage génétique frauduleux de cette hormone ». Le Monde 19/8/2004

 

Selon Ecoute Dopage « beaucoup de jeunes achètent sur internet ou dans les salles de sports des compléments alimentaires mélangés à des produits dopants […] et se retrouvent parfois dopés à l'insu de leur plein gré ». La créatine est interdite de vente mais pas de consommation ; l'abus de caféïne en intraveineuse bat son plein, ainsi que la « surconsommation de médicaments par les non sportifs pour "tenir au travail" et dans la vie quotidienne ». Canard Enchaîné 15/4/2004

 

« Le sportif est considéré comme une machine à performer. Il faudrait le regarder autrement, dans sa globalité d'être humain… ». Le Figaro 18/2/2004

 

William Gasparini, sociologue, se demande si les conduites à risque des cyclistes, relèvent de la « déviance » ou de la « conformité excessive aux normes de dépassement de soi ». « Les sportifs de haut niveau, consommateurs de produits dopants, ne seraient que la partie visible […] d'une nouvelle économie libérale du corps qui touche d'autres univers et d'autres publics ». Dans un univers où l’on valorise les entrepreneurs et l'action d'entreprendre, chacun doit « produire des résultats avec des moyens licites ou illicites ». La prise de substances dopantes traduirait une sorte « de rapport libéral au corps » qui ne « s'accommode d'aucune entrave, notamment celle émanant de l'Etat et de ses politiques de santé publique ». Le sport, en somme, reste « un fabuleux révélateur de nos sociétés post industrielles » et contient « toutes les caractéristiques […] de la société qui le produit ». L'Humanité 15/7/2004

 

Selon Isabelle Queval, philosophe et ancienne athlète, « la condamnation du dopage chez les sportifs occulte la question plus généralisée du "dopage" quotidien encouragé chez le citoyen, qui exige une performance de chaque instant, que ce soit dans le cadre de son travail ou de ses prestations diverses ». Le Figaro 30/8/2004

 

 

* autres drogues

L’ecstasy ou MDMA (Méthylène-dioxy-métamphétamine), molécule synthétique appartenant à la famille des amphétamines est une drogue illégale connue pour ses vertus euphorisantes. Des scientifiques américains ont obtenu de l’Agence américaine du médicament (FDA) l’autorisation de mener une étude pilote (qui commencera au printemps 2005) pour évaluer l’effet de cette substance sur les manifestions anxiogènes du cancer (peur, idées suicidaires, etc.). http://www.jim.fr 29/12/2004

 

D’après le rapport publié par le bureau des Nations unies contre la drogue et le crime (UNODC), quelque 185 millions de personnes prenaient des stupéfiants dans le monde en 2003, contre 180 millions dans les années 90, le cannabis étant la drogue la plus répandue (150 millions de consommateurs). « L'usage de stupéfiant touche moins de 5% de la population mondiale » entre 15 et 64 ans, « alors que le tabagisme en affecte près de 30% ». AFP 28/6/2004

 

En France, la consommation d'héroïne « revient en force depuis deux ans auprès d'une nouvelle génération d'usagers », notamment chez les adeptes de free parties et de musique techno. Ceux-ci « l'utilisent comme un "extra" pour amortir les effets dépresseurs de l'ecstasy ou de la cocaïne ».

La consommation d'héroïne a régulièrement baissé depuis la diffusion massive des produits de substitution, et les prix ont chuté jusqu'à redevenir attractifs. Par ailleurs l'image de cette drogue s'est améliorée, notamment dans le milieu festif, où elle est absorbée par voie nasale ou fumée par une génération d'usagers plus jeunes et déjà habitués à consommer des produits stimulants ou hallucinogènes. Rares sont ceux qui prennent le produit par voie intraveineuse (pratique très stigmatisée dans le milieu techno). D'après un rapport 2002 de l'OFDT, ce rejet de l'injection « favorise le caractère plus anodin de la prise d'héroïne ». Le Monde 19/4/2004

 

« Depuis vingt ans, le marché de l'héroïne a décliné, remplacé par celui de la cocaïne et du haschish. Le changement des produits a entraîné une vaste restructuration de l'industrie de la drogue ». Celle-ci, à présent, provient d'Amérique du Sud ou d'Europe de l'Est et arrive en France par l'Espagne ou les Pays-bas. Sur le plan du trafic, l’Espagne, présente 2 avantages :

- un avantage géographique, par son ouverture à la façade atlantique, tournée vers l'Amérique du Sud et le Maroc,

- et un avantage juridique, car « les truands savent qu'il vaut mieux prendre huit de prison en Espagne pour trafic, que trente ans en France ».

Si les gros bonnets dirigent les opérations depuis l'Espagne, les « trafiquants des cités remplacent désormais les parrains de la "french connection" ». Les petits dealers des cités se mettent en effet à leur compte, et certains d'entre eux sont devenus des concurrents directs de la pègre "traditionnelle". Les policiers les surnomment les "go fast", pour qualifier leur habitude à utiliser des bolides pour aller s’approvisionner en drogue. Les policiers décrivent aussi leur difficulté à infiltrer ces réseaux de petits caïds, tant l'omerta règne en maître dans les cités. L'un des policiers de la brigade des stup de Marseille avoue : « Nous ne saisissons probablement que 10% des stupéfiants qui circulent sur le marché. Nous vidons une piscine avec une petite cuillère ». Le Figaro 25/12/2004

 

Selon le rapport annuel de l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT), il existe, en Europe, une soixantaine de « salles de shoot » (lieux où les toxicomanes peuvent se droguer légalement). Si, d'après l'OEDT, leurs effets sur les maladies infectieuses ne sont pas démontrés, « elles peuvent aider les groupes les plus marginalisés à bénéficier de soins de santé primaire, à accéder aux services sociaux et de traitement et à diminuer les risques de santé, notamment les overdoses ». Outre leur objectif sanitaire, ces salles « ont pour ambition affichée de diminuer les nuisances pour la population, d'assurer l'ordre public et de contrôler la population toxicomane ». AFP 26/11/2004

 

Les 25 pays membres de l'UE ont trouvé un accord politique pour renforcer les contrôles douaniers sur les précurseurs chimiques utilisés pour fabriquer des drogues synthétiques. AFP 26/11/2004

 

Avec l'élargissement de l’Union européenne, l'Europe partage

2 000 km

de frontières avec

la Russie

, où le trafic de drogues "explose". Le Figaro 26/4/2004  

 

Selon l'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch, la politique draconienne de répression contre les drogués en Russie provoque une explosion des cas de sida en empêchant les services médicaux d'accéder à la partie la plus à risque de la population. AFP 28/4/2004

 

La Pologne

et les Pays Baltes sont des lieux de passage importants de l'opium afghan. En Lituanie et en Estonie, la progression de la consommation d'héroïne est exponentielle, avec un usage problématique de drogues deux fois plus important que chez les Quinze. AFP 13/4/2004

 

Un rapport rendu public par l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC) fait état d'une « augmentation dramatique », en 2004, de la production d'opium en Afghanistan (+ 64%). La culture du pavot s'étend désormais aux 32 provinces de l'Afghanistan, sur

131 000 hectares

pour une valeur estimée à 2,8 milliards de dollars, soit l'équivalent de 61% du PNB.

Ce rapport incite le président Karzai à poursuivre, en 2005, « une campagne significative d'éradication, la poursuite des trafiquants, la lutte contre la corruption officielle et le renforcement des structures de lutte contre la drogue ». Il invite aussi la communauté internationale à augmenter ses efforts tant sur le plan de l'aide économique, qu'en matière judiciaire et militaire, par exemple en multipliant avec l'armée afghane des opérations contre les narco-trafiquants. AFP 19/11/2004

L'opium d'Afghanistan « alimente 80% du marché européen de l'héroïne, et permet aux factions afghanes de survivre et aux potentats locaux d'ignorer le pouvoir central en créant des zones de non droit ». AFP 2/11/2004

 

En Afghanistan, des cultivateurs du Nangharar ont décidé de remplacer les pavots plantés dans leurs champs, par des rosiers destinés à produire de l'huile à parfum. Ils vont commencer à planter 40 000 plants sur dix hectares ; 90 000 boutures supplémentaires seront plantées au printemps 2005. Un hectare de rose produit jusqu'à

800 grammes

d'huile par an qui rapportent 4000 euros après distillation ; un hectare de pavot produit

50 kg

d'opium pur qui peuvent rapporter jusqu'à 10 000 euros. AFP 9/11/2004

 

Kaboul s'est engagé sur un plan global d'éradication des cultures de pavot, avec l'objectif de détruire un quart des champs cette année. Les ONG implantées en Afghanistan se sont inquiétées de cet arrachage qui « va déstabiliser la situation ». La porte parole de la coordination de ces organisations assure que « dans les zones rurales, il n'y a aucun travail disponible en dehors de la culture du pavot ». AFP 2/4/2004

 

L’ONG "Network of European Fondations" (NEF) accuse la politique répressive des Nations Unies contre le trafic de drogues de favoriser le financement du terrorisme. L'ONG estime en effet qu'en interdisant et réprimant le commerce de drogues, les Nations Unies créent un marché noir très rentable pour les trafiquants qui sont souvent liés aux organisations terroristes. AFP 19/3/2004

 

« Dans la "guerre à la drogue" que l'Amérique impose au monde depuis plus de trente ans », juges, procureurs et policiers « sont de plus en plus nombreux à oser prendre la parole contre la tolérance zéro ». Ainsi, l'ancien secrétaire général d'Interpol estime que les problèmes de toxicomanie doivent être traités par les services sociaux, et « pas par la police ». Aux Etats-Unis, des policiers ont créé une association intitulée « les forces de l'ordre contre la prohibition ». Elle compte 2000 membres, dont beaucoup estiment « que seule une légalisation totale de toutes les drogues pourrait permettre d'enrayer leur inexorable expansion ». Selon un ancien haut responsable de la lutte antidrogue à l'ONU, « très peu de membres des services antidrogue américains expriment en privé un quelconque soutien à la guerre à la drogue ». Un ancien agent infiltré des stups du New Jersey considère, quant à lui, que « quand vous arrêtez un dealer vous ne faites que libérer la place pour le suivant ». Libération 25/11/2004

 

En Amérique du sud, des enfants de six à huit ans sont utilisés par des narcotrafiquants dans la transformation de la coca en pâte de base de la cocaïne. Lorsqu’ils écrasent les feuilles dans une fosse de macération, ils sont exposés aux effets nocifs des agents chimiques utilisés. Ils doivent goûter la mixture pour voir si le mélange est correct, et ces essais nuisent à leur santé. AFP 23/6/2004

 

Selon l'agence antidrogue américaine (DEA) « le Mexique est devenu la grande plate forme d'exportation de stupéfiants d'Amérique latine ». C’est notamment le « lieu de passage de 70% de la cocaïne produite en Amérique du Sud ». Les organisations de trafiquants demeurent puissantes, et « sont adeptes de la corruption et de l'intimidation des fonctionnaires ». Libération 7/2/2004

 

Les Etats-Unis veulent renforcer le plan Colombie pour lutter contre la guérilla et éradiquer la drogue. Ce plan, lancé en

2000, a

déjà permis à Bogota de recevoir un appui financier de 2,6 milliards de dollars. Il prévoit la fourniture de 79 hélicoptères pour appuyer les monomoteurs chargés de la fumigation des plantations de coca. AFP 3/5/2004

 

Un prix a été décerné par l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime au groupe Carrefour, pour son action contre la culture de la coca en Colombie. Dans ses 13 enseignes colombiennes, Carrefour commercialise des cœurs de palmiers, du café, des haricots, du sucre de canne et du tissu produits par 3000 familles de paysans locaux ayant renoncé à la culture de la coca, ce qui a généré plus d'un million de dollars en 2003. AFP 25/11/2004

 

« La lutte antidrogue ruine les paysans des sommets andins ». En 2003,

131 000 hectares

de coca et

3 000 hectares

de pavot ont été aspergés de défoliants par l'une des sociétés sous traitante du Pentagone. Les effets du glyphosate, agent actif du défoliant - « soupçonné d'être cancérigène et mis à l'index par le CNRS en France » -, sont dénoncés dans toutes les zones fumigées. Les paysans n’ont guère d’autre choix que d’abandonner leur terre, soit pour tenter leur chance en ville, soit pour aller semer plus loin et plus haut, dans des ravins inaccessibles aux avionnettes. Le plan Colombie accroît ainsi le déplacement forcé et la déforestation… et le trafic continue. Le Figaro 18/5/2004 

 

Des milliers de producteurs de feuilles de coca ont manifesté à Lima (Pérou) pour défendre leurs cultures. Ils demandent l'arrêt des programmes de destruction des plants. Selon eux les cultures de substitution ne donnent pas de résultat car elles ne trouvent pas de marchés. Ils ont défilé aux cris de « nous ne sommes pas des narcos », « la coca n'est pas de la drogue ». AFP 4/5/2004

 

Evo Morales, leader bolivien des cultivateurs de coca, considère que « la feuille de coca, n'est pas la cocaïne. C'est un produit traditionnel consommé dans les Andes depuis des centaines d'années. Une de nos priorités est de lancer une campagne en faveur d'une dépénalisation au niveau international pour qu'on cesse de nous considérer comme des narcotrafiquants. En détruisant les plantations de coca, les militaires sous la pression américaine privent les paysans de leur unique source de revenus. Les pays riches interviennent chez nous alors qu'ils devraient s'attaquer à leur marché intérieur où sont les consommateurs ». Le Figaro 8/5/2004 

 

Une nouvelle variété de plants de coca génétiquement modifiés et permettant de produire une cocaïne beaucoup plus pure a été découverte, dans le nord de

la Colombie. Selon

un toxicologue, « la qualité et le pourcentage de cocaïne qui s'obtient avec cette plante est bien meilleur, entre 97 et 98%, alors que sur une variété de plante plus classique ce taux est de 24 à 25% ».

Le commandant de la police anti narcotique colombienne affirme pour sa part que les trafiquants ont dépensé quelque 150 millions de dollars en recherche pour obtenir ces nouveaux plans et qu'ils tentent aussi de faire développer une variété de coca qui résiste aux herbicides utilisés pour les fumigations aériennes organisées par le gouvernement en collaboration avec les Etats-Unis.

« Les trafiquants ont déjà réussi à réduire la durée des cultures, qui était auparavant de huit mois ». AFP 25/8/2004

 

Selon la presse iranienne la politique de lutte contre la drogue, avec creusement de tranchées le long de la frontière, chars et hélicoptères, mais aussi exécutions, fouet et prison, a échoué. Ce pays compte officiellement 2 millions de toxicomanes (4 millions, selon les experts). Jusqu'à présent le pouvoir considérait les toxicomanes comme des criminels mais la surpopulation des prisons - où, avec les trafiquants, ils représentent 70% des détenus - pousse les autorités à changer d'attitude et à considérer les toxicomanes comme "des criminels qui ont besoin d'être guéris". En fait, les autorités cherchent surtout à débarrasser Téhéran de ses toxicomanes. AFP 13/7/2004

 

La Chine

a exécuté au moins 18 personnes - dont 12 pour trafic de drogues - à la veille de la journée internationale de lutte contre la drogue. Dans la plupart des cas, les condamnés ont été exhibés dans des rassemblements publics avant d'être exécutés. AFP 28/6/2004

 

Le 113, numéro de Drogue alcool tabac info service est désormais remplacé par trois numéros : 0 800.23.13.13 pour les drogues (01 70 23 13 13 depuis un portable), 0 811 91 20 20 pour le cannabis, et 0 811 91 30 30 pour l'alcool. Le Parisien 18/2/2004

 

Un volet a été ajouté à l'enquête européenne ESPAD sur la santé des jeunes, afin de prendre en compte « le thème spécifique de la pornographie » et « d'identifier l'ampleur de leur consommation d'images pornographiques et ses conséquences sur leur vie ». D'après Marie Choquet, directrice de recherche à l'Inserm, « 80% des garçons de 14 à 18 ans et 45% des filles déclarent avoir vu au moins une fois un film X durant les douze derniers mois ». Interrogée sur le profil type du jeune consommateur de pornographie, elle souligne que « les éléments les plus significatifs concernent la consommation d'alcool et la propension au suicide » : « chez les garçons, ceux qui boivent régulièrement de l'alcool sont des spectateurs plus assidus que les autres (34% contre 22% ) », et le constat est le même chez les filles, « le tabac "remplaçant" généralement l'alcool ». Selon l'enquête, « c'est entre 14 et 15 ans que la proportion de jeunes qui "consomment" des films pornographiques augmente le plus, pour se stabiliser ensuite ».

La Croix

 25/11/2004

 

L'obésité et le surpoids pourraient devenir la première cause de mortalité aux Etats-Unis d'ici 2005. En 2000, le tabac a causé 435 000 morts aux Etats-Unis, contre 400 000 morts associés à la mauvaise alimentation et à l'inactivité. AFP 10/3/2004

En France, les pouvoirs publics ont commencé à s’intéresser à ce phénomène avec la mise en place d’une campagne de promotion de l’activité physique.

La chirurgie de l’obésité tend également à se développer rapidement : on comptait 2 000 opérations de ce type en 1995, contre 16 000 aujourd’hui.. http://www.jim.fr

 

En 2003 « les Français ont flambé 30 milliards d'euros » en jeux d'argent. D'après le sénateur François Truçy, auteur d'un rapport sur les jeux de hasard et d'argent, « l'Etat croupier méprise le consommateur […] en occultant le problème des joueurs dépendants », lesquels représentent, 1% de la population totale. Politis, mai 2004

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

On peut se procurer ces nouvelles - ainsi que celles des mois et années précédentes -

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17 février 2008

Les racines de la violence - 12 points

Les racines de la violence - 12 points

Depuis quelques années, il est scientifiquement prouvé que les effets dévastateurs des traumatismes infligés à l'enfant se répercutent inévitablement sur la société. Cette vérité concerne chaque individu pris isolément et devrait - si elle était suffisamment connue - conduire à modifier fondamentalement notre société, et surtout à nous libérer de l'escalade aveugle de la violence. Les points suivants voudraient préciser cette thèse :

1. Tout enfant vient au monde pour s'épanouir, se développer, aimer, exprimer ses besoins et ses sentiments.

2. Pour s'épanouir, l'enfant a besoin du respect et de la protection des adultes, qui le prennent au sérieux, l'aiment et l'aident à s'orienter.

3. Lorsque l'enfant est exploité pour satisfaire les besoins de l'adulte, lorsqu'il est battu, puni, manipulé, négligé, qu'on abuse de lui et qu'on le trompe, sans que jamais un témoin n'intervienne, son intégrité subit une blessure inguérissable.

4. La réaction normale à sa blessure serait la colère et la douleur. Mais, dans la solitude, l'expérience de la douleur lui serait insupportable, et la colère lui est interdite. Il n'a d'autre solution que de réprimer ses sentiments, de refouler le souvenir du traumatisme et d'idéaliser ses agresseurs. Plus tard, il ne sait plus ce qu'on lui a fait.

5. Ces sentiments de colère, d'impuissance, de désespoir, de nostalgie, d'angoisse et de douleur, coupés de leur véritable origine, trouvent malgré tout à s'exprimer au travers d'actes destructeurs, dirigés contre les autres (criminalité, génocide) ou contre soi-même (toxicomanie, alcoolisme, prostitution, troubles psychiques, suicide).

6. Devenu parent, on prend souvent pour victime ses propres enfants, qui ont une fonction de bouc émissaire: persécution pleinement légitimée par notre société, où elle jouit même d'un certain prestige dès lors qu'elle se pare du titre d'éducation. Le drame, c'est que le père ou la mère maltraite son enfant pour ne pas ressentir ce que lui ont fait ses propres parents. Les racines de la future violence sont alors en place.

7. Pour qu'un enfant maltraité ne devienne ni criminel, ni malade mental, il faut qu'il rencontre au moins une fois dans sa vie quelqu'un qui sache pertinemment que ce n'est pas lui, mais son entourage qui est malade. C'est dans cette mesure que la lucidité ou l'absence de lucidité de la société peut aider à sauver la vie ou contribuer à la détruire. Ce sera la responsabilité du personnel d'assistance sociale, des thérapeutes, des enseignants, des psychiatres, des médecins, des fonctionnaires, des infirmières.

8. Jusqu'à présent, la société a soutenu les adultes et accusé les victimes. Elle a été confortée dans son aveuglement par des théories qui, parfaitement conformes aux théories de l'éducation de nos arrière-grands-parents, voient en l'enfant un être sournois, animé de mauvais instincts, fabulateur, qui agresse ses parents innocents ou les désire sexuellement. La vérité, c'est que tout enfant a tendance à se sentir lui-même coupable de la cruauté de ses parents. Les aimant toujours, il les décharge ainsi de leur responsabilité.

9. Depuis quelques années seulement, l'application de nouvelles méthodes thérapeutiques a permis de prouver que les expériences traumatiques de l'enfance, refoulées, sont inscrites dans l'organisme, et qu'elles se répercutent inconsciemment sur la vie entière de l'individu. De plus, des ordinateurs qui ont enregistré les réactions de l'enfant dans le ventre de sa mère ont révélé que le bébé sent et apprend, dès le tout début de sa vie, la tendresse aussi bien que la cruauté.

10. Dans cette nouvelle optique, tout comportement absurde révèle sa logique jusqu'alors cachée, dès l'instant où les expériences traumatiques de l'enfance ne restent plus dans l'ombre.

11. Dès que nous serons sensibilisés aux traumatismes de l'enfance et à leurs effets, un terme sera mis à la perpétuation de la violence de génération en génération.

12. Les enfants dont l'intégrité n'a pas été atteinte, qui ont trouvé auprès de leurs parents la protection, le respect et la sincérité dont ils avaient besoin, seront des adolescents et des adultes intelligents, sensibles, compréhensifs et ouverts. Ils aimeront la vie et n'éprouveront pas le besoin de porter tort aux autres ni à eux-mêmes, encore moins de se suicider. Ils utiliseront leur force uniquement pour se défendre. Ils seront tout naturellement portés à respecter et à protéger les plus faibles, et par conséquent leurs propres enfants, parce qu'ils auront eux-mêmes fait l'expérience de ce respect et de cette protection, et que c'est ce souvenir-là, et non celui de la cruauté, qui sera inscrit en eux.

© Alice Miller

17 février 2008

l'emprise, la réintroduire dans la théorie psychanalytique?

Par Paul Denis

Pourquoi s'interroger aujourd'hui sur la question de l'emprise, et essayer de la réintroduire dans la théorie psychanalytique?

Il est clair, sur le plan clinique, que les conduites d'emprise de chacun de nous sur ses propres objets d'amour - son conjoint, ses enfants, maîtresses et amants… - tiennent une place considérable dans notre vie. L'emprise que nous cherchons, délibérément ou non, à exercer sur nos patients n'est pas la moins importante pour notre métier de psychanalyste ou de psychothérapeute. Le désir d'emprise recouvre ainsi le champ du pouvoir, celui de la volonté, celui de la possession. Courant de force d'une importance extrême et qui tient cependant une place très limitée dans la théorie est la clinique psychanalytique.

Pourtant Freud avait tenu compte de cette force d'emprise en introduisant, dans sa première théorie des pulsions, la notion de Bemächtigungstrieb , de "pulsion d'emprise". On peut se demander pourquoi il ne lui a pas donné tout le développement qu'elle aurait mérité alors même qu'elle resurgit à plusieurs reprises dans son œuvre. Il est vraisemblable que la rupture avec Adler — dont la dissidence théorique s'appuyait précisément sur "la volonté de puissance" — l'a incité à privilégier la sexualité proprement dite dans le développement des perspectives psychanalytiques. Il serait trop long aujourd'hui de recenser les vicissitudes de la " pulsion d'emprise " dans l'œuvre de Freud, notons seulement qu'il l'évoquera même après 1920 pour l'asservir alors à la "pulsion de mort".

Il est important pour nous de constater qu'il donne à la " pulsion d'emprise " la tâche de conquérir l'objet sexuel, de le soumettre, de le posséder physiquement pour que l'acte sexuel s'accomplisse. Avant d'asservir la pulsion d'emprise à la pulsion de mort il lui a donc assigné un rôle dans la sexualité. Un passage de Totem et tabou est intéressant à citer de ce point de vue ; sans citer explicitement la " pulsion d'emprise " il l'évoque à partir de la volonté et de l'usage de la motricité:

"Une autre voie s'offre au primitif adulte. Une impulsion motrice est attachée à son désir, la volonté, et celle-ci - qui plus tard, en étant au service de la satisfaction du désir, changera la face de la terre - est utilisée pour représenter la satisfaction de telle sorte qu'on puisse pour ainsi dire la vivre grâce à des hallucinations motrices. Une telle représentation du désir satisfait est tout à fait comparable au jeu des enfants qui relaie chez eux la technique purement sensorielle de la satisfaction [hallucinatoire]. Si le jeu et la représentation imitative suffisent à l'enfant et au primitif, cela n'est pas un signe de modestie au sens où nous entendons ce terme, ou de résignation parce qu'ils se seraient rendu compte de leur impuissance réelle, mais c'est la conséquence aisément concevable de la valeur prépondérante qu'ils accordent à leur désir, à la volonté qui en dépend et à la voie prise par cette dernière." [1]

La " volonté " - capable de " changer la face de la terre " - est ici clairement conçue comme mise au service de la satisfaction du désir, liée à la motricité et au jeu des représentations. Freud ne dissocie pas la recherche de la satisfaction de l'exercice de la volonté - de l'emprise - mais au contraire les lie.

Parmi les débats qui persistent entre différentes écoles psychanalytiques l'un oppose les tenants de la relation d'objet, héritiers de Fairbairn qui soulignent la prépondérance de l' " object seeking ", et les tenants de la recherche du plaisir qui considèrent que l'essentiel pour le psychisme est la recherche de la satisfaction du désir. Réintroduire la notion d'emprise dans la théorie psychanalytique est une façon de dépasser cette opposition.

En effet, l'opposition entre "quête d'objet" et "quête du plaisir" dissocie deux mouvements ordinairement associés; dans le schéma même de la pulsion telle que Freud l'a tracé, si le "but de la pulsion" est bien le plaisir de la "décharge libidinale", "l'objet de la pulsion" est nécessaire et constitue le troisième élément de ce qui définit la pulsion: objet et plaisir ont partie liée. Cependant on a pu constater, dans l'histoire de la pensée psychanalytique, que privilégier l'objet risquait de mettre la sexualité au second plan, ou même de faire pratiquement disparaître son rôle dans la constitution de la personnalité, et que privilégier la quête du plaisir pouvait faire disparaître le rôle de l'objet, en tant que personne, et faire sous estimer l'importance de la réalité extérieure.

Il nous semble possible de développer - en donnant toute sa place à l'emprise - une théorie qui concilie les deux points de vue et qui donne à la pulsion son unité de fonctionnement.

L'emprise dans la pulsion

Par rapport au schéma de la pulsion tel qu'il a été schématisé par Freud qui la caractérise par sa source, sa poussée, son but et son objet, il est intéressant de tenter de considérer aussi les moyens de la pulsion, ceux par lesquels elle atteint son objet et son but. Le plaisir adéquat, la satisfaction, ne peut être obtenu pleinement que par une action exercée sur l'objet, c'est le rôle assigné aux conduites appropriatives, aux efforts d'emprise sur l'objet.

Dans Trois essais… Freud établit une opposition pertinente entre les pulsions sexuelles et la " pulsion d'emprise" [2] : les pulsions sexuelles sont assez clairement indiquées comme reliées aux zones érogènes, mais il est aussi tout à fait clair que Freud fait correspondre à l'emprise ce qu'il appelle le bemächtigungsapparat c'est-à-dire " l'appareil d'emprise ". Si l'on considère cet appareil d'emprise comme un ensemble de voies d'investissements possibles pour la libido, il me semble que cette notion " d'appareil d'emprise " peut être utilisée telle que Freud nous l'a laissée.

A partir de cette première idée de Freud sur l'organisation du conflit pulsionnel, nous défendrons l'idée que la libido dispose de deux sortes de voies par lesquelles elle peut s'investir. Ces deux voies sont, l'une la voie des zones érogènes telles que nous les connaissons, les zones érogènes au sens strict, le plus sexuel du mot , au sens de la zone orale, du canal muqueux de la zone anale, des zones sexuelles proprement dites, et pour l'autre celle des éléments qui appartiennent à ce bemächtigungsapparat , et qui sont donc les différents éléments des organes des sens : la vue, l'ouïe, le toucher, et, point très important, la motricité.

Par chacune de ces voies la libido va s'investir en deux courants destinés à se rejoindre dans l'accomplissement de l'expérience de la satisfaction. Un courant libidinal va investir les zones érogènes et leur excitation, l'autre courant libidinal va s'investir à travers la motricité et les organes des sens sur l'objet et exercer une emprise sur lui. Nous avons ainsi à considérer un courant érogène et un courant d'emprise, tous les deux libidinaux alors que Freud avait initialement fait de " la pulsion d'emprise " une pulsion non sexuelle [3].

Alors que le modèle freudien de Trois essais… opposait la " pulsion d'emprise " aux " pulsions sexuelles " le schéma que je propose introduit la dualité dans la composition même de la pulsion. J'insiste donc sur le fait que je ne reprend pas l'idée d'une " pulsion d'emprise " autonome mais que je considère un courant libidinal dévolu à l'emprise, lequel constitue l'une des deux composantes de la pulsion. Pas de " pulsion d'emprise " mais un " formant libidinal d'emprise " dans la pulsion. Pour nous un courant d'emprise est présent dans la constitution de toute pulsion.

La constitution de la pulsion

Nous considérons que la pulsion résulte de la synergie, de la combinaison de ce formant libidinal d'emprise avec le courant libidinal investissant les zones érogènes.

La particularité des zones érogènes est leur pouvoir de donner lieu à une expérience de plaisir intense, orgastique, et d'être ainsi à l'origine de " l'expérience de satisfaction " évoquée par Freud et qui joue pour nous un rôle essentiel.

La pulsion se constitue dans un mouvement qui rassemble, qui combine, deux courants d'investissements complémentaires. Elle apparaît comme un composé qui associe l'investissement libidinal des zones érogènes elles-mêmes avec celui de la motricité et de la sensorialité par le moyen desquels, la libido va se relier aux objets du monde extérieur. Le courant d'emprise va à la recherche de l'objet extérieur susceptible d'apporter la satisfaction. Le tentacule de l'emprise capture l'objet et l'amène au contact des zones érogènes.

L'ensemble de ces deux courants d'investissements se trouvera noué par l'expérience même de la satisfaction à laquelle nous attachons donc un pouvoir fondateur. C'est dans L'Esquisse d'une psychologie scientifique que Freud en parle pour la première fois et qu'il en fait un élément tout à fait essentiel. Pour nous c'est cette expérience de la satisfaction qui parachève la constitution de la pulsion, lui donne sa valeur même de pulsion, sa cohérence ; elle est nécessaire pour que la création dans le psychisme de la représentation puisse s'effectuer.

Essayons donc de donner une sorte de schéma théorique de l'apparition de la pulsion et de ses résultats : la pulsion s'organise du fait même d'un double investissement de l'objet : l'objet est investi à la fois en emprise, - comme " objet d'emprise " - et " en satisfaction ", comme " objet de satisfaction ". Une fois l'objet saisi en emprise, le jeu des zones érogènes, au contact de celui-ci, aboutit à l'expérience de la satisfaction.

La représentation

Les investissements " en emprise " de l'objet - investissements sensoriels et moteurs - laissent une trace ; celle-ci va constituer un sorte de trame, de support, d'image incolore que l'expérience de la satisfaction va charger de la couleur du plaisir. C'est donc l'association des traces en emprise, laissées par la conquête de l'objet, avec le souvenir de la satisfaction, dont elles deviennent le support, qui constitue une " représentation " au sens psychanalytique du terme. L'évocation d'une représentation ainsi constituée est porteuse d'un certain plaisir, d'une charge libidinale organisée qui reproduit en plus faible, mais reproduit, une part de l'expérience de la satisfaction ; on pourrait parler ici de satisfaction mnésique plutôt que " d'hallucination de la satisfaction " ; le souvenir apporte une satisfaction limitée mais réelle. En ce cas les traces en emprise et le souvenir de l'expérience de la satisfaction se soutiennent mutuellement.

Nous pouvons prendre ici l'exemple de l'allaitement : les cris de l'enfant, son activité motrice aboutissent à ce qu'il est pris dans les bras et qu'il se saisisse du sein ; après quoi l'activité motrice de la tétée stimule la zone érogène buccale et déclenche l'expérience de la satisfaction orale. C'est l'expérience de la satisfaction qui vient constituer le lien entre l'ensemble de toutes les expériences qui l'ont amenée, et finalement boucler la constitution de la pulsion orale. La représentation constituée associera la trace sensorielle d'être pris dans les bras, l'image du visage de la mère, les images motrices du saisissement du sein et le souvenir de la satisfaction orale.

Dans un tel schéma, où la pulsion est constituée de deux versants libidinaux de deux " formants " - en emprise et en satisfaction -, nous nous trouvons extrêmement loin du modèle du plaisir envisagé simplement comme une " décharge " d'excitation. Ce modèle de la " décharge " est en fait assez sommaire, imaginé par Freud en fonction d'analogies biologiques, celui de l'expulsion des produits sexuels : il s'agit d'une proto-pensée freudienne que la suite de son œuvre nous invite à reconsidérer. Il nous faut distinguer plaisir et satisfaction ; l'un peut n'être que modéré, lié uniquement à l'évocation de représentations psychiques, l'autre impliquant un plaisir plus intense et réalisant une forme d'accomplissement ; l'un et l'autre sont sous la dépendance d'un montage finalement très sophistiqué mettant en jeu la représentation. Le plaisir puise dans le jeu des représentations déjà créées, la satisfaction quant à elle est capable d'en créer de nouvelles.

La notion de pulsion est ainsi indissociable de la notion de représentation et celle-ci nous apparaît comme la cheville ouvrière du psychisme.

C'est à partir de la représentation que nous travaillons, c'est le tissu des représentations liées les unes aux autres, ou au contraire soigneusement isolées les unes des autres, que nous voyons fonctionner dans le discours de nos patients, à travers les mots qu'ils nous livrent. Dès qu'il y a une sorte de dissociation entre les différentes composantes de la représentation, nous le percevons parce que nous nous trouvons devant un discours qui nous paraît incomplet, morne, qui nous paraît mort ; nous le percevons devant l'expression d'affects isolés, investis pour eux-mêmes ou devant une excitation psychique désorganisée. En effet le montage pulsionnel peut se défaire, et la représentation se décomposer.

Ce modèle nous invite à considérer que la pulsion naît dans l'histoire que la pulsion reflète à sa manière. Lorsque nous parlons des pulsions comme d'éléments originaires, cela ne signifie pas qu'elles soient innées, pré-installées, mais qu'elles sont originaires de la vie psychique. De notre point de vue, la notion de pulsion n'a rien de biologique, il s'agit du premier montage psychique à partir de l'excitation libidinale. Seuls les " instincts " sont biologiques, élémentaires, corporels et innés.

Les pulsions sont psychiques, acquises, on peut les considérer comme des modules de fonctionnement psychique, comme les premières unités de son organisation. Toute expérience nouvelle de satisfaction obtenue en synergie avec les investissements en emprise vient constituer une représentation nouvelle ou renforcer une représentation existante. Nous pouvons considérer de ce point de vue que c'est l'expériences de satisfaction vécue avec un objet qui nourrit le psychisme.

Marion Milner écrivait que tout amour heureux installait un nouveau dieu dans notre panthéon.

Le rapport entre les deux registres d'investissement et leur concordance dans la construction d'expériences de satisfaction articule principe de plaisir et principe de réalité et permet l'instauration de leur jeu réciproque.

On peut donc considérer que la possibilité , offerte par le fonctionnement du corps lui-même, de répartir l'investissement de l'énergie libidinale en deux courants complémentaires, en emprise et en satisfaction, est le point de départ d'un système auto-organisant car la recombinaison de ces deux courants produit des éléments psychiques : les représentations dont le tissu s'enrichit progressivement et constitue le psychisme lui-même.

Le fonctionnement psychique ordinaire

Dans l'ordinaire du fonctionnement psychique, lorsque la tension libidinale, l'excitation psychique, atteint un certain niveau, nous mettons d'abord en œuvre notre système de représentations, en quelque sorte nous cherchons d'abord à puiser dans nos réserves, à vivre sur nous mêmes : la seule évocation de représentations peut assurer, pendant un temps, la régulation de l'excitation. Nos ressources représentationnelles elles-mêmes nous permettent une autonomie plus ou moins longue sans le recours à un objet extérieur, sans expérience nouvelle de satisfaction dans la rencontre avec un objet. Nous pouvons trouver un soutien dans le contact avec un certain nombre d'éléments " habités " du monde extérieur, avec quelque chose qui appartient au monde représentatif d'autrui confié à un objet matériel, que ce soit une œuvre d'art, que ce soit un roman, que ce soit quelque chose que la main de l'homme, un jour, a modelé, c'est-à-dire que les représentations d'un homme ont doté d'un pouvoir sur la vie psychique des autres.

Mais, dans tous les cas, au bout d'une période plus ou moins longue, il devient nécessaire de retrouver un contact direct, effectif, amoureux, avec un objet. La vie représentationnelle, ne suffisant plus, va être momentanément désinvestie au profit de la recherche active d'un objet. Toute une part de l'énergie libidinale se dégage donc du registre des représentations pour réinvestir celui de l'emprise ; l'appareil d'emprise se met en quête de l'objet par le regard, la motricité, des conduites d'appel… L'objet sera d'abord objet d'emprise : c'est l'ensemble des éléments sur lesquels le sujet a prise qui seront investis : son apparence, son image, le parfum laissé… Une fois l'objet conquis, et consentant à une emprise croisée, de l'un sur l'autre, une expérience de satisfaction réciproque mettant en jeu les zones érogènes peut être constituée grâce à cette conquête. L'instant de la satisfaction nouera entre elles les données recueillies par l'appareil d'emprise et le don de plaisir venu des zones érogènes : l'image et la satisfaction. Une nouvelle bascule de l'investissement libidinal se produit alors : la plus grande part de la libido délaisse le registre de l'emprise et le monde extérieur pour investir l'expérience même de la satisfaction, interne au sujet. L'objet est alors désinvesti en emprise, désinvesti dans sa réalité au profit de la représentation dont il a permis la constitution. Un repli narcissique heureux survient après l'orgasme, mais que chacun des partenaires peut vivre comme un désintérêt ou même comme du mépris….

Le sadisme et la folie d'emprise

Dans le premier schéma donné dans Trois essais… c'est la compassion qui arrête le mouvement d'emprise devenu cruauté; il est cependant implicite que la satisfaction venant de l'objet peut arrêter le mouvement : la satisfaction est en fait le seul événement qui puisse arrêter le mouvement de l'emprise, elle en est la seule butée. La capacité de compassion, susceptible d'arrêter le sadisme, provient de mécanismes d'identification et d'introjection liées à des représentations de personnes lesquelles dérivent en fait de l'expérience de la satisfaction. Donc, schématiquement, lorsque, devant la montée de l'excitation, le jeu des représentations et des instances (moi et surmoi) est débordé, si l'expérience de la satisfaction n'intervient pas, l'emprise et les investissements des éléments perceptifs et moteurs qui lui sont liés s'exacerbent; la montée de l'excitation nécessite le redoublement de l'effort d'emprise car celle-ci n'a pas l'érogénéité qui suffirait à son propre apaisement; l'emprise ne se suffit pas à elle-même, elle ne se "décharge" pas; au contraire les conduites d'emprise se "chargent" d'un investissement de plus en plus violent.

Nous proposons donc de considérer que le sadisme est une conséquence de cette montée d'excitation dans le système d'emprise qui s'applique à l'objet refusant ou à l'objet qui ne se refuse pas mais avec lequel le sujet n'est pas en mesure de construire une expérience de satisfaction. Tant qu'elle reste limitée, même de façon précaire, par des représentations cette activité d'emprise reste sadisme ; les manifestations de douleur de l'objet concerné valent pour marques de présence, d'intérêt, de plaisir, arrachées à l'objet lequel peut, du reste, se prêter à la possession sadique.

Le refus radical de l'objet ou la rupture du lien avec le système représentatif et les instances transforme le sadisme en destructivité libre ; les investissements, jusque-là consacrés aux systèmes psychiques élaborés "en satisfaction" se déplacent vers les conduites d'emprise, les renforcent et vident parallèlement le système représentatif et les instances de leur poids économique inhibiteur, l'excitation n'est plus liable, le passage à l'acte devient la voie où l'emprise, devenue " folie d'emprise ", s'engouffre.

Le fonctionnement pulsionnel se dégrade ainsi : la composante d'emprise attire à elle de plus en plus d'énergie afin d'augmenter son pouvoir sur l'objet et le conquérir, manu militari s'il le faut. L'objet est alors surinvesti en emprise et cesse d'être contingent. Le sujet se trouve pris dans le cercle vicieux du joueur qui double à chaque fois sa mise dans l'espoir de gagner enfin. Ainsi l'insatisfaction établit la toute puissance de l'objet, toute puissance qu'il faut renverser par une toute puissance égale. Le pouvoir, écrivait Tolstoï, " le pouvoir pris dans son sens véritable n'est que l'expression de la plus grande dépendance où l'on se trouve à l'égard d'autrui ".

Nous voici donc à l'ombilic de la folie d'emprise

D'un côté le monde des représentations préexistantes est désinvesti, mis hors-jeu, et cela d'autant plus facilement qu'il était plus lâche ou désorganisé ; il perd de ce fait sa valeur organisatrice de la continuité du fonctionnement psychique. D'un autre côté aucune satisfaction nouvelle ne peut être obtenue, faute d'un objet accessible ou consentant ou de la disparition durable ou momentanée de la capacité de construire une satisfaction en tirant parti de la participation de l'objet [4]. Ce n'est plus alors le jeu des représentations qui assure la continuité du fonctionnement du Moi mais le seul exercice des conduites d'emprise. L'investissement de la sensation se substitue à celui de la satisfaction ; dans ce mouvement, lorsque la dégradation du fonctionnement pulsionnel est extrême, l'exercice même de la sexualité se coupe du registre de la satisfaction, les sensations sexuelles incoordonnées ne conduisent plus à la satisfaction psychique et ne créent pas de représentations nouvelles. L'exercice même de la sexualité se trouve détourné de son rôle et ne signifie plus rien qu'un moyen d'emprise parmi d'autre [5] : " A ces moments là, dit une patiente, je vois la sexualité comme une arme ".

Les perversions sexuelles s'inscriraient dans ce type de fonctionnement : conduites sexuelles résultant d'une emprise indifférente au désir d'autrui et coupées de toute identification à lui.

Dans la folie d'emprise le fonctionnement mental déporte son centre de gravité sur la seule concrétude de l'objet, sur son existence physique, sur ses déplacements: la dimension de l'acte devient prévalente. Le cercle infernal qui détermine l'escalade de la violence est lancé: lorsque les représentations sont mises hors-jeu, seule une nouvelle expérience de la satisfaction pourrait arrêter le mouvement de l'emprise ; celle-ci redouble d'efforts pour juguler la montée de l'excitation laquelle se renforce du désinvestissement accru de monde intérieur. L'investissement des instances, part essentielle du registre des représentations, sombre complètement dans ce mouvement que rien ne peut plus arrêter dans une violence qui peut être sans limites. Parce que l'expérience de la satisfaction avait entraîné l'effacement psychique de la réalité de l'objet, la folie d'emprise ira jusqu'à détruire l'objet en réalité dans le fol espoir que la satisfaction pourrait renaître de sa disparition.

La probabilité d'apparition de conduites violentes - possible chez chacun de nous : qui pourrait être certain d'être à l'abri du risque d'une colère violente ? - serait d'autant plus grande que le registre des représentations - produit de la répétition des expériences de satisfaction - est moins développé, a moins de consistance. La dégradation du fonctionnement de ce registre abaisse les capacités à la compassion et accentue le risque de conduites violentes.

Le moindre développement du registre des représentations favorise la dépendance à l'égard des autres dont la défaillance peut être vécue comme une menace pour la cohésion même du psychisme et déclencher des comportements d'emprise contre eux.

L'utilisation de toxiques (drogues, alcool…) peut limiter la montée de l'excitation en provoquant une sorte d'ersatz de " satisfaction ", arrête momentanément le mouvement des conduites d'emprise, mais n'aboutit pas à la constitution de représentations qui seraient nourricières pour le fonctionnement psychique ; l'usage de toxiques favorise ainsi, à la longue, l'appauvrissement du fonctionnement mental. Charles Baudelaire écrivait ainsi: " Ajouterai-je que le haschisch, comme toutes les joies solitaires, rend l'individu inutile aux hommes et la société superflue pour l'individu, le poussant à s'admirer sans cesse lui-même et le précipitant jour à jour vers le gouffre lumineux où il admire sa face de Narcisse ? "

Les dysfonctionnements pulsionnels

Mais il est des formes moins bruyantes de dysfonctionnement pulsionnels que nous pouvons aborder à partir de la rupture de la synergie entre les deux registres de l'emprise et de la satisfaction. A certains moments de déséquilibre entre les deux registres qui les organisent, les pulsions se défont, entraînant la désunion du fonctionnement psychique dans son ensemble : les différents éléments qui nouent le système représentatif se disloquent.

Nous pouvons ainsi aborder la clinique des états traumatiques comme résultant de la surcharge économique de l'un ou l'autre des deux formants de la pulsion. L'excès de sensations, de stimulations sensorielles fait monter une excitation libidinale qui ne trouve pas à s'inscrire dans les voies de la satisfaction ; cet excès a dès lors le pouvoir de désorganiser le fonctionnement pulsionnel. De façon symétrique l'usage des toxiques appauvrissant les moyens de traiter l'excitation rend vulnérable au traumatisme.

Quand les deux systèmes d'investissement, ou les deux composantes de la pulsion, se désunissent, apparaissent des éléments de dépersonnalisation, de désorganisation, qui sont tout à fait repérables en clinique et peuvent être, comme Pierre Marty l'a montré, à l'origine de désorganisations psychosomatiques. La pensée opératoire de P. Marty et Michel de M'Uzan peut être considérée comme le résultat d'un tel divorce entre le registre de l'emprise et celui de la satisfaction : les patients, dans un discours factuel et désaffectivé, enchaînent des " images", traces de l'investissement en emprise des objets, dépourvues de tout pouvoir évocateur de satisfaction qui en ferait des " représentations " à part entière.

Notre perspective peut être appliquée aussi à la question de l'appauvrissement psychique que l'on observe dans différents états cliniques où l'on constate une sorte de destruction des représentations et pas seulement d'attaques contre les liens. Il semble qu'il faille distinguer deux éventualités.

D'abord une sorte de disparition psychique par désinvestissement ; nous soustrayons notre investissement à une représentation qui disparaît alors, au profit d'une autre qui semble alors exister seule. Vous êtes dans une chambre obscure, vous déplacez le pinceau de lumière de votre projecteur et c'est seulement ce qui est éclairé qui semble exister, pourtant le reste n'est pas détruit, pas plus que le contenu d'un livre fermé dans une bibliothèque. Mais si le livre est perdu dans la bibliothèque son contenu est tout autant inaccessible que s'il avait été détruit. Un désinvestissement trop prolongé peut faire disparaître tout lien avec la représentation désinvestie qui restera inaccessible.

Mais il est possible de détruire un élément psychique d'une autre façon, par surinvestissement. Quelqu'un qui, sans savoir lire, voudrait trouver dans un livre quelque chose qui lui apporte une indispensable guérison, pourrait s'acharner sur les pages du livre jusqu'à les détruire. De même qu'un sujet incapable de trouver les moyens d'une satisfaction dans une relation avec quelqu'un d'autre peut s'acharner sur lui jusqu'à détruire toute relation possible, le surinvestissement en emprise d'une représentation peut aboutir à n'en fixer que la part d'image et à couper son lien avec toute émotion. L'isolation et le surinvestissement d'une représentation par rapport à l'ensemble auquel elle appartient est le début de sa réduction à son propre squelette.

Le soutien au fonctionnement des représentations

Pourtant les investissements en emprise peuvent soutenir le jeu des représentations. Il semble bien qu'un certain nombre d'entre nous, à certains moments ou dans certains registres de leur fonctionnement mental, aient besoin de s'appuyer sur une petite activité d'emprise comme pour réalimenter ou relancer le système de constitution de la représentation. " Mes pensées dorment si je les assis " disait Montaigne. Un certain nombre d'investissements sensoriels moteurs ont souvent un impact, une utilité, pour soutenir le fonctionnement représentatif. Le fait de griffonner peut soutenir un mode de pensée associatif. Tout se passe comme si le fait de disposer d'éléments à investir en emprise, soutenant le registre de l'image, favorisait le jeu des représentations. Si le lien entre les deux registres de la pulsion est suffisant l'évocation de l'un fait surgir l'autre. C'est ce qui se passe chez l'enfant dans l'usage des objets transitionnels : c'est parce qu'il est objet d'emprise que l'objet transitionnel soutient les représentations et le jeu fantasmatique de l'enfant. Nous retrouvons ici la façon de voir de Freud dans le passage de Totem et tabou que nous avons cité : " Une impulsion motrice est attachée à son désir (…) et celle-ci (…) est utilisée pour représenter la satisfaction de telle sorte qu'on puisse pour ainsi dire la vivre grâce à des hallucinations motrices. Une telle représentation du désir satisfait est tout à fait comparable au jeu des enfants … "

Ce soutien à l'activité représentative par une certaine emprise visuelle sur autrui est observable dans l'utilisation du face à face en psychothérapie.

1 S.Freud, Totem et tabou, trad.Marielène Weber, Gallimard p 201.

2 En allemand Bemächtigungstrieb ; le terme, traduit en français par " pulsion d'emprise ", n'a pas été rendu de façon satisfaisante en anglais : Strachey l'a traduit par instinct of mastery ce qui ne distingue pas Bemächtigung et Bewältigung, emprise et maîtrise.

3 C'est ce qui peut expliquer que Freud ait abandonné cette notion d'emprise ; nous pouvons supposer penser qu'il a senti l'impossibilité de soutenir l'idée d'une pulsion d'emprise non sexuelle et qu'il a de ce fait délaissé la notion. C'est sans doute pour la même raison que les tentatives pour rétablir la pulsion d'emprise dans la théorie psychanalytique ont jusqu'à présent échoué. Par exemple Ives Hendricks a fait tout un travail sur ce qu'il appelle la pulsion de maîtrise. Il la considérait comme quelque chose de non sexuel, et il a même essayé ensuite de lui faire correspondre, dans sa théorisation, un principe particulier le "work principle", le principe de travail. Cette désexualisation complète a choqué même les tenants de la psychologie du moi, qui pourtant n'auraient pas dû être si réticents devant ce que leur proposait Hendricks dont les formulations étaient parfaitement compatibles avec la théorie du moi autonome; il n'a pas été écouté du tout, et toutes les idées qu'il a proposées ont été refusées successivement aussi bien par Fenichel que par Hartmann, Kris et Lœwenstein.

4 Plus le registre des représentations s'appauvrit et plus les difficultés à utiliser l'objet, à bâtir et intégrer des satisfactions venant du commerce avec l'objet, s'accentuent.

5 C'est ce qui se produit dans le cadre des perversions sexuelles.

17 février 2008

LES ABUS SEXUELS

LES ABUS SEXUELS



Que vous le sachiez ou non, quelqu'un de votre entourage a un jour été victime d'abus sexuel. Et si vous êtes psy, vous vous apercevrez rapidement que les difficultés d'un certain nombre de personnes trouvent là leur origine. Pour ces hommes et ces femmes meurtris, il y aura toujours un « avant »et un « après » l'abus.


Notre société préfère souvent méconnaître ce problème, en atténuer la gravité, voire le nier totalement. Ou alors, plein de bonne volonté mais aussi d'incompétence, on propose aux victimes des « solutions» qui ne font qu'aggraver le traumatisme subi.


Nous répondons dans cet article à quelques questions : Qu'entend-on par abus sexuel ? Pourquoi la victime a-t-elle tant de mal à parler de ce qu'elle a subi ? Quels dégâts l'abus sexuel provoque-t-il ? Comment aider la victime à s'en sortir ? Qui sont les abuseurs ?


QU'ENTEND-ON PAR ABUS SEXUEL ?

1. Une contrainte ou un contact

Un abus sexuel est toute contrainte (verbale, visuelle ou psychologique) ou tout contact physique, par lesquels une personne se sert d'un enfant, d'un adolescent ou d'un adulte, en vue d'une stimulation sexuelle, la sienne ou celle d'une tierce personne.


Un contact physique est, certes, plus grave qu'une contrainte verbale. Mais il faut savoir que tout abus constitue une violation du caractère sacré et de l'intégrité de la personne humaine et provoque toujours un traumatisme.


* La contrainte verbale désigne : une sollicitation sexuelle directe ; l'usage de termes sexuels ; la séduction subtile ; l'insinuation. Tout cela vis-à-vis d'une personne qui ne désire pas les entendre.


* La contrainte visuelle concerne : l'emploi de matériel pornographique ; le regard insistant sur certaines parties du corps ; le fait de se dévêtir, de se montrer nu, ou de pratiquer l'acte sexuel à la vue de quelqu'un. Ici encore, sans que la personne le désire.


* La contrainte psychologique désigne : la violation de la frontière entre le relationnel et le sexuel (un intérêt excessif pour la sexualité de son enfant) ou entre le physique et le sexuel (des lavements répétés ; un intérêt trop marqué pour le développement physique d'un adolescent).


* Le contact physique peut être : assez grave (baiser, attouchement du corps à travers les vêtements, que ce soit par la force ou non, avec ou sans pression psychologique ou affective), grave (attouchement ou pénétration manuels ; simulation de rapports sexuels, contact génital, tout cela avec ou sans violence physique), ou très grave (viol génital, anal ou oral, obtenu de quelque manière que ce soit, par la force ou non).

2. La stratégie de l'abuseur

Un abus n'est pas le fait du hasard de la part de celui qui le commet. Etant un pervers, celui-ci prémédite et organise la relation en attendant le moment où ses fantasmes vicieux lui paraîtront réalisables. La victime ignore bien entendu tout cela.


La stratégie perverse comporte en général quatre étapes :


a. Le développement de l'intimité et du caractère confidentiel, privilégié, de la relation

Cette phase, plus ou moins longue (de quelques heures à quelques années), vise à mettre en confiance la future victime qui ne se doute de rien.


b. Une interaction verbale ou un contact physique apparemment "convenable » pour la personne qui va être abusée (confidences de caractère sexuel, caresse des cheveux, embrassade amicale). La personne n'a pas peur, et pour cause : dans 29% des cas, son futur abuseur est un membre de la famille, dans 60% des cas un familier ou un ami. Seuls 11% des abus sont commis par un inconnu.


c. Une interaction sexuelle ou un contact sexuel

C'est la phase de l'abus proprement dit. Ici la victime se retrouve dans la même situation qu'un lapin traversant une route de nuit et qui est pris dans les phares d'une voiture : pétrifié, figé, tétanisé, incapable de réagir, il se laisse écraser par la voiture. L'abuseur, lui, est conscient de ce qu'il fait à sa victime.


d. La continuation de l'abus et l'obtention du silence de la victime par la honte, la culpabilisation, les menaces ou les privilèges.


Ce silence est rarement rompu. L'abus reste un secret absolu très longtemps, parfois toute la vie.

Trois survivantes des sœurs Dionne, les célèbres quintuplées canadiennes, ont attendu l'âge de soixante et un ans pour révéler, dans leur biographie, qu'elles avaient été sexuellement agressées par leur père.


En gardant le silence, la victime se fait, malgré elle, l'alliée de l'abuseur, puisque la seule chose qu'il redoute, c'est d'être dénoncé. Le fait de devenir ainsi, bien involontairement, son alliée, renforce le mépris qu'elle a d'elle-même et sa culpabilité.


Ce sera une des tâches du psy de lui expliquer qu'une personne sexuellement abusée n'est jamais ni coupable ni responsable. Elle ne pouvait pas deviner que les deux premières étapes n'étaient qu'une stratégie de l'abuseur.


Il devra aussi lui dire qu'une personne qui est sous la domination d'un abuseur ne peut s'en sortir qu'en le dénonçant et en révélant ce qu'elle a subi. Or en parler est pour elle très difficile, pour plusieurs raisons.


POURQUOI UNE VICTIME A-T-ELLE TANT DE MAL A PARLER DE CE QU'ELLE A SUBI ?

1. Elle met parfois beaucoup de temps pour réaliser qu'elle a été abusée

Le temps ne compte pas pour l'inconscient, il s'est comme arrêté pour la victime : c'est souvent l'apparition de symptômes comme la dépression ou des troubles sexuels qui l'incitera à laisser enfin sa souffrance refaire surface et à accepter d'en parler. C'est le premier pas vers la guérison.


Mais parler de ce traumatisme, prendre conscience de cette vérité : « J'ai été abusée», peut être un choc terrible. Le conseiller aura besoin de tact et d'une grande compassion pour laisser la personne découvrir elle-même et à son rythme, l'ampleur du drame qu'elle a vécu. Il comprendra l'extrême répugnance qu'elle éprouve à admettre que son corps et son âme ont été ravagés. Elle aimerait tant oublier, ne jamais avoir vécu cela, qu'elle se réfugiera de temps en temps dans le déni : « Cela n'a pas pu m'arriver.»


La personne sera encouragée à continuer à parler si vous croyez ce qu'elle dit (elle a absolument besoin de sentir qu'on la croit) et si vous évitez certaines phrases destructrices comme :


Il a juste fait une erreur, comme nous en faisons tous.

Ce n'est arrivé qu'une fois, après tout.

Il est temps que vous tourniez la page.

Ça s'est passé il y a si longtemps

2. Elle se sent coupable


Dans son for intérieur, sans même le dire ouvertement, la personne pense :


- Est-ce que ce n'était pas un peu de ma faute ?

- Est-ce que je n'aurais pas pu l'éviter ?

- Est-ce que, placé dans ma situation, quelqu'un d'autre aurait réussi à résister, à se débattre, à s'enfuir ?


Le psy peut aller au devant des questions qu'elle n'ose pas exprimer en lui demandant :


- Qui détenait le pouvoir (parental, spirituel, moral, organisationnel, physique, psychologique) ?

- Qui était l'adulte ? Le repère social ? Le référent ?

- Qui était l'instigateur, l'organisateur de cet abus ?

- Qui pouvait y mettre fin ?


Il peut lui faire comprendre que sa culpabilité est liée au décalage entre son vécu passé (et les raisons pour lesquelles elle n'a pu empêcher d'être abusée : son jeune âge, son ignorance, sa totale confiance) et son vécu actuel, où elle est plus âgée, moins ignorante, moins naïve et où elle sait se protéger.


Elle se croit coupable parce qu'elle regarde les événements passés avec les yeux de l'adulte avertie qu'elle est aujourd'hui. Or, à l'époque, elle ne possédait pas les protections suffisantes pour empêcher l'abus.


On peut aussi l'aider à différencier le point faible dont s'est servi le pervers, par exemple un besoin de tendresse tout à fait légitime, une confiance aveugle, et le crime qu'il a commis, en profitant de ce besoin légitime d'affection ou de cette confiance, pour assouvir ses désirs immoraux.


Déconnecter ces deux éléments est souvent un moment de vérité et un soulagement pour la personne, qui fait son deuxième pas vers la guérison quand elle ne se sent plus responsable.

Mais le chemin sera encore long jusqu'à la cicatrisation de la blessure. La précipitation et l'impatience sont par conséquent les grands ennemis du conseiller (et du client) dans ce domaine.

3. Parler peut lui coûter cher


A chaque fois que la personne abusée se replonge dans l'horreur de son passé, elle doit payer un prix très élevé. En essayant d' « oublier» l'abus, de tourner la page, elle avait construit un certain équilibre, par exemple avec ses proches.


Si elle décide de faire éclater la vérité, elle risque de désorganiser cet équilibre factice et de susciter des pressions de ses proches. Il se trouve toujours de faux « bons conseillers» soucieux de leur tranquillité et du qu'en dira-t-on, qui l'accuseront de mentir ou d'exagérer, lui reprocheront de réveiller le passé et l'inciteront à oublier, voire à « pardonner» ; le comble est qu'elle risque même d'être perçue comme responsable de l'abus.


Le psy devra donc la soutenir, l'encourager et assurer sa protection matérielle et psychologique. Il l'aidera à évaluer le prix de la lutte qu'elle devra mener pour sortir du bourbier de l'abus sexuel et à réaliser que son désir de s'en sortir sera souvent contrecarré par ceux qui devraient le plus l'assister : sa famille ou les responsables des institutions.


Il est à noter que lorsque l'abuseur fait partie d'une institution, quelle qu'elle soit, celle-ci décide souvent, par peur du scandale, de le « couvrir» et donc de rester dans le déni de l'abus, plutôt que de reconnaître publiquement l'existence d'un pervers sexuel au sein de l'institution.


Il y a un consensus de réprobation sur la personne qui a le courage de remuer ces choses immondes : qu'elle continue à être comme une morte vivante, ce n'est pas grave. Ce qui est le plus important, c'est qu'elle se taise.

4. Elle souffre de la honte


Sartre a dit de la honte qu'elle est « l'hémorragie de l'âme». Un abus sexuel marque la personne au fer rouge, la souille, la pousse à se cacher des autres. La honte est un mélange de peur du rejet et de colère envers l'abuseur, qui n'ose pas s'exprimer.


Le sentiment juste qu'elle devrait éprouver est la colère. Eprouver ce sentiment libérateur l'aidera à sortir de la honte. Il faut parfois du temps pour qu'elle parvienne à exprimer son indignation face à l'injustice qui lui a été faite. Cette expression de la colère pourra se faire soit de manière réelle, face au coupable, soit, si ce n'est pas possible pour sa sécurité personnelle, de manière symbolique. Dans tous les cas, c'est à la victime à en décider.


La honte est liée au regard que la victime porte sur elle-même ; elle se voit comme souillée à vie. C'est son regard qui devra changer. Elle se pansera en changeant sa manière de se penser.

4. Le mépris


Se sentant honteuse, la personne abusée a deux solutions : se mépriser elle-même ou mépriser l'abuseur et ceux qui lui ressemblent. Dans les deux cas, le résultat est le même : elle s'autodétruit, car la haine de soi ou la haine de l'autre sont toutes les deux destructrices.


Le mépris d'elle-même peut concerner son corps, sa sexualité, son besoin d'amour, sa pureté, sa confiance.


Ce mépris de soi a quatre fonctions : il atténue sa honte, étouffe ses aspirations à l'intimité et à la tendresse (se mépriser anesthésie le désir), lui donne l'illusion de maîtriser sa souffrance et lui évite de rechercher la guérison de son être.


Lorsque le mépris de soi est très intense, il peut pousser à la boulimie, à la violence contre soi et au suicide ; dans ces trois cas, la personne châtie son propre corps parce qu'il existe et qu'il a des désirs.

5. Le véritable ennemi


Si l'on demande à une personne qui a subi un abus sexuel quel est son ennemi, elle répondra sans doute : « C'est le coupable de l'abus.» Cela semble tellement évident.


La victime a le choix : soit elle combat, en cultivant sa haine envers l'abuseur, en ruminant une vengeance contre lui ; soit elle fuit, en cherchant à oublier, en s'endurcissant pour ne plus souffrir, en se repliant sur elle-même, en devenant insensible, de manière à ne plus ressentir ni émotion ni désir.


Mais ces deux solutions sont vaines, car l'ennemi n'est pas l'abuseur. Certes, il représente un problème, mais la bonne nouvelle est qu'il n'est pas le problème majeur. Le véritable adversaire, c'est la détermination de la personne à rester dans sa souffrance, dans sa mort spirituelle et psychique et à refuser de revivre. L'ennemi réside donc, paradoxalement, dans la victime elle-même !


Ce troisième pas vers la guérison est sans doute le plus difficile à franchir. La personne doit comprendre qu’elle a devant elle la vie et la mort, et qu'il n'appartient qu'à elle de rester dans la mort ou de choisir de revivre.


Lorsque le conseiller sent qu'elle a pris la décision de sortir de la pulsion de mort pour entrer dans la pulsion de vie, il aura alors sans doute l'occasion de parler avec elle des trois grands dégâts que l'abus a produits dans sa vie et qui devront être réparés.


LES DEGATS PRODUITS PAR L'ABUS SEXUEL


Ces dégâts constituent un torrent tumultueux qui balaie tout dans l'âme, et qui inclut : le sentiment d'impuissance, celui d'avoir été trahi et le sentiment d'ambivalence, ainsi que plusieurs autres symptômes.

1. Le sentiment d'impuissance


L'abus sexuel a été imposé à la victime. Qu'il se soit produit une fois ou cent fois, avec ou sans violence, ne change rien au fait qu'elle a été dépossédée de sa liberté de choix.


a. Ce sentiment provient de trois raisons


* Elle n'a pas pu changer sa famille dysfonctionnelle, s'il s'agit d'un inceste. Ses proches ne l'ont pas protégée comme ils auraient dû le faire, sa mère ou sa belle-mère n'a rien vu ou fait semblant de ne rien voir.


* Que l'abus ait été accompagné de violence ou non, qu'il y ait eu douleur physique ou non, la victime n'a pu y échapper, ce qui crée en elle faiblesse, solitude et désespoir. De plus, le coupable se sert de la menace ou de la honte pour la réduire au silence et recommencer en toute impunité, ce qui augmente son impuissance.


* Elle ne parvient pas à mettre un terme à sa souffrance présente. Seule, la décision de se supprimer anesthésierait sa douleur, mais elle ne peut s'y résoudre, alors elle continue à vivre, et à souffrir.


b. Ce sentiment d'impuissance entraîne de graves dommages


* La personne abusée perd l'estime d'elle-même, doute de ses talents et se croit médiocre.

* Elle abandonne tout espoir.

* Elle insensibilise son âme pour ne plus ressentir la rage, la souffrance, le désir ou la joie. Elle enfouit et refoule dans son inconscient les souvenirs horribles de l'agression sexuelle.

* A force de renoncer à sentir la douleur, elle devient comme morte. Elle perd le sentiment d'exister, semble étrangère à son âme et à son histoire.

* Elle perd le discernement concernant les relations humaines, ce qui explique que les victimes d'abus tombent souvent à nouveau sous la coupe d'un pervers, ce qui renforce leur sentiment d'impuissance.

2. Le sentiment d'avoir été trahi


Beaucoup de gens ignorent le nom des onze autres apôtres, mais connaissent Judas, le traître. Pourquoi ? Parce que la plupart des gens estiment que rien n'est plus odieux que d'être trahi par quelqu'un qui était censé vous aimer et vous respecter.


La personne abusée se sent trahie non seulement par l'abuseur en qui elle avait confiance, mais aussi par ceux qui, par négligence ou complicité, ne sont pas intervenus pour faire cesser l'abus.


Les conséquences de la trahison sont : une extrême méfiance et la suspicion, surtout à l'égard des personnes les plus aimables ; la perte de l'espoir d'être proche et intime avec autrui et d'être protégée à l'avenir, puisque ceux qui en avaient le pouvoir ne l'ont pas fait ; l'impression que si elle a été trahie, c'est parce qu'elle l'a mérité, du fait d'un défaut dans son corps ou dans son caractère.

3. Le sentiment d'ambivalence


Il consiste à ressentir deux émotions contradictoires à la fois. Ici, l'ambivalence gravite autour des sentiments négatifs (honte, souffrance, impuissance) qui ont parfois été simultanément accompagnés du plaisir, qu'il soit relationnel (un compliment), sensuel (une caresse), ou sexuel (le toucher des organes), dans les premières phases de l'abus.


Le fait que le plaisir soit parfois associé à la souffrance entraîne des dommages considérables : la personne se sent responsable d'avoir été abusée, puisqu'elle y a « coopéré» en y prenant plaisir ; le souvenir de l'agression peut revenir lors des rapports conjugaux ; elle ne parvient pas à s'épanouir dans sa sexualité qui est pour elle trop liée à la perversité de l'abuseur ; elle contrôle et même s'interdit le plaisir et donc son désir sexuel.


Le conseiller doit expliquer à la personne qu'elle n'est pas responsable d'avoir éprouvé un certain plaisir, car il est normal qu'elle ait apprécié les paroles et les gestes de « tendresse» de l'abuseur. C'est la nature qui a donné à l'être humain cette capacité à ressentir du plaisir.


Ce qui n'est pas normal, c'est la perversion de celui qui a prémédité ces attitudes affectueuses pour faire tomber une proie innocente dans son piège. C'est lui le seul responsable.

4. Quelques autres symptômes


On pensera à un éventuel abus sexuel si le client :


- Souffre de dépressions à répétition.

- Présente des troubles sexuels : manque de désir, dégoût, frigidité, impuissance, crainte ou mépris des hommes ou des femmes, peur de se marier, masturbation compulsive. Chez l'enfant, ce trouble de l'auto-érotisme, ainsi que certaines énurésies, peuvent faire penser à un abus sexuel.

- Se détruit par l'usage abusif d'alcool, de drogue ou de nourriture. L'obésité, en particulier, permet à des jeunes filles ou à des femmes qui ont été violées de se rendre, inconsciemment, moins attirantes et de se protéger ainsi contre une autre agression.

- Souffre de maux de ventre, d'infections gynécologiques à répétition.

- A un style de relation avec les autres très caractéristique : soit il est trop gentil avec tout le monde, soit il est inflexible et arrogant, soit enfin il est superficiel et inconstant.


AIDER LA VICTIME A REVIVRE


Celle-ci devra cesser d'écouter les voix intérieures qui la maintiennent dans la culpabilité et la honte et se mettre à l'écoute de la voix de la vérité, qui la conduira vers la libération.


Elle devra aussi abandonner les voies sans issues que des personnes bien intentionnées mais incompétentes (des aidants « peu aidés» !) lui proposent : nier l'abus, le minimiser, oublier, pardonner au coupable sans que celui-ci se soit sérieusement repenti, tourner la page, cesser de se plaindre, etc.


La voie menant à un mieux-être comprend deux étapes : regarder la réalité en face, et décider de revivre.

1. Regarder la réalité en face


La personne devra peu à peu retrouver les souvenirs de l'abus, admettre les dégâts et ressentir les sentiments adéquats.


a. Retrouver les souvenirs de l'abus

La victime préfère souvent les oublier, tant cela la dégoûte ou la terrifie. Ou alors elle les raconte froidement, comme si c'était arrivé à quelqu'un d'autre. Mais ce déni est un obstacle à la guérison. L’abus ne doit pas être gommé, mais nommé.


Avec beaucoup de tact, on l'encouragera à remonter dans le passé, parfois très lointain, car seul un abcès vidé peut cicatriser.


Le retour des souvenirs refoulés se fera progressivement au cours de la psychothérapie. L'inconscient de la personne collabore activement par le moyen de rêves, ou d'images qui lui reviennent à l'esprit.


Certains événements font aussi resurgir les traumatismes oubliés, par exemple : une rencontre avec l'abuseur, une grossesse, la ménopause, un autre abus, le fait qu'un de ses enfants atteigne l'âge qu'elle avait lorsqu'elle a été abusée, le fait de se retrouver sur les lieux de l'agression, ou le décès du coupable.


b. Admettre les dégâts

Ce retour pénible dans le passé va lui permettre d'admettre les dures vérités suivantes :


* J'ai été victime d'un ou de plusieurs abus sexuels. C'est un crime contre mon corps et contre mon âme.

* Etant victime, je ne suis en rien responsable de ce crime, quoi que j'aie pu ressentir.

* Suite à ces abus, je souffre de sentiments d'impuissance, de trahison et d'ambivalence.

* Ma souffrance est intense, mais la cicatrisation est possible, si j'admets qu'il y a eu blessure.

* Cette cicatrisation prendra du temps.

* Je ne dois pas recouvrir mon passé d'un voile de secret et de honte ; mais je ne suis pas non plus obligé d'en parler au premier venu.


c. Ressentir les sentiments adéquats


La culpabilité (qui est un sentiment racket très fréquent ici), la honte, le mépris, l'impuissance, la haine, le désespoir, devront peu à peu être remplacés par les sentiments plus adéquats que sont la colère envers l'abuseur et ses complices, et la tristesse face aux dégâts subis. Cette tristesse ne doit pas mener à la mort, au désespoir, mais à la vie, c'est-à-dire à une foi, une espérance et un amour renouvelés.


Le conseiller favorisera l'expression de ces deux sentiments, de manière réelle ou symbolique, mais toujours en toute sécurité, à savoir dans le cadre protégé des séances de relation d'aide.

2. Décider de revivre


Pourquoi une victime d'abus sexuel devrait-elle décider de revivre, après tout ce qu'elle a souffert et souffre encore ? Tout simplement parce qu’il est meilleur pour elle de choisir la vie et non la mort.


Choisir de revivre signifiera pour elle :


a. Refuser d'être morte

Elle trouve normal de vivre avec un corps et une âme morts ; paradoxalement, cela lui permet de survivre, en ne risquant plus de ressentir la joie ou la douleur.


b. Refuser de se méfier

La victime se méfie tous les êtres humains. Une femme violée, en particulier, voit tout « mâle» comme étant le « mal». Elle devra apprendre à transformer sa méfiance envers les hommes en vigilance, ce qui est tout différent.


c. Ne plus craindre le plaisir et la passion

Ces deux éléments la ramènent au drame qu'elle a subi, alors elle les fuit. Ce faisant, elle se prive de ces deux dons.


Ayant été victime du désir (pervers, mais désir tout de même) de quelqu'un, elle « jette le bébé avec l'eau du bain», c'est-à-dire qu'en rejetant l'abus qu'elle a subi, elle rejette en même temps tout désir, même le sien.


Elle doit réaliser que ce n'est pas parce que quelqu'un a eu un désir pervers envers elle qu'elle doit désormais renoncer à son propre désir.


d. Oser aimer à nouveau

Elle devra progressivement renoncer à ses attitudes autoprotectrices et à son repli sur elle-même pour goûter à nouveau à la joie d'aimer les autres et de nouer des relations chaleureuses et sûres.

Elle quittera sa carapace pour retrouver un cœur tendre, capable de prendre le risque d'aimer ceux qu'elle rencontre. Elle abandonnera ses défenses, ce qui ne veut pas dire qu'elle ne s'entourera pas de protections. Une protection n'est pas une défense.


Elle découvrira alors que, s'il est vrai qu'une ou plusieurs personnes l'ont trahie, la grande majorité des autres sont dignes de confiance.


LE DEVOILEMENT DES ABUSEURS

1. Qui sont-ils ?

En très grande majorité ce sont des jeunes gens ou des hommes, provenant de toutes les classes de la société et de tous les milieux.


Souvent, ils font partie de l'entourage de la victime : un camarade, un voisin, un chef scout ou un animateur de jeunes, un baby-sitter, un enseignant, un patron, un collègue de travail, un prêtre, etc.


Ce sont aussi très souvent des membres de la famille : le père, l'oncle, le grand-père, le grand-oncle, le beau-père (de plus en plus fréquemment du fait de l'augmentation des remariages et des familles recomposées), le frère, le demi-frère ou le quasi frère, le beau-frère, le cousin, etc. On parle alors d'inceste ou d'abus sexuel intra-familial.


Il s'agit, plus rarement, d'une personne inconnue de la victime.


Il est à noter que 80% des agresseurs ont été eux-mêmes victimes d'abus dans le passé, ce qui ne les excuse nullement, mais peut expliquer en partie leur comportement.

2. Le dévoilement


Une victime a beaucoup de mal à dénoncer son agresseur ; elle révèlera plus facilement l'abus lui-même. Pourtant, cette dénonciation a une grande portée thérapeutique et il faut l'encourager à rompre le silence. Une fois dite à un autre, la parole devient inter-dite et non plus interdite, comme le voulait le pervers.


Mais cette dénonciation est souvent mal acceptée par la société. Tant qu'une personne sexuellement abusée ne dénonce pas le coupable, elle est considérée comme victime. Mais le jour où elle décide d'en référer à la Justice, on la considère alors comme coupable d’accuser quelqu'un, et le crime commis envers elle va être nié.


C'est pourquoi par exemple la grande majorité des femmes violées se résignent à rester des victimes à vie et donc à se taire, par peur d'être en fin de compte accusées du crime qu'elles dénoncent. Or, elles ne devraient jamais hésiter à rendre le poids du crime à celui à qui il appartient : le violeur.


Il faut néanmoins savoir que, si porter plainte a une portée thérapeutique, le processus judiciaire est long, pénible et coûteux. Les interrogatoires répétés, le manque de respect et de tact de certaines personnes , la honte de dévoiler son histoire devant tout le monde, l'impression de ne pas être crue, entraînent ce que l'on appelle une victimisation secondaire. A chaque fois qu'elle relate le viol, la femme se sent à nouveau violée.


Le soutien, matériel et psychologique, d'organismes spécialisés dans l'aide aux victimes d'abus sexuels, est précieux dans ce genre de démarche, d'autant plus que le jugement prononcé sur le coupable, souvent trop clément, semble décevant et injuste à la victime et ravive sa douleur.

Si vous êtes mis au courant d'un cas d'abus sexuel, la première chose à faire est d'éloigner la victime de l'abuseur, afin d'éviter que ce dernier ne recommence.


Dans le cas particulier d'abus sexuel sur mineur, la deuxième démarche est d'informer les autorités compétentes (services sociaux et police).


La loi vous fait obligation de ce dévoilement, et vous devez dans ce cas-là rompre le secret professionnel, sinon vous risquez d'être considéré par la loi comme complice. Cette dénonciation vise à protéger la victime et les autres victimes potentielles, et à obliger le coupable à arrêter ses agissements.

3. Les réactions des abuseurs à leur dévoilement


Un récent Colloque européen sur les violences sexuelles a établi que 82% des abuseurs n'admettent pas leur responsabilité (53% nient même totalement les faits). Seuls 18% d'entre eux admettent les faits, et encore parce qu'ils y sont obligés après confrontation avec les victimes, et non sans les accuser de les avoir "provoqués».


Cette négation des faits leur permet de persévérer dans leur perversion, et donc de ne pas être privés de leur jouissance, qui seule compte pour eux.


Quand ils ne peuvent plus nier les faits, ils les admettent en minimisant ou en niant les conséquences désastreuses sur les victimes, surtout si l'abus a été exempt de violence physique. S'ils ont du remords ou du regret, ce n'est jamais de leurs crimes, mais de s'être fait prendre et de devoir cesser.


Si un psy se montre indulgent envers un pervers, parce qu'il désire régler rapidement une situation qui le dépasse ou le dégoûte, il risque d'être manipulé par l'abuseur qui fera preuve d'un « repentir» à bon marché pour continuer en paix ses activités vicieuses cachées. Il se fait ainsi son complice, ce qui est grave.


Une réaction possible du coupable d'abus est la suivante : il salit et s'allie. Il salit les victimes ou d'autres personnes innocentes en les accusant du mal que lui-même commet ; ce faisant, il soulage ainsi sa culpabilité. Par ailleurs, il s'allie ceux qui peuvent devenir ses alliés et ses défenseurs (un père incestueux s'allie sa femme pour qu'elle le laisse abuser de leur fille).


Un pervers qui est dévoilé et qui refuse de se repentir peut tomber dans la panique, la dépression, l'alcool ou le suicide ; plus souvent il s'endurcit et continue de manière accrue ses pratiques.


Il est extrêmement rare qu'un délinquant sexuel se repente réellement, (tout au plus exprimera-t-il quelques vagues « regrets»), mais il faut toujours lui en donner l'occasion.



En conclusion, tout thérapeute devrait avoir à cœur de se former dans ce domaine si particulier, s'il veut s'occuper de personnes ayant souffert de ce drame que constitue l’abus sexuel.




Jacques et Claire Poujol

Conseillers Conjugaux et Familiaux

Site web: www.relation-aide.com


(Extrait du livre de Jacques et Claire Poujol : « Manuel de relation d’aide : l’accompagnement spirituel et psychologique», Empreinte Temps Présent, 1998.)



Bibliographie


Abus sexuel. L'enfant mis à nu, Gijsechem (Van) Hubert, Méridien Psychologie.

La personnalité de l'abuseur sexuel, Gijseghem (Van) Hubert, Méridien Psychologie.

La violence impensable, inceste et maltraitance, Gruyer F., Fadier-Nisse M., Dr Sabourin.

Le viol du silence, Thomas Eva, Aubier.

Le viol, Brownmiller Susan, Stock.

Le viol, Lopez Gérard, Piffaut Gina, Que sais-je ? n° 2753, PUF.

L'enfant violenté, Rouyer M., Drouet, Bayard.

La famille maltraitante, Cirillo S., De Blasio P., ESF, 1992.

Viol à domicile, la loi du silence, Bigourdan Paul, Delachaux Niestlé.

Violence et abus sexuels dans la famille, Perrone R., Nannini M., ESF, 1995.

Violences sexuelles en famille, Chemin, Drouet, Geoffroy, Jezequel, Joly, Erès.

17 février 2008

Le chantage affectif S. Forward

Le chantage affectif
S. Forward

Introduction 1.

Quand j’informais mon mari que j’allais prendre des cours un soir par semaine, il réagit avec cette agressivité subtile dont il a le secret. « Bon me dit-il, tu fais comme tu veux. Comme d’habitude quoi. Mais quand tu rentreras, tu ne me trouveras pas forcément là à t’attendre. Je suis pourtant toujours là pour toi. Pourquoi ne peux-tu pas faire de même pour moi ? ». J’ai beau savoir que ses arguments ne tenaient pas debout, je me suis sentie terriblement égoïste. A tel point que j’ai annulé mon inscription au cours.

Elisabeth

 

Je projetais de partir en voyage avec ma femme pendant les vacances de Noël. Cela faisait plusieurs mois que nous y pensions avec impatience. Or, lorsque je téléphonai à ma mère pour lui dire que nous avions enfin pris les billets, elle sembla tout à coup au bord des larmes. Elle demanda : « et le repas en famille ? tu sais bien que nous nous réunissons toujours le 25 décembre. Si vous partez, vous allez gâcher la fête pour tous les autres. Comment peux-tu me faire ce coup là, alors qu’il ne me reste plus beaucoup de Noëls à fêter ? ». Bien évidemment j’ai cédé. Ma femme aura sûrement envie de me tuer, mais je ne pourrais jamais profiter de mes vacances si je croulais sous le poids de la culpabilité.

Thomas.

 

J’ai été voir mon chef pour le prévenir que, pour le gros projet sur lequel je travaillais, il me fallait soit des collaborateurs supplémentaires, soit un délai plus long. Dès que j’ai laissé entendre que j’avais besoin de souffler un peu, il a contre-attaqué en disant : « je sais que vous avez hâte de retrouver votre famille, mais songez que même si vous leur manquez en ce moment, ils finiront par comprendre l’importance de la promotion que nous envisageons de vous donner. Il nous faut une personne douée d’un fort esprit d’equipe. Cela me semblait être votre cas, mais enfin, si vous y tenez, libre à vous de passer plus de temps avec vos enfants. Mais n’oubliez pas que, si telles sont vos priorités, nous pourrions être amenés à repenser votre plan de carrière. » J’ai eu l’impression que le piège se refermait sur moi. Je ne sais plus quoi faire.

Claire.

 

Quelle est la dynamique à l’œuvre dans ces récits ? Pourquoi certaines personnes ont-elles le chic de vous faire penser : « ça y est, j’ai perdu. Je cède à tous les coups. Je n’ai pas exprimé ce que j’éprouvais réellement. Pourquoi est ce que je ne parviens jamais à me faire comprendre ? Pourquoi suis-je si incapable de me défendre ? » On sait que l’on s’est fait avoir. On ressent un mélange de frustration et d’amertume pour avoir renoncé à ce que l’on voulait afin de contenter quelqu’un d’autre. Mais on ne voit pas comment y remédier. Comment se fait-il, se demande-t-on, que certains individus arrivent à me dominer psychologiquement, à me donner un tel sentiment de défaite ?

C’est que, dans ces situations dont on ne peut sortir gagnant, on a affaire à des experts en matière de manipulation. Ils vous gratifient d’une douceur rassurante quand ils obtiennent ce qu’ils veulent, alors qu’ils n’hésitent pas à vous menacer pour l’obtenir ou, face à un refus de votre part, à vous remplir de doutes et de remords. Ils  donnent ainsi l’impression d’appliquer une stratégie bien conçue mais, en réalité, ils n’ont pas nécessairement conscience de la nature de leurs méthodes. Certains d’entre eux peuvent même afficher une grande gentillesse et une patience infinie qui désarme toute méfiance.

Il s’agit en général d’un seul individu – conjoint, parent, frère ou sœur, ami – qui exerce avec une telle constance ses talents de manipulation que l’on en oublie les rudiments du comportement adulte que l’on croyait pourtant avoir maîtrisés. Car malgré les compétences que l’on possède ou les réussites qu’on enregistre dans d’autres domaines de notre vie, on ne ressent que désarroi et impuissance en face du manipulateur. Il vous mène par le bout du nez.

 

Considérons le cas de Sarah, greffier du tribunal. La trentaine passée, jolie et vivace, elle sortait depuis près d’un an avec Franck, entrepreneur en bâtiment. Ce couple parut heureux et soudé… jusqu’au jour où se posa la question du mariage. Depuis, affirme Sarah, « son attitude envers moi a complètement changé. Il semblait vouloir me mettre à l’épreuve ». Elle comprit la situation au cours d’un week-end – qu’elle espérait idyllique – passé dans le chalet de Franck. « A notre arrivée, raconte-t-elle, j’ai trouvé partout des bâches et des bidons de peinture. Il m’a tendu tout de suite un pinceau. Ne sachant pas comment réagir, je me suis mise à peindre. » Pendant toute la journée, les deux travaillèrent, le plus souvent en silence. Lorsqu’ils décidèrent d’arrêter, Franck sortit une bague de fiançailles sertie d’un énorme diamant.

Interloquée, Sarah lui demanda le sens de son geste. « Il m’a dit, explique-t-elle, qu’il avait eu besoin de savoir s’il pouvait compter sur ma bonne volonté, si j’allais assumer ma part de l’effort commun au lieu de le contraindre à tout faire dans notre couple. » Comme de bien entendu, l’histoire ne s’arrête pas là :

 

 Nous avons fixé la date et pris plein d’autres dispositions, mais notre relation ne s’est pas stabilisée pour autant. Car, à côté de tous les cadeaux qu’il m’offrait, il continuait à me tester. Si par exemple je montrais peu d’empressement à m’occuper des enfants de sa sœur un week-end, il me reprochait mon faible sens de la famille et se demandait à haute voix s’il ne valait pas mieux rompre nos fiançailles. Quand je parlais d’élargir le champ de mon activité professionnelle, il a mis en question la force de mon attachement à lui. Inutile de dire que j’ai renvoyé ce projet aux calendes grecques. C’était une suite ininterrompue d’incidents de ce genre dans lesquels c’était toujours moi qui cédais. Néanmoins, je persistais à me raconter que c’était un type formidable qui avait juste besoin de se sentir un peu plus en sécurité avec moi pour pouvoir vaincre sa peur du mariage.

 

Sous leur apparence civilisée, les menaces de Franck se révélèrent d’un efficacité d’autant plus redoutable qu’elles alternaient avec une tendresse suffisamment tentante pour brouiller les cartes. C’est ainsi que Sarah continuait, à l’instar de la plupart des gens dans une telle situation, à se laisser manipuler.

 

Pourquoi ? Parce que, à chaque fois, elle croyait bien faire en cherchant à le rendre heureux, tant l’enjeu lui semblait important. Elle avait beau en vouloir à Franck de brandir si souvent des menaces, elle justifiait ses capitulations répétées pour le maintien du couple.

Dans une relation de ce type, on concentre son attention sur les besoins de l’autre, au détriment des siens propres, et on se berce de l’illusion éphémère d’avoir ainsi acheté sa sécurité. On fait barrage aux désaccords, aux affrontements… et à la possibilité de construire une relation saine.

 Des échanges exaspérants comme ceux qu’a connus Sarah compte parmi les sources de friction les plus courantes dans toute relation personnelle, et pourtant ils sont rarement identifiés et compris. Dans bien des cas, on range ces incidents dans la catégorie des « problèmes de communication ». on se dit « je suis un affective alors que lui il a un côté très cérébral », ou « elle a un autre état d’esprit ». Or en réalité le conflit ne s’explique pas par une quelconque différence de mode de communication. Il réside plutôt dans le fait que l’un des deux acteurs impose sa volonté à l’autre. Il s’agit de bien plus que d’une simple mésentente : il convient dans ce cas de parler de luttes de pouvoir, et de rapports de force.

 

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